Société Française des Infirmier(e)s Anesthésistes
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Check list-Interruption de tâche
Article mis en ligne le 24 septembre 2010
dernière modification le 1er novembre 2023

par Arnaud Bassez

Interruption de tâche lors des activités anesthésiques au bloc opératoire et en salle de surveillance post-interventionnelle

La HAS définit l’interruption de tâches (IT) comme "l’arrêt inopiné, provisoire ou définitif d’une activité humaine. La raison est propre à l’opérateur, ou, au contraire, lui est externe".

Interruption de tâche lors des activités anesthésiques au bloc opératoire et en sspi (HAS 2020)

Dans la continuité du travail réalisé par la HAS et publié en janvier 2016 sur «  l’interruption de tâches lors de la préparation de médicaments  », un guide spécifique à l’interruption de tâche (IT) pour les activités anesthésiques au bloc opératoire et en SSPI est proposé pour accompagner les équipes. Ce travail est le résultat d’une collaboration avec la Société Française d’Anesthésie Réanimation (SFAR), le collège d’anesthésistes-réanimateurs (CFAR) et le comité « analyse et maîtrise du risque » (CAMR).

Le passage au bloc opératoire représente une période particulièrement à risque. De fait, les interruptions de taches représentent une situation à risque pouvant favoriser la survenue d’un EIG. En plus des conséquences directes pour le patient, les retentissements indirects pour l’équipe soignante sont potentiellement nombreux  : défauts de communication, altération de la qualité de vie au travail, conflits, Burn out ….

Depuis une dizaine d’années, la communauté scientifique a pris conscience de ce problème comme en témoigne les publications récentes sur le sujet. Ainsi la lutte contre les IT est à la croisée des chemins entre sécurité du patient, relation humaines et économie de santé s’inscrivant en droite ligne du projet du CFAR «  un patient - une équipe  »1.Si la cible du projet concerne l’équipe d’anesthésie, les mesures à prendre seront systémiques et engloberont l’équipe anesthésique comme chirurgicale, encadrante et administrative.

Pour autant, les IT ne sont pas une fatalité et il est possible d’agir sur l’organisation et le travail en équipe afin de réduire ces interruptions :

  • En développant les bonnes pratiques de sécurité pour rendre l’activité plus robuste face aux erreurs
  • En développant une prise de conscience collective.

 Le guide

Il fournit  :

  • Un rappel des données de la littérature,
  • L’identification de 4 étapes considérées comme particulièrement à risque (les «  4 temps patients  ») : vérification de l’identité du patient (lors du premier temps de la check-list HAS, préparation médicamenteuse, induction anesthésique et time out (deuxième temps de la check-list HAS). Ces périodes à risques sont des périodes se retrouvant dans tous les blocs opératoires et sont les périodes au cours desquelles le risque d’erreur et d’EIG sont les plus grands. Elles seront à adapter par les différentes équipes en fonction de leurs environnements.
  • Un support permettant la réalisation d’un diagnostic à partir d’un audit  ; celui-ci se compose d’une grille de recueil pour la salle de bloc et la SSPI (format Excel et Word) et une fiche de débriefing.
  • Le diagnostic pourra être complété par l’analyse des EIG avec la méthode ALARM  ; 2 illustrations ainsi qu’un exemple de scénario de simulation sont proposés dans le guide pour permettre une prise de conscience et/ou compléter cette analyse.
  • Des préconisations formulées illustrent les solutions en termes de barrières de prévention et de récupération.

La SOFIA a participé à l’édification de ce guide.

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Check-list

Au bloc tout particulièrement, la sécurité des patients est en lien avec la qualité du travail en équipe multiprofessionnelle. L’utilisation d’une check-list vise à améliorer le partage des informations et à réaliser une vérification croisée de critères considérés comme essentiels avant, pendant et après toute intervention chirurgicale. La mise en œuvre d’une telle check-list a démontré son efficacité pour diminuer de manière significative la morbi-mortalité postopératoire.

  • La gestion des "No Go" au bloc
    En 2018, la HAS propose une nouvelle actualisation de la check-list dont le principal objectif est de renforcer la participation effective de l’ensemble de l’équipe à la réalisation de la check-list. Il s’agit de permettre qu’une décision collégiale soit prise avant l’incision afin d’acter la poursuite de l’intervention (Go) ou son arrêt immédiat et imprévu (No Go).

Les modalités de mise en œuvre de la check-list dans le cadre de la procédure de certification des établissements de santé sont décrites dans la fiche pédagogique "évaluation des secteurs interventionnels selon le référentiel de certification".

Evaluation des secteurs interventionnels selon le référentiel de certification (HAS)

La HAS et le groupe national check-list mettent à disposition des établissements ce document recensant toutes les modalités d’évaluation de l’utilisation de la CL. Les professionnels choisiront le ou les support(s) qui leurs semble(nt) les plus approprié(s) à leurs spécificités. Ces grilles sont bien évidemment modifiables selon les démarches déjà entreprises dans l’établissement.

Pour une meilleure utilisation de la check list Sécurité du patient au bloc opératoire (HAS)

Elle aborde le motif de l’hospitalisation, les soins primaires, la sécurité du médicament, les plans de suivi, le référent pour le retour à domicile, la communication avec le personnel en ambulatoire et l’éducation du patient.

Source : Soong C, Daub S, Lee J, Majewski C, Musing E, Nord P, Wyman R, Baker GR, Zacharopoulos N, Bell CM.. Development of a checklist of safe discharge practices for hospital patients.J Hosp Med. 2013 Mar 29. doi : 10.1002/jhm.2032.

  • Etude de l’efficacité de la check-list en chirurgie
    Revue de questions par une équipe suisse de l’efficacité de la check-list en chirurgie.

4997 références considérées, 22 finalement analysées (méthodes prouvables).

13 articles portent sur des améliorations de résultats cliniques après application de la check-list : (baisse de la) mortalité : Risk Ratio / risque relatif=0,57, (baisse de toutes les) complications : RR=0,63, (baisse des) infections du site opératoire : RR= 0,62, ré-interventions non programmées : RR=0,76, (baisse du) taux des complications respiratoires infectieuses : RR=0,87.

15 études ont évalué l’observance avec des taux qui varient de 12 à 100% au total, de 70 à 100% pour le time out.
5 études sont spécifiques aux facteurs qui influencent l’observance : le facteur revenant le plus étant l’explication du pourquoi et du comment on fait des check-lists, et le fait que la check-list soit introduite en prenant soin d’un consensus dans l’équipe.
Les résultats sont donc plutôt bons et confirment le bien-fondé de l’outil.

Source : Borchard, A, David L. ,Schwappach B. , Aline Barbir A., Bezzola P. A Systematic Review of the Effectiveness, Compliance, and Critical Factors for Implementation of Safety Checklists in Surgery .Annals of Surgery (September2012) : 1.

Une revue de questions assez bien faite, qui montre quand même des résultats en dépit des sceptiques… mais aucun article sélectionné n’est français.

  • Attitudes and compliance to the WHO Surgical Safety Checklist ; a review
    Attitudes and compliance to the WHO Surgical Safety Checklist ; a review (2016)

    26 articles inclus. La check-list est initiée au bloc dans 90% des interventions, mais son accomplissement est bien moins bon dans le contenu, avec la partie « sign out / briefing » inférieure à 50% de conformité. Inversement, la vérification de l’identité du patient est effectuée dans plus de 90% des cas (mais pas la vérification des personnels dans la salle). La conclusion montre une grande dépendance du résultat en fonction des personnalités présentes dans la salle. (prevention-medicale.org Revues-de-questions-thematiques)

Pour mémoire, la check-lit a bien évolué depuis 2010.

check list securité du patient au bloc
HAS check list mode d’emploi
checklist securité au bloc v2011_01
Feuille de préparation d’ouverture de salle
La revue de questions : A systematic review of the effectiveness, compliance and critical factors for implemenation for safety checklist in surgery (31 août 2012)
Check list sécurité du patient au bloc opératoire Version 2018 (vérifier ensemble pour décider) HAS
Présentation check list sécurité du patient au bloc opératoire (HAS 2018)

Des erreurs persistent malgré la check-list au bloc opératoire

source infirmiers.com Mise à jour le 02.10.14

Les erreurs médicales commises au bloc opératoire concernant le côté, l’organe ou la personne persistent et sont à l’origine d’une sinistralité non négligeable, malgré l’obligation d’utiliser la "check-list" de la Haute autorité de santé (HAS), selon une étude basée sur les données de la société d’assurance mutuelle du secteur sanitaire, social et médico-social Sham, présentées la semaine dernière au congrès de la Société française d’anesthésie et de réanimation (Sfar) à Paris.

Bloc opératoire : des sinistres essentiellement dus à des erreurs humaines
Il existe peu de données sur ce type d’erreurs médicales et aucune étude épidémiologique française sur ce sujet, rappellent Alexandre Theissen du centre hospitalier Princesse Grace de Monaco et ses collègues. Or ces erreurs sont en théorie totalement évitables depuis la mise en place de la "check-list", obligatoire au 1er janvier 2010, soulignent-ils. Ils ont réalisé une étude rétrospective des sinistres déclarés à la Sham de 2009 à 2013. L’assureur garantit 80% des établissements publics et 27% des établissements privés, notent les auteurs.

Sur 29 565 déclarations de sinistres, 125 concernaient ce type d’erreurs, soit 0,42% du total des sinistres déclarés à la Sham. Parmi ces dossiers, 111 ont été indemnisés à l’amiable ou devant la commission de conciliation et d’indemnisation (CCI), pour un montant moyen de 10 223 euros. Quatorze dossiers ont été réglés par voie judiciaire, pour un montant d’indemnisation moyen de 19 837 euros. Les deux principales spécialités concernées sont l’orthopédie (46 dossiers), la neurochirurgie (18 dossiers) et la stomatologie (13 dossiers).

Le sinistre est survenu au bloc opératoire dans 112 cas, et après la diffusion obligatoire de la "check-list" dans 85 cas. Ont été concernés 85 établissements publics, huit privés non lucratifs, 18 privés lucratifs et 14 personnes physiques. L’analyse des dossiers rapporte que les causes sont essentiellement liées à des erreurs humaines dans un contexte multifactoriel : chirurgie urgente, nombre important d’intervenants, non-communication au sein des équipes, surcharge de travail, absence de procédures formalisées de vérification (check-list), commentent les auteurs. Ces données doivent aider à renforcer la démarche qualité au bloc opératoire et montrent l’importance du respect des recommandations de la HAS d’utilisation de la ’check-list’ au bloc opératoire, concluent-ils.


Sécurité au bloc opératoire : des données récentes sur le travail en équipe au bloc opératoire, l’efficacité de la check-list de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le team training

17.03.2014

Trois articles parus récemment, apportent un éclairage complémentaire sur la sécurité au bloc opératoire et le travail en équipe - thématiques largement soutenues par la HAS à travers la procédure de certification des établissements de santé, le dispositif d’accréditation des médecins et la sécurité du patient en général.

La littérature apporte (presque) chaque jour des données soulignant l’importance du travail en équipe et des moyens utilisés pour favoriser son bon fonctionnement : les briefings structurés au travers de check-lists et le soutien (l’entrainement : Team training) à sa mise en œuvre dans le travail au quotidien. Ces trois articles nous permettent de faire un point en la matière. Ils sont proposés par : l’Imperial College of London pour le premier, l’équipe de l’Université d’Hasselt en Belgique pour le deuxième et la Johns Hopkins University pour le troisième.

 Résumés

(1) Malgré les difficultés liées à la variation des travaux retenus, cette revue systématique conclut avec un bon niveau de preuve que l’utilisation de « check-lists sécurité » améliore la qualité perçue du travail en équipe et de la communication au sein de l’équipe. Elle réduit aussi, de manière objective, les erreurs liées à de faibles capacités de travail en équipe. Les auteurs retiennent de cette analyse que ces progrès sont liés à la mise en place d’outils et d’un espace de communication permettant le partage des informations critiques concernant le patient, favorisant la cohésion et la coordination de l’équipe, améliorant la prise de décision, limitant les interruptions de continuité des soins… Toutefois, des outils mal utilisés ou des équipes peu motivées peuvent avoir des effets contraires à ceux recherchés sur le fonctionnement en équipe.

(2) La deuxième revue systématique porte sur l’efficacité de la check-list OMS en termes de réduction des complications post-opératoires. Malgré l’hétérogénéité méthodologique des études retenues (7 sur 723), les auteurs ont pu réaliser une méta-analyse portant sur trois résultats essentiels :

  1. la survenue de toutes complications post-opératoires,
  2. la mortalité,
  3. l’infection du site opératoire.
    Les auteurs concluent à une forte corrélation entre l’utilisation de la check-list et une diminution significative des complications post-opératoires.

(3) Le troisième article rapporte près de 500 travaux, qui détaillent tout ce qui a été décrit sous le terme d’amélioration du travail en équipe, secondairement rebaptisé Team Training, avec une grande hétérogénéité de concepts, de programmes, de modalités de mises en œuvre. Cette revue actualisée propose en fait un catalogue (les auteurs parlent même de « constellation » de programmes) de tous les moyens permettant d’entrainer les équipes, ce qui peut être fait en la matière et comment le faire d’où le titre humoristique, à défaut d’être classique, de synthèse narrative de la littérature. Malgré une définition large du « team training » (tout programme qui vise à développer, préciser ou renforcer les connaissances, aptitudes ou attitudes qui sous-tendent les caractéristiques d’un travail en équipe efficace, tels communication, collaboration et coordination), les auteurs retiennent avec un niveau de preuve allant de « moyen à élevé », l’efficacité de cette démarche pour améliorer le travail en équipe, et réduire les effets indésirables et la morbidité, et même la mortalité.

  • (1) Russ S, Rout S, Sevdalis N, Moorthy K, Darzi A, Vincent C. Do Safety Checklists Improve Teamwork and Communication in the Operating Room ? A Systematic Review. Ann Surg 2013 ;00:1–16
  • (2) Bergs J, Hellings J, Cleemput I, Zurel O, De Troyer V, Van Hiel M, Demeere J-L, Claeys D, Vandijck D. Systematic review and meta-analysis of the effect of the World Health Organization surgical safety checklist on postoperative complications. BJS 2014 ;101:150-158
  • (3) Weaver S, Rosen S. Team-training in healthcare : a narrative synthesis of the literature. BMJ Qual Saf 2014 ;0:1–14.

 Commentaires

Peu d’articles ont eu plus d’impact au cours des dernières années que celui publié en 2009, dans le New England Journal of Medicine, par le Safe Surgery Saves Lives Study Group piloté par Atul Gawande (chirurgien travaillant au Brigham and Women’s Hospital de Boston). Ce travail avait scientifiquement démontré que l’utilisation d’une check-list pouvait diminuer de moitié le taux de complications post-opératoires ainsi que la mortalité. Bien que cet article soit devenu quasi-instantanément un classique de la littérature scientifique, le travail avait été critiqué par certains du fait de son format « avant-après » et de son manque de données sur la période post-hospitalisation.

Alors que l’utilisation de telles check-lists fait de plus en plus partie de la routine au bloc opératoire pour assurer la sécurité des patients, il est toujours important de continuer à convaincre de l’efficacité de tels briefings, même si intuitivement, on ne peut guère nier leur intérêt.
Le premier papier permet donc de conclure que l’utilisation de check-list a un effet positif sur le travail en équipe au bloc opératoire et la communication. C’est certainement un des mécanismes grâce auxquels ces outils améliorent les processus et résultats des prises en charge chirurgicales - amélioration démontrée dans le deuxième papier (méta analyse). Il faut cependant souligner que la checklist fait souvent partie d’une mesure parmi d’autres pour améliorer la sécurité et que son adhésion n’a pas pu être mesurée directement. Le troisième peut lui, fournir une réflexion sur la méthode pour mettre en œuvre le travail en équipe, qui en médecine, revêt des caractéristiques hautement dynamiques avec des membres participant parfois à différentes équipes… Cette revue souligne l’hétérogénéité de ces « entrainements » tant dans leur conception que dans leur mise en œuvre. Mais un point apparaît clairement : celui de la nécessité des adaptations locales. Le constat clef est que les programmes qui ont affiché leur efficacité, sont ceux qui ont mis en œuvre des interventions groupées, multidisciplinaires et surtout promouvant des pratiques facilement mises en œuvre dans le travail au quotidien.

Quoi qu’il en soit, et dans le cadre de cette « nouvelle » dynamique de travail en équipe, il convient modestement de rappeler une phrase prononcée par William J Mayo, lors de son discours introductif pour les étudiants en début de formation au Rush Medical College… en 1910* : « It has become necessary to develop medicine as a cooperative science ; the clinician, the specialist and the laboratory workers uniting for the good of the patient, each assisting in elucidation of the problem at hand and each dependent upon the other for support »

*Traduction libre : « Il devient absolument nécessaire de concevoir dorénavant la médecine comme une science / pratique coopérative pour laquelle les cliniciens, les spécialistes et les biologistes unissent leurs efforts pour le bien des patients, chaque professionnel assistant les autres pour assurer la meilleure prise en charge ».

Dr Laetitia May-Michelangeli et Dr Philippe Cabarrot – HAS


Illustration des bienfaits de la checklist préopératoire

Publié le 31/05/2018

Dès 2009, l’attention des chirurgiens a été attirée sur les bénéfices en terme de réduction de mortalité et de morbidité, de l’utilisation en préopératoire d’une checklist permettant la vérification croisée que différents critères jugés essentiels pour la sécurité du patient étaient bien remplis. Ceci a été confirmé, y compris par des essais randomisés. Toutefois, les résultats de ces travaux ont pu être contestés ultérieurement sur des échantillons plus vastes.

Ces listes préopératoires de vérification (LPV) doivent cependant être appliquées, ne fût-ce que pour le lien qu’elles créent dans l’équipe soignante où chacun se sent impliqué dans la sécurité de l’opéré. Cela suppose un effort collectif et multidisciplinaire, coordonné et soutenu, un chef reconnu, et une adaptation au terrain local, faute de quoi ces listes sont mises en défaut. En Caroline du Sud, plusieurs hôpitaux se sont groupés pour intégrer une version adaptée à l’environnement, basée sur le volontariat, et conçue pour accroître son acceptabilité. Ce travail a cherché à comprendre l’effet de ce programme de LPV sur la mortalité.

Celui initié par les auteurs était basé sur un engagement multidisciplinaire, un cadrage de l’équipe et une culture de la sécurité. Il a connu plusieurs améliorations en fonction des « retours » des membres de l’équipe et des séances de formation. Tous les corps de métiers participant à la réadaptation postopératoire (kinésithérapeutes, diététiciennes) ont été mobilisés.

Des réunions semestrielles ont permis de faire le point sur les progrès accomplis et des formations par webinaires, visites et téléconférences ont été proposées.
Diminution de la mortalité dans les hôpitaux où la liste est rigoureusement suivie
L’étude a porté sur les adultes (à l’exclusion des femmes enceintes) opérés entre 2008 et le 1er décembre 2013, et ayant passé au moins deux nuits à l’hôpital. La période 2008-2010, où la LPV était en gestation, a été utilisée comme période contrôle et la période 2010-2013, où la LPV était opérationnelle comme période active. On a aussi comparé les hôpitaux appliquant rigoureusement la LPV aux autres.

Le critère principal de jugement a été la mortalité à 30 j, puis le taux de ré-interventions et de réadmissions.

Les 14 hôpitaux « observants » (HO) ont regroupé 37 % des malades et les 44 autres 63 %. Dans ces 14 hôpitaux, il y a eu 22 500 interventions en 2010 et 18 112 dans les 11 premiers mois de 2013, vs 38 800 et 30 200 dans les hôpitaux témoins (HT).

On a observé une tendance à une baisse de la mortalité dans les HO par rapport aux HT, à partir de 2010, alors que les courbes étaient identiques de 2008 à 2010, cette tendance étant significative (p = 0,016). Alors que la mortalité est restée étale dans les HT, elle a chuté dans les HO de 3,38 % en 2010 à 2,84 % en 2013 (p < 0,001). En revanche le taux des ré-interventions et réadmissions est resté stable.

Il est donc faisable et souhaitable de proposer la liste de vérifications à une grande échelle.

Dr Jean-Fred Warlin

Référence
Haynes ABet coll. : Mortality trends after a voluntary checklist-based surgical safety collaborative. Ann Surgery 2017 ; 266 :923-929.

source :jim.fr


Les check-lists au moment du time-out renforcent la sécurité dans le cadre des anesthésies hors bloc opératoire

Candace Chang, MD, MPH Ryan Dudley, MD
Volume 4, No. 3 • Octobre 2021 source : www.apsf.org/

Introduction

Les check-lists au moment du time-out permettent de réduire la morbidité et la mortalité dans le cadre des procédures chirurgicales.1 Bien que ces check-lists soient omniprésentes au bloc opératoire, leur adoption dans d’autres espaces où sont réalisées des procédures est irrégulière, mais tout aussi importante. Les défis liés à l’anesthésie hors bloc opératoire (AHBO) sont notamment l’inefficacité de la dynamique d’équipe, l’éloignement géographique par rapport à l’assistance, des procédures inconnues et les obstacles physiques, présents dans l’environnement de travail.2,3 En outre, les études ont montré que les patients auxquels est administrée une AHBO ont tendance à être plus âgés et à souffrir d’un plus grand nombre de comorbidités par rapport aux patients au bloc opératoire.4 Les complexités supplémentaires liées à l’éloignement géographique, avec des installations uniques et du personnel qui peut ne pas être familier avec le travail associé à une AHBO, rendent encore plus importantes l’utilisation des check-lists au moment du time-out, afin d’établir des bases communes et de veiller à optimiser les soins prodigués au patient. Cet article a pour but de mettre en avant des éléments importants pour la conception et la mise en œuvre d’une check-list d’une AHBO, fondés sur l’expérience de notre établissement.

De nombreux aspects d’une check-list de time-out sont semblables, qu’il s’agisse d’un bloc opératoire ou de sites AHBO, mais ces derniers présentent des éléments uniques ou sur lesquels il est plus important de mettre l’accent. Par exemple, il est courant au bloc opératoire d’attendre que le patient soit préparé et champé pour lancer le time-out. Cependant, nous recommandons de réaliser le time-out avec le patient en situation d’AHBO, avant l’induction de l’anesthésie, en raison des singularités potentielles de ces procédures. Par exemple, le positionnement pour une procédure guidée par tomodensitométrie peut dépendre d’un scanner initial. Il n’est pas commode de mettre le patient en décubitus ventral alors qu’il est déjà intubé et qu’il se trouve en décubitus dorsal sur le chariot du scanner. Une autre possibilité est la nécessité d’isolement respiratoire pour une procédure, que les radiologues peuvent oublier de préciser à l’avance aux anesthésistes.
Check-lists

Notre check-list de time-out se concentre sur quatre catégories essentielles : 1. patient ; 2. procédure ; 3. équipe ; et 4. mesure d’urgence.

  • Patient  : Les données relatives au patient que contient la check-list d’une AHBO sont très semblables à celles utilisées au bloc opératoire. Il s’agit des informations habituelles sur l’identité du patient, son poids et ses allergies. Des informations complémentaires peuvent inclure les résultats d’un test de grossesse, le statut en termes de COVID-19 et les analyses de coagulation. Il conviendra également d’y présenter l’état du patient. Dans les lieux où sont pratiquées les AHBO, les personnes responsables de la procédure sont souvent des consultants, pas l’équipe des soins primaires, ce qui met l’accent sur la nécessité de clarification des plans de sortie d’hôpital, y compris le lieu des soins post-anesthésie et si le patient sera admis ou autorisé à rentrer à son domicile après la procédure.
  • Procédure : La position du patient, la durée de l’intervention, la discussion relative aux complications potentielles et la douleur anticipée après la procédure doivent faire l’objet de discussions, en particulier si l’anesthésiste ne connaît pas la procédure. Les patients qui subissent une anesthésie générale nécessitent un positionnement et une protection corrects, une prophylaxie de la thrombose veineuse profonde et la gestion de la température. Il est possible que le personnel dans un lieu où est pratiquée une AHBO ne soit pas habitué à la mise en place de ces interventions et qu’il lui soit éventuellement demandé de réunir le matériel nécessaire.
  • Équipe : La dynamique d’équipe peut être compliquée, car il est possible que les membres de l’équipe réalisant la procédure ne travaillent pas habituellement avec des anesthésistes. Établir un rapport grâce à des présentations peut permettre un meilleur travail d’équipe et jouer un rôle crucial dans le cadre de mesures d’urgence. L’équipe au complet devrait participer au time-out afin que les questions que se pose chaque membre de l’équipe reçoivent des réponses et que le plan de soins soit compris de tous. Dans notre établissement, l’équipe de l’anesthésie n’avait pas réussi à établir une pratique de time-out dans une situation d’AHBO jusqu’à ce que nous impliquions l’équipe entière composée de médecins, infirmiers et techniciens dans la procédure.5
  • Mesures d’urgence : L’un des plus gros défis liés à une AHBO est son éloignement géographique, encore plus que la disponibilité immédiate du personnel d’anesthésie et d’équipements supplémentaires de maintien en vie. Par conséquent, il est essentiel de veiller à ce que des numéros de personnes à contacter en cas d’urgence soient disponibles s’il s’avère nécessaire de demander l’aide de soignants et de techniciens anesthésistes supplémentaires. Nous avons établi un système consistant à noter ces numéros de personnes à contacter sur un tableau blanc au moment du time-out. Ainsi, tous les membres de l’équipe possèdent ces informations et une personne autre qu’un membre de l’équipe d’anesthésie peut appeler de l’aide en cas de besoin. Pendant le time-out, il faut également vérifier où se trouvent le chariot de réanimation et le chariot d’hyperthermie maligne.

Pour le time-out, nous utilisons un grand tableau blanc où figurent tous les éléments clés de la check-list (voir Figure 1). Nous avons constaté que l’indice visuel que procurent les éléments de la check-list est essentiel pour la réussite du time-out. La visualisation de la check-list crée une compréhension commune du plan de soins, permet une participation active et assure un accès aux information essentielles pendant toute la durée de la procédure.

Figure 1 : Exemple de check-list de time pour une AHBO, indiquant les quatre catégories principales : patient, procédure, membres de l’équipe et contact en cas d’urgence.

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Figure 1 : Exemple de check-list de time pour une AHBO, indiquant les quatre catégories principales : patient, procédure, membres de l’équipe et contact en cas d’urgence.

Conclusion

Pour établir une check-list de time-out, il faut plus qu’un simple tableau blanc et s’attendre à ce que les gens l’utilisent. Comme tout autre projet d’amélioration de la qualité, il est fondamental d’impliquer l’équipe au complet pour garantir la réussite de la mise en œuvre. Un time-out réussi doit comprendre les questions que les chargés de procédure, les anesthésistes, les infirmiers, les techniciens et les patients ont jugé qu’il était important de discuter avant la procédure. Après la mise en œuvre de la check-list, il est essentiel de demander un feedback pour assurer une réussite durable. Il est peu probable qu’un time-out focalisé sur l’anesthésiste soit une réussite sans l’engagement des autres membres de l’équipe. Les anesthésistes se concentrent souvent sur les tâches pratiques, associées au positionnement des tubulures et des moniteurs, dans la préparation à l’induction, ils peuvent se détourner du rôle d’animation du time-out. Nous sommes favorables à l’émulation d’une pratique commune au bloc opératoire, où le soignant chargé de la procédure ou l’infirmière de liaison anime le time-out. Après la mise en œuvre du time-out, l’évaluation de la compliance peut permettre d’établir des attentes et de s’assurer que le time-out est intégré au flux de travail des sites pratiquant des AHBO.

La prévention d’évènements défavorables et la préparation du terrain pour des mesures optimales en cas d’évènements inattendus nécessitent une préparation de l’équipe en amont. La conduite systématique d’un time-out avant d’anesthésier un patient pour une procédure AHBO permet d’établir des bases communes pour les membres de l’équipe.

Le time-out pour une AHBO permet également d’être plus conscient des évènements anticipés pendant la procédure et de mettre au point des méthodes pour accéder à une aide supplémentaire en cas de besoin. Cette procédure permet de s’assurer que les procédures de routine se déroulent plus harmonieusement, car les inquiétudes peuvent être discutées à l’avance, et contribue également à établir des mesures appropriées en cas d’évènement défavorable. En raison des complexités liées au travail en AHBO, de tels préparatifs préalables pourraient permettre d’éviter une morbidité significative, voire la mortalité.

Candace Chang est professeur adjoint d’anesthésie à l’Université de l’Utah, Salt Lake City, UT.

Ryan Dudley a une bourse de formation en anesthésie pédiatrique à l’hôpital des enfants de Cincinnati, Cincinnati, Ohio.

Les auteurs ne signalent aucun conflit d’intérêts.

  • Documents de référence
  1. Haynes AB, Weiser TG, Berry WR, et al. A surgical safety checklist to reduce morbidity and mortality in a global population. N Engl J Med. 2009 ;360:491–499.
  2. Chang B, Kaye AD, Diaz JH, Westlake B, Dutton RP, Urman RD. Interventional procedures outside of the operating room : results from the National Anesthesia Clinical Outcomes Registry. J Patient Saf. 2018 ;14:9–16.
  3. Walls JD, Weiss MS. Safety in non-operating room anesthesia (NORA). APSF Newsletter. 2019 ;34:3–4, 21. https://www.apsf.org/article/safety-in-non-operating-room-anesthesia-nora/. Accessed February 14, 2021.
  4. Nagrebetsky A, Gabriel RA, Dutton RP, Urman RD. Growth of nonoperating room anesthesia care in the United States : a contemporary trends analysis. Anesth Analg. 2017 ;124:1261–1267.
  5. Dudley R, Chang C. Time out for pediatric radiation therapy—a patient safety initiative. Poster session presented at 66th Annual Update in Anesthesiology, Park City, UT. February 2021.