Société Française des Infirmier(e)s Anesthésistes
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La pollution au bloc opératoire
Article mis en ligne le 29 janvier 2012
dernière modification le 4 mars 2024

par Arnaud Bassez

Cet article ne traite que de la problématique envisagée : la pollution au bloc opératoire.

En ne négligeant pas les autres problèmes de sécurité comme les AES, la toxicomanie, les risques d’électrisation d’incendie et d’explosion, le risque d’allergie au latex, le risque lié à l’exposition aux rayonnements ionisants ou le burn out qui font l’objet d’autres articles.

A lire en complément
 Développement durable au bloc opératoire
 Les halogénés

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Il convient de se protéger d’abord.

Il existe plusieurs risques professionnels liés à la pratique de l’anesthésie. La toxicité des gaz anesthésiques, en particulier du protoxyde d’azote, a été mise en évidence dès le début de leur utilisation. L’abandon des gaz les plus toxiques et l’application de mesures de protection collectives (système d’évacuation des gaz anesthésiques (SEGA (celui qui est plus fort que toi), ventilation des salles d’intervention, utilisation de circuit avec réinhalation) permettent de diminuer considérablement le risque lié à leur emploi.

[...]"Le Global Warming Potential (GWP) du desflurane est de 3 714 kg de CO2/kg, celui du sevoflurane de 349 kg de CO2/kg. L’ajout de 60 % de N2O multiplie par 6 l’impact pour le sevoflurane. Les agents halogénés ont une durée de vie dans l’atmosphère de 1,2 an pour le sevoflurane, 3,6 ans pour l’isoflurane et 10 ans pour le desflurane [3]. Le Montreal protocol et l’European F-Gas Directive N° 842/2006 n’incluent pas les agents inhalés dont font partie les agents halogénés."

(extrait du document ci-dessous)

Ce qui fait une différence entre le desflurane et le sévoflurane de 10,64 en potentiel de réchauffement global (PRG) ou Global Warming Potential (GWP) (pour céder à la mode anglosaxone)

Les médicaments utilisés en anesthésie sont-ils vraiment des polluants majeurs. (Chapuis-Guerquin-Albaladejo)

Sur le document ci-dessous, le Le Global Warming Potential (GWP) du desflurane est de 2540 kg de CO2/kg, celui du sevoflurane de 130 kg de CO2/kg.

Un avenir volatil. Pierre-Mathieu-Toupin 21 avril 2018

Ce qui fait une différence entre le desflurane et le sévoflurane de 19,53 soit 8,89 de différence entre les deux documents. Un potentiel polluant variant. Il faudra être vigilant sur les chiffres avancés par les auteurs, car la fiabilité semble relative.


Les blocs opératoires sont aussi des pollueurs silencieux

Par Aurélie Franc
Publié le 21/05/2018, source : le figaro.fr

Ce sont notamment les gaz anesthésiques, non recyclés, qui constituent une source de pollution importante. Plus de 95 % du gaz utilisé lors des opérations s’échappe en l’état.
Une opération chirurgicale sous anesthésie générale produit plus de gaz à effet de serre qu’un trajet Paris-Lyon en voiture. Chacun de ces actes médicaux émettrait en moyenne entre 150 et 230 kg de CO2, contre « seulement » 120 kg de CO2 pour traverser la moitié de la France en voiture, selon une étude publiée fin 2017 dans The Lancet. De quoi mobiliser les anesthésistes réanimateurs français, pour réduire leur consommation dans les blocs opératoires.

Les estimations des émissions de carbone ont été réalisées par une équipe de chercheurs canadiens, dans trois hôpitaux anglophones : l’hôpital général de Vancouver (Canada), le centre médical de l’université du Minnesota (États-Unis) et l’hôpital John Radcliffe (Royaume-Uni).

Trois critères ont été retenus pour mesurer la production de CO2 : la consommation d’énergie (lumières, chauffage, etc.), l’émission de gaz anesthésiants (la pollution liée à ces gaz a été transposée en émission de CO2) et enfin, la production de déchets matériels des hôpitaux.
Dans les trois cas, les gaz anesthésiques et la consommation d’énergie étaient la source principale d’émission de gaz à effet de serre. Dans les hôpitaux canadien et américain, les gaz étudiés (isoflurane, sevoflurane et desflurane, dits gaz halogénés) représentaient respectivement 63 % et 51 % des émissions des blocs opératoires. À l’inverse, au Royaume-Uni, ils ne représentaient que 4 % (alors que la consommation d’énergie comptait pour 84 %).

« À cause de l’utilisation [du desflurane], les hôpitaux américains rejettent dix fois plus de gaz dans l’atmosphère que leurs homologues anglais  »
Les chercheurs de l’étude, qui plaident pour une réduction de l’utilisation de ce gaz

Pourquoi tant de différence ? Tout d’abord l’hôpital John Radcliffe, plus grand, consomme davantage d’énergie. Mais c’est surtout que cet hôpital anglais n’utilise pas de desflurane, un anesthésique extrêmement polluant. « À cause de l’utilisation de ce produit, les hôpitaux américains rejettent dix fois plus de gaz dans l’atmosphère que leurs homologues anglais », notent les chercheurs de l’étude, qui plaident pour une réduction de l’utilisation de ce gaz.

« Le desflurane et le sevoflurane sont aussi utilisés dans les hôpitaux français. Tout comme le protoxyde d’azote (gaz non halogéné cette fois), non mentionné dans l’étude du Lancet et qui est pourtant extrêmement polluant », alerte le Dr Jane Muret, anesthésiste à l’Institut Curie, et coauteure du Guide pratique développement durable au bloc opératoire coédité par le Groupe développement durable de la Société française d’anesthésie et de réanimation (Sfar) et le C2DS (Comité développement durable en santé).

Pourquoi ces gaz, pourtant inhalés par le patient, se retrouvent-ils dans l’atmosphère ? « Parce que le patient n’en métabolise qu’une toute petite partie. On estime que plus de 95 % du gaz utilisé lors des opérations s’échappe en l’état, explique le Dr Jane Muret. Et pour éviter qu’ils ne restent dans la salle d’opération, les gaz sont évacués via des prises Sega (pour “système d’évacuation des gaz anesthésiques”). Ces prises les aspirent hors de la salle d’opération pour les rejeter directement à l’extérieur de l’hôpital. Les gaz s’échappent donc tels quels dans l’atmosphère. »
Une entreprise canadienne a créé un dispositif, le Deltasorb, qui n’est pas encore disponible en France, pour capturer les gaz dans la salle d’opération, les purifier et les réutiliser

Le Groupe développement durable de la Sfar essaye donc de promouvoir des pratiques plus durables. Il prône prioritairement une réduction de l’utilisation de certains gaz particulièrement polluants, comme le desflurane. « Certes, celui-ci est indiqué pour certains malades, mais pas pour tous, explique le Dr Jane Muret. En plus c’est économique, car ce gaz coûte plus cher que les autres. »

Aussi, au CHU de Bordeaux par exemple, le choix a été fait de supprimer le protoxyde d’azote et les nouveaux blocs opératoires ont été construits sans canalisations pour ce gaz. « À Grenoble, nous nous servons toujours du desflurane, témoigne le Dr Claire Chapuis, pharmacienne au CHU de Grenoble. Mais nous essayons de réduire son utilisation au profit du sevoflurane. »

Les anesthésistes et réanimateurs réfléchissent enfin à une méthode de recyclage des gaz halogénés, pour, à la fois, réduire l’empreinte carbone et faire des économies. Une entreprise canadienne a créé un dispositif, le Deltasorb, qui n’est pas encore disponible en France, pour capturer les gaz dans la salle d’opération, les purifier et les réutiliser.
« Le bloc opératoire est le cœur de l’hôpital. Les personnes qui y travaillent sont quotidiennement au contact les unes des autres, à l’inverse de certains autres services des hôpitaux. Il est donc plus facile d’y installer des politiques de développement durable, argumente le Dr Jane Muret. Cependant, il faut des volontés politiques. »

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Conditions de travail lors d’exposition aux gaz anesthésiques
Guide pour prévenir les expositions professionnelles aux gaz et vapeurs anesthésiques
Gaz et vapeurs anesthésiques sont largement présents dans les locaux de soins. Produits chimiques volatils, ils sont utilisés pour leurs effets à concentration thérapeutique. Sans précautions particulières, il existe une imprégnation des salariés voire un risque d’effets sur la santé. Pour l’éviter, il y a lieu de veiller à la qualité de l’air et de maintenir les expositions aux niveaux les plus bas techniquement possibles.
Ce guide a pour objet de :
 faire connaître les niveaux d’expositions existants,
 aider à comprendre les effets sur la santé,
 présenter les repères réglementaires,
 se familiariser avec la démarche d’évaluation et de maîtrise du risque chimique,
 aider à déterminer un plan d’action.
§§§
Sur le site de la CRAMIF on y lit que le rapport est destiné aux :
établissements de soins : directeurs, médecins anesthésistes-réanimateurs, directeurs des soins infirmiers, pharmaciens, responsables techniques, médecins du travail, membres du CHSCT.
Vous me permettrez de rajouter les IADE qui jusqu’à preuve du contraire font aussi de l’anesthésie !! (AB)
La pollution des blocs opératoires
Le circuit filtre
Implication de l’IADE face à la pollution par les agents anesthésiques inhalatoires (Emmanuelle MOUSSY-Ecole IADE REIMS)
Faut-il supprimer le protoxyde d’azote au bloc opératoire ? (P. Richebé, R. Pfeiff, G. Simonnet, G. Janvier, CHU de Bordeaux)
la station d’anesthésie aspect technique (draeger)
Dr BOULLAND - HIA LEGOUEST Anesthésie du futur
Risques professionnels chez les médecins anesthésistes
Ces risques sont les mêmes pour les IADE, mais le Pr Bonnet semble ne pas connaitre cette catégorie professionnelle que l’on rencontre plus dans les blocs opératoires que dans les congrès... (AB)
Fiche technique Prise SEGA AIR MOTEUR
Exposition professionnelle des personnels hospitaliers au protoxyde d’azote
catalogue de matériel (Air liquide)
Article du gagnant du Prix de l’étudiant(e) en médecine 2012. (Medical Student Prize (Société canadienne des anesthésiologistes)
Anaesthetic gases, climate change, and sustainable practice
Thèse pour le diplôme d’Etat de docteur en médecine. Impact médicoéconomique du module et control d’asservissement de l’administration des halogénés du respirateur AISYS. Présentée le 8 février 2013 par Elsie DIEU

Exposition professionnelle au protoxyde d’azote et aux vapeurs anesthésiques. Conséquences pour la santé et l’environnement. Prévention

J.-C. Colavolpe, N. François

Les études animales et les enquêtes épidémiologiques réalisées durant la période 1970-1985 ont surestimé les effets des gaz anesthésiques présents à l’état de traces dans l’atmosphère de travail sur la santé des personnels :atteinte de la fonction de reproduction (avortements spontanés, baisse de la fertilité, malformations congénitales), survenue de certains cancers, hépatotoxicité, neurotoxicité, altérations de l’hématopoïèse et du système immunitaire.

Le caractère contradictoire des études, la faiblesse méthodologique des premières enquêtes et surtout la réduction du niveau d’exposition dans les blocs opératoires modernes ont conduit les experts à relativiser les risques pour la santé. Dans le cadre de la protection des travailleurs, les autorités sanitaires européennes ont fixé des seuils d’exposition à ne pas dépasser. En France, durant l’entretien de l’anesthésie, une circulaire ministérielle de 1985 recommande le seuil de 25 ppm pour le protoxyde d’azote et de 2 ppm pour les halogénés. Le respect de ces valeurs nécessite de travailler dans des locaux dont le renouvellement de l’air est de l’ordre de 15-20 volumes h–1, de disposer de systèmes d’évacuation des gaz, d’utiliser un bas débit de gaz frais et de respecter des règles de bonne pratique. La mesure d’un gaz à l’état de traces dans l’atmosphère peut s’effectuer sur site par spectrophotométrie infrarouge ; en laboratoire par l’analyse de prélèvements ; par l’utilisation d’un badge dosimètre passif individuel. Les gaz anesthésiques rejetés dans l’atmosphère terrestre contribuent peu à la réduction de la couche d’ozone et à l’effet de serre.

Introduction

L’utilisation médicale du protoxyde d’azote (N2O) et des halogénés a pour conséquence la contamination de l’air des blocs opératoires, des salles de surveillance postinterventionnelle (SSPI) et des sites où se pratique l’analgésie par inhalation d’un mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote (MEOPA).

Depuis le début des années 1970, de nombreuses études ont tenté d’évaluer les effets de l’exposition chronique aux gaz anesthésiques sur la santé des personnels soignants et son influence sur l’environnement.Dès 1977 aux États-Unis et plus tardivement en France, les autorités ont mené une politique de prévention en fixant des valeurs d’exposition à ne pas dépasser et en recommandant des mesures de réduction de la pollution par les gaz et vapeurs anesthésiques, et de surveillance du personnel exposé.

La concentration d’un gaz présent à l’état de traces dans l’air ambiant s’exprime en parties par million (ppm) ou volume du gaz considéré par volume d’air [vol/vol]. Pour mémoire : 1 ppm = 0,0001 %.

Conséquences pour la santé

Les effets sur la santé de l’exposition à de faibles concentrations de gaz anesthésiques sont évalués à partir de travaux menés chez l’animal, d’enquêtes épidémiologiques et d’études chez des volontaires sains.

Chez l’animal, les chercheurs ont essentiellement étudié les effets de l’halothane et du protoxyde d’azote, seuls ou en combinaison.Les animaux, généralement des souris ou des rats, sont soumis à des concentrations parfois très faibles, voisines de celles mesurées dans les salles d’opération, ou au contraire subanesthésiques sans rapport avec les niveaux d’exposition professionnelle.

Les durées d’exposition sont également variables, idéalement proches de celles du personnel, soit 4 à 8 heures par jour, 5 jours sur 7, pendant plusieurs semaines. En 1967, Vaisman est le premier à s’intéresser aux conditions de travail des personnels de santé et à noter chez un collectif de 110 anesthésistes russes la fréquence de manifestations non spécifiques (vertiges, céphalées...) mais également l’incidence des avortements spontanés et des malformations congénitales chez leurs enfants. Aux États-Unis, au début des années 1970, le National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH) en collaboration avec l’American Society of Anesthesiologists (ASA), réalise une vaste enquête nationale auprès de 73 000 « sujets exposés » aux gaz et vapeurs anesthésiques dont les résultats sont publiés en 1974 [1].

Plus tardivement en France, de 1987 à 1989, Saurel-Cubizolles et al.
conduisent une étude sur l’incidence des avortements spontanés et des manifestations neuropsychologiques parmi le personnel féminin des blocs opératoires de 17 hôpitaux parisiens [2, 3]. La plupart des enquêtes réalisées aux États-Unis et en Europe sont rétrospectives et utilisent, pour le recueil des données, des questionnaires postaux éventuellement complétés par des entretiens. Les groupes témoins sont issus de la population générale ou composés de professionnels de la santé non exposés aux gaz anesthésiques. La faiblesse méthodologique de certains travaux et le caractère contradictoire des résultats ont conduit plusieurs groupes d’experts, le plus souvent mandatés par des organismes institutionnels, à réaliser des analyses critiques de la littérature [4-12].

Effets sur la reproduction

 Études animales

À de très faibles concentrations, l’halothane n’a pas d’effet significatif sur la fertilité, le taux des avortements et la fréquence des anomalies congénitales [7]. Seules des concentrations subanesthésiques semblent avoir un impact sur la fertilité et sur le poids à la naissance [13]. Après une exposition in utero, des modifications morphologiques du foie, des reins et du cerveau sont rapportées mais leur caractère pathologique est discuté [7, 14]. Un effet de l’halothane sur le développement neurologique de l’embryon est probable. L’exposition à de faibles concentrations (10-100 ppm), in utero mais aussi au cours des 60 jours qui suivent la naissance, perturbe la synaptogenèse, ce qui conduit à une réduction de la densité synaptique responsable de troubles durables du comportement et de l’apprentissage [15].

Aux faibles concentrations, l’enflurane (0,01 %) et l’isoflurane (0,1 %) n’ont pas d’effet sur la fonction de reproduction ni d’effet mutagène [16-18].

Les conséquences de l’exposition prolongée au N2O sur la fonction de reproduction sont diversement appréciées. Pour Vieira et al., aux concentrations inférieures à 500 ppm, ce gaz n’a pas d’effet chez la femelle ; une baisse de la fertilité et une réduction du poids ainsi que de la taille des embryons ne surviennent qu’aux doses subanesthésiques [19]. Pour le même auteur, l’exposition de souris mâles au protoxyde d’azote à la concentration de 0,5 % (5 000 ppm) pendant les 30 jours précédant l’accouplement entraîne une hypofertilité et une réduction de la portée [20]. Après exposition de rats des deux sexes à des concentrations croissantes de N2O (0,1 % ; 0,5 % ; 1,0 %), Holson et al. ne notent ni de réduction de la fertilité chez les femelles et les mâles exposés, ni de troubles du comportement ou d’altération des fonctions d’acquisition chez leur progéniture [21].

Les résultats de ces études, obtenus lors de conditions d’expériences variables en termes de niveaux et de durées d’exposition, doivent être considérés avec réserve et leur extrapolation éventuelle à l’homme s’avère délicate.

Parmi les halogénés, seul l’halothane paraît induire des troubles du développement foetal pour de faibles concentrations [15]. Pour le N2O, le seuil de 500 ppm identifié comme pouvant affecter la fertilité chez l’animal est à prendre en considération, des niveaux d’exposition dépassant cette valeur sont mesurés, en particulier dans les cabinets de dentistes utilisant le MEOPA.

Études épidémiologiques

Au cours de la période 1970-1985, plusieurs enquêtes épidémiologiques menées aux États-Unis et en Europe ont tout particulièrement étudié l’incidence des avortements spontanés et des malformations congénitales chez le personnel féminin travaillant au bloc opératoire, dans les cabinets de dentistes ou de vétérinaires. Certains auteurs ont inclus comme variables la mortinatalité, le faible poids de naissance, la prématurité ou le sex-ratio.

En 1977, Spence et al. publient une analyse des trois principales enquêtes conduites aux États-Unis et en Grande-Bretagne dans les années 1970 auprès du personnel médical exerçant au bloc opératoire [4].

Pour ces auteurs, il existe un risque majoré d’avortements spontanés chez les femmes exposées et une fréquence anormalement élevée de malformations congénitales chez les enfants des personnels des deux sexes. L’incidence des avortements spontanés chez les épouses des anesthésistes n’est pas significativement augmentée.

À la demande de l’ASA, Buring et al. réalisent une revue exhaustive de la littérature des années 1970 et concluent à un risque accru d’avortement spontané chez le personnel féminin avec cependant un risque relatif (RR) faible (RR 1,3 ; IC 95 % : 1,2-1,4) pouvant être attribué à des biais [5]. En revanche, l’augmentation des malformations congénitales n’est pas formellement établie (RR 1,4 ; IC à 95 % : 1,0-2,0) [5]. À la même époque, Tannenbaum et al. tirent de leur analyse des mêmes travaux des conclusions plus nuancées [6]. Pour ces auteurs, le caractère rétrospectif des enquêtes, le manque de rigueur dans la méthodologie, l’absence de mesure exacte des niveaux d’exposition, le faible taux de réponses aux questionnaires, ne permettent pas de conclure [6]. Les travaux des épidémiologistes scandinaves illustrent l’impact de certains biais sur les résultats de ces études cas-témoin [22]. La consultation systématique des registres nationaux de déclarations des naissances et des avortements leur a notamment permis de mettre en évidence une sous-déclaration involontaire par la population-témoin des avortements spontanés et des malformations congénitales [22].

Peu de publications concernent spécifiquement les effets des gaz anesthésiques sur la fertilité. Au début des années 1970, Knill-Jones et al. rapportent une incidence élevée d’infertilité chez les femmes anesthésistes (12 % versus 6 % chez les témoins) qu’ils ne retrouvent pas chez les épouses des anesthésistes mâles [23, 24]. En 1987, Rowland et al. réalisent une vaste enquête rétrospective auprès de 7 000 assistantes de dentistes en âge de procréer (18-39 ans) exposées au protoxyde d’azote [25, 26]. Après ajustement selon l’âge, les antécédents gynécologiques et la consommation de tabac, une baisse de la fertilité, évaluée par le nombre de cycles sans contraception nécessaire à l’obtention d’une grossesse, est observée chez les jeunes femmes lorsqu’elles sont exposées plus de 5 heures par semaine à des concentrations de protoxyde d’azote estimées élevées du fait de l’absence de dispositif d’extraction des gaz [25]. Les auteurs notent également une majoration du risque d’avortement spontané quand les assistantes travaillent plus de 3 heures par semaine en atmosphère polluée [26].Ces troubles de la fonction de reproduction ne s’observent pas lorsque les locaux sont munis d’extracteurs des gaz [25, 26].

De 1977 à 1984, une étude prospective, la seule réalisée à ce jour, est menée en Grande-Bretagne auprès du personnel médical féminin âgé de moins de 40 ans. La fertilité et le taux d’avortements spontanés chez les anesthésistes s’avèrent comparables à ceux de leurs consoeurs sans augmentation du risque de malformations congénitales, excepté pour les anomalies cardiaques [27].

En 1996, le Conseil d’évaluation des technologies de la santé du Québec publie un rapport très détaillé sur les risques de l’exposition professionnelle aux gaz anesthésiques pour la femme enceinte et le foetus [7, 8]. Après analyse de 19 études épidémiologiques, les experts canadiens concluent à l’existence d’un RR global de 1,51 (IC à 95 % : 1,42-1,61) correspondant à une augmentation de 51 % du risque d’avortement chez les femmes exposées aux gaz anesthésiques. En termes absolus, pour un risque de base de 15 % chez les femmes non exposées, le risque est de 22,5 % (+7,5 %) chez le personnel féminin exposé. En se limitant aux études les plus rigoureuses, le RR atteint 1,86 (IC 95 % : 1,69-2,04).

Les auteurs du rapport soulignent la difficulté dans l’évaluation épidémiologique du risque de malformations congénitales secondaires à l’exposition professionnelle aux gaz anesthésiques compte tenu de leur faible prévalence, de leur hétérogénicité, des biais de déclaration, et concluent à l’absence de relation cohérente [7].

En France, le groupe pluridisciplinaire « Anesthésie et qualité de l’air » a rédigé un guide pour la prévention des expositions professionnelles aux gaz et vapeurs anesthésiques édité en 1996 par la Caisse régionale d’assurance maladie d’Île-de-France CRAMIF) [9]. Les experts français, après avoir rappelé les difficultés à établir un éventuel lien de causalité entre expositions professionnelles et troubles de la reproduction, concluent à un effet nocif probable des gaz anesthésiques incitant à maîtriser les niveaux d’exposition.

Parallèlement à la démarche institutionnelle canadienne et française, la « Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents » publie en 1998 un guide sur les conditions de travail lors de l’exposition aux gaz anesthésiques [10]. Pour les experts suisses, « les études les plus récentes conduites sur des collectifs exposés à des niveaux modérés de gaz anesthésiques indiquent que les risques pour la grossesse et les troubles de la fertilité sont nettement moins probables que ne le laissent supposer les études des années septantes ».

Aux Pays-Bas, à la demande du ministère des Affaires Sociales, le Conseil de la Santé a été chargé, en application de la

Directive Européenne 93/21/EEC, de classer les substances selon leurs effets sur la reproduction. Il convient de souligner qu’en l’absence de données épidémiologiques fiables, les experts hollandais ont pris en compte les études animales pour établir leurs recommandations. Pour les effets sur la fertilité, ils recommandent de classer le protoxyde d’azote en catégorie 3 (substances préoccupantes pour la fertilité dans l’espèce humaine) avec l’apposition sur l’étiquetage de la mention R62 (risque possible d’altération de la fertilité). Pour les effets sur le développement foetal, ils recommandent son classement dans la catégorie 3 (substances préoccupantes pour l’homme eu égard à des effets toxiques possibles sur le développement) avec la mention R63 (risque possible pendant la grossesse d’effets néfastes pour l’enfant). Pour l’halothane, seuls les effets potentiels sur la maturation foetale sont retenus et le font classer dans la catégorie 3 des substances toxiques pour le développement.

Une démarche voisine de celle des Pays-Bas a été menée en Allemagne et en Suisse [10]. L’halothane est classé dans le groupe B des substances pour lesquelles on ne peut exclure un risque d’atteinte foetale même lorsque le seuil d’exposition a été respecté ; l’enflurane dans le groupe C dans lequel, si le seuil est respecté, il n’y a pas à craindre de lésions du foetus, et le N2O dans le groupe D des substances pour lesquelles, en l’absence de données fiables, une prise de position définitive est impossible.Bien que l’halothane puisse être présent à l’état de traces dans le lait maternel, l’allaitement est considéré comme dépourvu de risque pour le nourrisson par l’American Academy of Pediatrics compte tenu de sa faible absorption digestive [28]. Aucune donnée épidémiologique ou animale n’est en faveur d’un effet de l’isoflurane sur la fonction de reproduction.

En conclusion, les effets sur la fonction de reproduction des halogénés récents, isoflurane, sévoflurane, desflurane, sont improbables voire inexistants [29]. Sans que l’on puisse formellement établir un lien de causalité compte tenu des facteurs confondants que sont le tabac, l’âge, les conditions de travail, l’exposition aux radiations ionisantes, il est possible qu’une exposition chronique à des concentrations élevées d’halothane et/ou de protoxyde d’azote soit responsable d’une hypofertilité et d’une majoration du risque d’avortement spontané chez le personnel féminin. En revanche, la fréquence des malformations congénitales n’est pas majorée et l’augmentation du risque d’avortement spontané chez les épouses des anesthésistes n’est pas établie [7, 9, 10].

Effets neurologiques

Effets centraux

Psychomoteurs

Dans les années 1970, Bruce et al. observent une diminution significative des capacités de mémorisation, d’attention, de perception audiovisuelle et d’exécution motrice chez des volontaires sains exposés à des concentrations très faibles de N2O (50 ppm) et d’halothane (1 ppm) [30].

Aucune altération des performances aux tests n’est notée lorsque ces mêmes sujets inhalent un mélange de protoxyde d’azote (25 ppm) et d’halothane (0,5 ppm).Ces valeurs, au-delà desquelles l’altération des performances psychomotrices du personnel soignant sont de nature à porter atteinte à la sécurité des patients, ont été prises en compte pour fixer les premiers seuils d’exposition professionnelle aux États-Unis [31]. La plupart des travaux ultérieurs n’ont pas confirmé les résultats de cette étude dont la validité a été mise en doute par l’auteur lui-même [32]. Smith et al. ne notent aucune altération des performances aux tests audiovisuels et de mémorisation pour des concentrations nettement plus élevées d’halothane (100-150 ppm) et lors de l’exposition à un mélange de N2O (485-700 ppm) et d’halothane (10-16 ppm) [33]. Dans l’étude de Fagan et al., les tests psychomoteurs pratiqués chez des volontaires soumis à des concentrations croissantes de N2O (5 %, 10 %, 20 % et 40 %) ne sont altérés qu’à partir d’un taux d’exposition de 10 % [34].Une altération de la vigilance ne s’observe sous enflurane qu’à la concentration subanesthésique de 0,25 % [35]. Cependant, chez le personnel des blocs opératoires exposé à des concentrations relativement faibles de N2O et d’enflurane évaluées à partir de dosages urinaires, Lucchini et al. notent des altérations au test de temps de réaction simple (SRT) [36].

Le même auteur, en utilisant notamment le questionnaire EURO-QUEST, conçu pour les salariés exposés à des produits chimiques ayant des effets neurotoxiques, ne relève aucune dégradation des scores de réponses aux tests lorsque les niveaux d’exposition ne dépassent pas 25 ppm pour le N2O et 0,5 ppm pour l’isoflurane [37].Dans des conditions habituelles d’exposition, il paraît peu probable que ces effets centraux du N2O qui résultent de son action inhibitrice du récepteur N-méthyl-D-aspartate (NMDA) glutamatergique aient une influence significative sur les capacités de jugement du personnel soignant et donc sur la sécurité du patient. Il existerait même chez le personnel des blocs opératoires un phénomène de tolérance aux gaz anesthésiques semblable à celui observé avec l’alcool. Après exposition, des élèves infirmières travaillant en unités de soins obtiennent de moins bons résultats aux tests psychomoteurs que leurs consoeurs des blocs opératoires [38].

Manifestations neuropsychologiques

Le personnel des blocs opératoires se plaint fréquemment de ,nausées, de troubles de l’humeur, d’irritabilité, de fatigue, de céphalées. Ces symptômes non spécifiques sont identiques à ceux du Syndrome des bâtiments malsains ou sick building syndrome (SBS) des Anglo-Saxons. Certains auteurs les attribuent à l’exposition chronique aux gaz anesthésiques, d’autres les imputent aux conditions psychologiques de travail. Le syndrome neuropsychologique décrit en France par Saurel- Cubizolles, association d’au moins deux des trois symptômes suivants (céphalées, vertiges, ralentissement des réactions), s’observerait chez 22 % des personnels de bloc lorsque le taux de renouvellement de l’air est inférieur à 10 vol h–1 [3]. La surmortalité par suicide observée chez les anesthésistes mâles anglais par rapport aux hommes de condition sociale similaire est en fait identique à celle d’autres médecins [39].

Effets neurologiques périphériques

Des dysesthésies à type de fourmillements sont fréquemment rapportées par le personnel des blocs de chirurgie pédiatrique et des cabinets de dentistes soumis à des niveaux élevés d’exposition au N2O [3, 40].

Les atteintes neurologiques sévères à type de myélopathie sont exceptionnelles et résultent d’expositions répétées à des concentrations élevées de protoxyde d’azote. Elles s’observent généralement dans le cadre d’une toxicomanie et sont plus rarement la conséquence exclusive d’une exposition professionnelle [41]. Le tableau clinique est celui d’une sclérose combinée de la moelle par carence en vitamine B12, associant une dégénérescence des cordons postérieurs et latéraux. Les signes prédominants sont les paresthésies et l’ataxie. Les manifestations neurologiques peuvent précéder l’atteinte hématologique et la récupération tardive s’accompagne parfois de séquelles. À l’imagerie par résonance magnétique (IRM), l’atteinte médullaire se traduit par un hypersignal de siège cervical évocateur sur les séquences pondérées en T2 [41].

Une enquête récente, menée auprès des infirmières anesthésistes suédoises, fait état d’une incidence accrue de scléroses en plaques [42].

Cette étude comporte plusieurs biais, le niveau d’exposition n’est pas évalué, l’enquête par questionnaire est rétrospective et divers facteurs confondants (consommation de tabac, exposition aux radiations ionisantes...) ne sont pas pris en compte.

Mécanisme de la toxicité du protoxyde d’azote

La toxicité neurologique, mais également les effets sur la reproduction et les effets hématologiques du N2O résultent de son interaction avec la vitamine B12 (cobalamine) [43]. La forme réduite de la vitamine B12 est la coenzyme d’une enzyme cytosolique, la méthionine synthétase, qui catalyse la déméthylation du 5-méthyltétrahydrofolate en tétrahydrofolate (THF) et la reméthylation de l’homocystéine en méthionine. La S-adénosylméthionine, forme activée de la méthionine, est le principal donneur de groupements méthyles nécessaires à la synthèse de la myéline, des neurotransmetteurs et de l’acide désoxyribonucléique (ADN) des tissus à renouvellement rapide tel le tissu hématopoïétique (Fig. 1).

Le N2O qui ne subit aucune biotransformation dans l’organisme se comporte comme un agent oxydant qui inactive la vitamine B12 par oxydation irréversible de son atome de cobalt.

La toxicité du N2O est concentration- et temps-dépendante.

En pratique clinique, son administration aux concentrations anesthésiques s’accompagne d’une réduction précoce de l’activité de la méthionine synthétase corrélée au niveau et à la durée de l’exposition qui persiste 3-4 jours. Chez le rat, cet effet n’est significatif que pour des concentrations de N2O inhalées excédant 1 000 ppm [44]. Chez des anesthésistes exposés à des concentrations de 150 à 400 ppm, aucune réduction de l’activité de la méthionine synthétase n’est décelable [45]. Ceci rend improbable une toxicité neurologique du protoxyde d’azote dans le cadre d’une exposition professionnelle. Il convient de noter que chez le rat, la foetotoxicité du N2O ne s’exprime que pour un niveau d’exposition dépassant 500-1 000 ppm ce qui correspond au seuil d’inactivation de la méthionine synthétase [19].

Toxicité hépatique

La toxicité hépatique des agents anesthésiques par inhalation concerne exclusivement les halogénés [46]. Chez l’homme, la toxicité de l’halothane relève de deux mécanismes. Le premier, spécifique de la voie réductrice du métabolisme de l’halothane, est généralement infraclinique et se traduit par une discrèteélévation des enzymes hépatiques. Le second, rare (1/20 000 à 1/35 000), est responsable d’une hépatite aiguë grave. Parmi les facteurs de risque identifiés, on relève l’obésité, le sexe féminin, l’âge intermédiaire (l’atteinte hépatique est exceptionnelle chez l’enfant) et surtout la répétition des expositions sur une période courte. Son mécanisme est immunoallergique comme en témoigne la présence dans le sérum des sujets d’immunoglobulines (Ig) G dirigées contre des protéines microsomiales hépatiques modifiées [46].

Le métabolisme hépatique de l’halothane par le cytochrome P450 2EI conduit à la formation d’un métabolite intermédiaire, l’acide trifluoroacétique (TFA). Le TFA se comporte comme un haptène monovalent qui se fixe de manière covalente sur les protéines du réticulum des hépatocytes.

Ces molécules hybrides ou adduits peuvent constituer des néoantigènes et induire une réaction auto-immune avec synthèse d’anticorps antihépatocytes. Le risque d’hépatite est corrélé à la quantité de néoantigènes formés qui est elle-même proportionnelle au degré de métabolisation hépatique de l’halogéné : halothane (20 %), enflurane (3-5 %), isoflurane (0,2-0,5 %), desflurane (0,05 %). Ceci explique la faible toxicité hépatique de l’enflurane, de l’isoflurane et tout particulièrement du desflurane [47]. Les rares cas d’hépatites impliquant l’enflurane ou l’isoflurane concernent le plus souvent des sujets préalablement anesthésiés avec de l’halothane, ce qui est en faveur d’une sensibilisation croisée entre halogénés [48, 49]. De 1981 à 1984, 16 cas d’hépatites à l’isoflurane ont été déclarés à la Food and Drug Administration (FDA) sur environ 14 millions de patients anesthésiés avec cet halogéné. Un seul cas d’hépatite auto-immune au desflurane a été publié [50].

À la différence des autres halogénés, le sévoflurane n’a pas pour métabolite le TFA mais l’hexafluoro-isopropanol (HFIP).Le HFIP est rapidement éliminé dans les urines après glycuroconjugaison et n’est pas immunogène, ce qui écarte le risque d’hépatite auto-immune.

Pour autant, une toxicité hépatique du sévoflurane ne peut être exclue ; d’exceptionnels cas d’hépatites postopératoires sont rapportés [51].

Plusieurs cas d’hépatites auto-immunes induites par l’halothane et confirmées par la présence d’anticorps sont rapportés après exposition chronique à cet halogéné [52]. En France, l’hépatite à l’halothane est reconnue comme une maladie professionnelle (tableau n° 89) par décret du 13 septembre 1989. Elle se définit comme une hépatite ayant récidivé après nouvelle exposition et confirmée par des tests biochimiques, après exclusion d’une autre étiologie. Son délai de prise en charge est de 15 jours. Dans son rapport au Bureau international du travail, l’inspection du Travail en France en mentionne sept cas pour la période 1990-2000.

Il est actuellement établi qu’une exposition professionnelle aux halogénés les plus récents ne comporte aucun risque hépatique [46].

Effets mutagènes et cancérigènes

L’article R. 231-51 du Code du travail définit un agent mutagène comme une substance ou préparation qui, par inhalation, ingestion ou pénétration cutanée, peut produire des défauts génétiques héréditaires ou en augmenter la fréquence.

Pour une substance donnée, il existe une relation entre son potentiel cancérigène et l’activité mutagène ou génotoxique établie à partir de tests in vitro et d’études chez l’animal.

Tests in vitro

Différents tests in vitro sont utilisés pour leur capacité à détecter des lésions du patrimoine génétique lors d’une exposition à des agents toxiques. Le test d’Ames, qui recourt à une salmonelle typhique déficiente en une enzyme nécessaire à la synthèse de l’histidine pour mettre en évidence un éventuel effet mutagène, est le plus utilisé. En cas de mutation, les bactéries mutées récupèrent cette possibilité de synthèse. La plupart des études utilisant ce test, notamment celles de Baden et al., n’ont pas permis de mettre en évidence d’effet mutagène des halogénés [18, 53].

Dans le cadre de la « biosurveillance » du personnel, les lymphocytes provenant du sang veineux de sujets exposés peuvent être mis en culture et leur division cellulaire stimulée afin d’en pratiquer l’analyse chromosomique. L’accroissement de la fréquence des aberrations chromosomiques, des échanges entre chromatides soeurs et du nombre de micronoyaux témoigne des dommages occasionnés à l’ADN par l’agent toxique. Les résultats des études réalisées chez les personnels exposés ne sont pas concordants, d’autant que les niveaux d’exposition ne sont pas toujours précisés [12]. L’augmentation des échanges de chromatides soeurs dans les lymphocytes du personnel exposé au protoxyde d’azote, à l’halothane et, à un degré moindre, aux halogénés les plus récents, n’est pas observée par l’ensemble des auteurs [54, 55]. Les effets génotoxiques secondaires à l’exposition chronique au N2O et à l’isoflurane seraient comparables à ceux résultant de la consommation de 11 à 20 cigarettes par jour [54].

Pour Wiesner et al., l’exposition à des concentrations élevées de N2O (170 ppm) et d’halogéné (4 ppm) augmente la formation de micronoyaux dans les lymphocytes [56]. Cet effet n’est pas observé lorsque le niveau d’exposition est faible (N2O : 12 ppm ; halogéné : 0,5 ppm).

Études animales

L’exposition prolongée de rats à de faibles concentrations d’halothane et de protoxyde d’azote (1 ppm et 50 ppm ou 10 ppm et 500 ppm) est responsable d’altérations chromosomiques intéressant les cellules médullaires et les spermatozoïdes, mais ne s’accompagne pas d’une augmentation des néoplasies [57]. Plus généralement, les données issues des études animales ne sont pas en faveur d’effets cancérigènes du protoxyde d’azote, de l’halothane et de l’isoflurane [18, 53]. Les effets cancérigènes du sévoflurane et du desflurane n’ont pas été testés chez l’animal.

Aux États-Unis, la FDA, organisme qui régule la mise sur le marché des médicaments, a considéré qu’en l’absence d’effet cancérigène démontré pour l’halothane, l’enflurane et l’isoflurane, il existait une sécurité de groupe applicable aux halogénés les plus récents.

Études épidémiologiques

Les premières enquêtes épidémiologiques rapportaient une incidence accrue de cancers, de leucémies et de lymphomes [1, 40]. Ces études, dont la méthodologie est critiquable, ne prennent pas toujours en compte les autres facteurs de risque que sont les expositions aux radiations ionisantes ou aux désinfectants, et elles surestiment vraisemblablement le potentiel cancérigène.

Les travaux les plus récents ne montrent aucune incidence particulière de cancers ou d’affections chroniques parmi le personnel exposé [58]. Aucune surmortalité par cancer n’est en particulier notée chez les 3 769 anesthésistes anglais mâles suivis de 1957 à 1983 [59].

Le risque de cancer secondaire à l’exposition aux gaz anesthésiques apparaît comme peu probable [8-10]. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) classe les agents chimiques, physiques et biologiques ainsi que les modes d’exposition à ces agents en quatre catégories : cancérogènes pour l’homme (groupe 1) ; probablement cancérogènes pour l’homme (groupe 2A) ; peut-être cancérogènes pour l’homme (groupe 2B) ; inclassables quant à leur cancérogénicité (groupe 3) et non cancérogènes pour l’homme (groupe 4). L’absence d’activité cancérogène observée chez l’animal, ainsi que l’absence de données épidémiologiques valides en faveur d’une augmentation du nombre de certains cancers ont conduit le CIRC en 1987 à classer l’halothane, l’enflurane et l’isoflurane dans le groupe 3. Aux États-Unis, l’American Conference of Governmental Industrial Hygienists (ACGIH) a conclu à l’absence d’effet cancérogène du N2O et de l’halothane en les classant dans le groupe A4 (substance not classifiable as a human carcinogen).

Système immunitaire

Les données expérimentales et cliniques établissant un lien de causalité entre l’exposition chronique aux gaz anesthésiques et le dérèglement du système immunitaire sont contradictoires [60, 61].

Les effets sur l’immunité paraissent dépendre de l’agent utilisé, du degré d’exposition, mais également de l’âge des sujets exposés. Pour Peric et al., l’exposition à des concentrations élevées d’halothane et de protoxyde d’azote a pour conséquence des modifications de la formule sanguine avec une disparition des basophiles, une diminution durable des lymphocytes B et des cellules tueuses naturelles (NK) associée à une augmentation relative des lymphocytes CD2 et CD4 [60]. En revanche, pour Bargellini et al., l’exposition chronique à de faibles concentrations de N2O et d’isoflurane détermine une diminution des lymphocytes T (CD3) et une majoration des cellules tueuses NK (CD16+ CD3– ) [61]. Une inhibition de l’apoptose neutrophile a également été mise en évidence chez des sujets exposés à de faibles concentrations de N2O, de sévoflurane et d’isoflurane [62]. Ces anomalies du système immunitaire, qui ne sont pas observées par tous les auteurs, sont a priori sans conséquence clinique notable.

Toxicité hématologique

La toxicité hématologique du protoxyde d’azote est connue depuis les années 1950 au cours desquelles plusieurs patients atteints de tétanos recevant une sédation comportant du N2O ont développé une aplasie médullaire. Lorsqu’on administre du N2O à la concentration de 70 %, des anomalies des lignées sanguines, mégaloblastose et hypersegmentation des neutrophiles, apparaissent dès la 24e heure [63]. Chez des dentistes soumis à des niveaux d’exposition dépassant 4 000 ppm, on peut observer des anomalies de la lignée granulocytaire avec un test de suppression à la désoxyuridine positif mais sans modification des taux sanguins de vitamine B12 et de folates [64]. Des niveaux d’exposition plus faibles sont sans conséquences ; même en l’absence de dispositif d’évacuation des gaz, Salo et al. ne relèvent aucune diminution de la concentration plasmatique en vitamine B12 et en folates, ni aucune anomalie des lignées sanguines chez des anesthésistes et des infirmières de bloc opératoire [65]. On peut en conclure que, dans le cadre d’une exposition professionnelle à de faibles concentrations de protoxyde d’azote, la survenue d’effets hématologiques est improbable. Les halogénés sont dépourvus de toxicité sanguine.

Toxicité rénale

Aucune toxicité rénale n’est imputable au protoxyde d’azote et aux halogénés récents dans le cadre d’une exposition professionnelle.

Toxicité pulmonaire

Un seul cas d’asthme grave survenu chez un anesthésiste, confirmé par un test de provocation positif à l’enflurane, a été publié [66].

Allergie cutanée

Des cas de dermite allergique de contact aux vapeurs d’halothane et d’isoflurane ont été rapportés [67].

source TAYSIR ASSISTANCE

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Prise SEGA centralisée
Système d’évacuation des gaz anesthésiques

La prise SEGA est un système qui permet d’évacuer les gaz anesthésiques afin d’éviter une pollution de l’air des blocs opératoires par les gaz halogénés ou protoxyde d’azote, utilisés lors de l’anesthésie.

Régit par les normes EN 737.2 pour la
prise et EN 737.4 pour l’embout, son usage protège le personnel
soignant par aspiration des surplus de gaz d’anesthésie, de vapeurs
(protoxyde d’azote et halogènes) durant une anesthésie et de
fumées pour certaines opérations de cicatrisation. La prise, alimentée en air comprimé 5 bars, créée une aspiration par un éjecteur réglé entre 45 et 60 litres / mn. Un interrupteur pneumatique actionné par le verrouillage de l’embout ouvre le circuit et le voyant passe au vert pour attester le bon fonctionnement du système. La prise dispose d’une bague de verrouillage de l’embout.

Le problème du SEGA est qu’il déplace la pollution vers l’extérieur mais ne la supprime pas. L’anesthésie inhalatoire serait responsable d’environ 5 à 10 % de la pollution globale et ses effets sur la couche d’ozone ne sont pas négligeable.

Le Desflurane est par exemple entre 6 à 27 (!) fois plus polluant que le sévoflurane selon les auteurs.

Afin de limiter les retombées, il convient dès l’intubation de mettre le patient en circuit fermé d’emblée. Il n’y a AUCUN risque pour qu’il se réveille dans les minutes qui suivent. Le morphinique, le curare et l’hypnotique se chargent de faire dormir votre patient.

Il y en va de votre santé de laisser les concentrations halogénés monter en circuit ouvert. Sans compter les éventuelles implications de cette concentration rapide sur les résistances systémiques du patient.


EFFETS DES AGENTS HALOGÉNÉS SUR L’ENVIRONNEMENT

La question est de savoir si les agents anesthésiques halogénés ont un effet significatif sur le réchauffement global. D’un point de vue politique, les Grenelles de l’environnement n’ont pas abordé ce sujet. Lorsque que l’on fait une recherche « pubmed », des milliers d’articles scientifiques ont été publiés dans le domaine industriel et agricole et presque rien concernant l’anesthésie. Cette constatation peut trouver deux explications principales : soit la relation entre effet de serre et agents anesthésiques est inexistante, soit cette relation n’a été que peu investiguée. L’analyse de la littérature médicale et en particulier anesthésique retrouve quand même quelques données, pas toujours récentes, permettant de se faire une opinion ou au moins d’ouvrir le débat.

La destruction des couches les plus basses de l’atmosphère (troposphère et stratosphère) est liée à la production de composés chlorofluorocarbonés (CFC) et de composés halogénés. La quantité de CFC libérée dans l’atmosphère, en lien avec une activité médicale, atteint 10 à 12 x 103 tonnes par an soit 1 % de la quantité totale de CFC libérée avant les accords de Montréal [14] qui ont tenté de réduire leurs utilisations. On estime que la quantité d’agents halogénés libérés dans l’atmosphère chaque année est de l’ordre de 104 tonnes, mais n’a pas fait l’objet de mesure de restriction. Les effets de ces composés peuvent se séparer en deux catégories : d’une part la destruction de la couche d’ozone dont l’importance est proportionnelle à la durée de vie de ces agents dans la stratosphère et d’autre part l’effet sur le réchauffement global dépendant de la durée de vie de ces agents dans la troposphère (tableau 3) [15].

Ces résultats confirment ceux retrouvés 10 ans plus tôt avec une méthodologie différente [16]. Il ressort de ces résultats que les agents halogénés sont globalement moins délétères que les CFC et leur contribution relative ne représente que 0,03 % du réchauffement climatique. Cependant, même si cette participation reste modeste, elle pourrait s’accroître dans les années futures du simple fait de l’application des accords de Montréal sur la restriction de l’utilisation des CFC. Il faut également noter que le sévoflurane serait le moins toxique de tous ces agents [17]. Les agents halogénés sont finalement peu contributifs au réchauffement global [18] et ce n’est pas sur cet argumentaire écologique que l’on va les remplacer par une anesthésie intraveineuse exclusive. [...]

Les Halogénés
B. Debaene SFAR 2011


Les gaz anesthésiques nocifs pour l’environnement

En collaboration avec la Nasa, des chimistes de l’Université de Copenhague et des anesthésistes de l’Université du Michigan Medical School ont mené des recherches sur les gaz anesthésiques utilisés par les chirurgiens comme par les dentistes. Les travaux démontrent que ces gaz ont un impact très nocif sur l’environnement.

D’après cette étude, relayée par Enerzine, un kilo de gaz anesthésique aurait sur l’environnement autant d’impact que 1.620 kilos de CO2. Si la quantité de gaz utilisée pour une intervention chirurgicale est relativement faible, aux Etats-Unis, l’accumulation des opérations anesthésiques serait aussi nocive que les émissions de gaz à effet de serre rejetées par un million de voitures.

Toutefois, comme l’explique Ole John Nielsen, professeur de chimie à l’Université de Copenhague, trois différents gaz utilisés lors des anesthésies ont été étudiés, révélant un niveau de nocivité plus ou moins élevé à dose équivalente. "Tous les trois sont bien pires que le CO2, mais les moins émetteurs sont l’isoflurane et le sévoflurane qui ont des potentiels de réchauffement respectifs de 210 et de 510, le plus dangereux étant le desflurane avec un facteur 1620", précise le chercheur.

Ole John Nielsen estime que cet impact doit être pris en compte par les médecins pratiquant des anesthésies, afin que le moins polluant des gaz soit préféré aux autres. "Si les trois composés ont la même valeur thérapeutique, il y a tout lieu de choisir celui qui possède le plus faible potentiel en réchauffement global", souligne-t-il.

Publié par Emmanuel Perrin, le 11 décembre 2010

Source : maxisciences.com

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 Un dossier sur l’air par l’ARS de basse Normandie

Traitement de l’air

 Le Centre de Référence sur les Agents Tératogènes (CRAT)

Service d’information sur les risques des médicaments, vaccins, radiations et dépendances, pendant :

  • la grossesse
  • l’allaitement

 Un blog fait par un anesthésiste évoque le sujet (page 1 et page 2)

 Quand la chanson traite du sujet.

Arnaud BASSEZ

IADE-Enseignant CESU

Administrateur


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