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Les plaies par arme à feu - balistique des armes à feu
Article mis en ligne le 13 décembre 2015
dernière modification le 9 octobre 2023

par Arnaud Bassez

Rattrapés par l’actualité, les IADE, acteurs des urgences du quotidien, ont su jouer leur rôle dans les circonstances difficiles des attentats parisiens du 13 novembre 2015 qui ont fait 130 morts et 352 blessés, et jusqu’à 4 000 personnes impliquées, simples témoins ou proches de victimes.

Pour autant, les plaies que les divers hôpitaux ont reçues, ne sont en rien connues de nous, qui n’exerçons pas en zone de combat, si ce n’est les IADE militaires, ou les IADE dans les ONG, soit une faible frange de la profession.

Afin de mieux comprendre ce type de blessures, que nous n’espérons plus voir, voici une modeste tentative de compilation des éléments les plus pertinents, concernant ce sujet mortifère.

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SOMMAIRE

La Balistique et les armes

La balistique existe depuis des millénaires. En effet, elle existait au temps de la chasse et des guerres. Les hommes lançaient des projectiles sur leurs proies, et même si la science de la balistique n’existait pas encore, ils essayaient après plusieurs essais d’améliorer leur précision.

Le mot "Balistique" est d’origine latine, il vient de ballista (qui signifie baliste, qui est une sorte de grosse arbalète) et de ballistica (science qui étudie le mouvement des corps et le comportement d’un projectile).

Les romains sont les précurseurs de la balistique. En effet, ils utilisaient de nombreuses armes de guerre, développées pour l’époque comme la baliste ou la catapulte. Pour avoir une meilleure précision, ils avaient recours à l’étude de la balistique.

Jusqu’à la Renaissance, on croyait que les projectiles des armes telles le canon avaient une trajectoire rectiligne. C’est vers cette époque que cette idée a été changée, et que des expériences ont apporté l’idée d’une trajectoire curviligne entre le lanceur et la cible, dépendant de l’angle de tir.

C’est en 1537 que l’Italien Nicolo Tartaglia Fontana publie sa "Nova Scienza", dans laquelle il fait apparaître la balistique exterieure (étude des trajectoires du projectile en dehors du lanceur). Il affirme alors que la trajectoire du projectile ne peut être rectiligne et qu’elle dépend de la vitesse. Plus cette dernière est grande, plus la trajectoire est plate. Il établit aussi une symétrie entre la première phase et la dernière phase. Ainsi le projectile voit sa vitesse décroissante juste après le tir, et sa vitesse croît dans la chute libre à la fin.

Ensuite, Euler, d’Alembert et Robins créèrent une balistique vraiment scientifique tenant compte de tous les facteurs possibles tels la résistance de l’air.

Toutes les études concernant la balistique se sont donc développées rapidement depuis l’essor des armes à feu. Au XVIIIème siècle, on pouvait alors compter deux méthodes. Tout d’abord, la mesure de la quantité de mouvement d’un projectile, grâce à des outils comme le pendule balistique ou le canon-pendule, puis la mesure de la vitesse de ce même projectile en calculant le temps nécessaire au parcours d’une distance.

Le pendule balistique, mis au point en 1742 par Benjamin Robins, est un dispositif permettant de mesurant la vitesse d’un projectile à partir de son impact. C’est un instrument de mesure des percussions (mesurées en Descartes ; 1 descartes : = 1 Newton.seconde)

A l’origine, il était destiné à mesure la vitesse pour des balles de fusil, on s’en sert encore parfois de cette manière, mais pour la mesure des autres mouvements, la chronophotographie a remplacé cet instrument.

La balistique, au sens littéral du terme, est l’étude des phénomènes auxquels est soumis un projectile. D’un point de vue criminalistique, il s’agit d’exploiter tout ce qui, de près ou de loin, concerne les armes à feu et leur utilisation.

Le travail de la balistique consiste en la détermination de la nature de l’arme qui a causé une blessure ou la mort, le nombre de coups de feu tirés, la direction et la distance d’un tir. Ce travail est la suite d’analyses, d’expérimentations et de calculs sur la scène d’un crime. Pour tout savoir sur l’identité du crime par arme à feu, il va donc falloir étudier tous les phénomènes se produisant à l’intérieur du canon, les mouvements d’un projectile (dans les cas d’une arme à feu, une balle) après avoir quitté l’arme jusqu’à sa cible. Il faudra aussi étudier les conséquences donc les effets du projectile.

Si les descriptions, vérifications de bon fonctionnement, classification légale… font partie du travail de base, l’exploitation des caractéristiques générales des empreintes de tir des armes à feu, permettra d’apporter des éléments essentiels à l’enquête. Chaque arme possède son identité propre et marque d’une façon particulière les balles et douilles qui peuvent être retrouvées sur les scènes de crime. L’examen de ces éléments de munitions et de ces empreintes de tir, permettra de déterminer si plusieurs armes ont été utilisées, d’établir le type de cette, ou de ces armes, d’attribuer le tir à une arme suspecte, de vérifier l’antériorité de l’arme utilisée, d’alimenter des bases de données…

 Quelques dates dans la police scientifique

En 1889, Alexandre Lacassagne découvre que grâce aux stries de la balle, celle-ci peut être associée à l’arme correspondante.

Pour la première fois dans la police scientifique, la balistique aida à résoudre une scène de crime en 1898, après avoir tiré une balle avec l’arme d’un suspect.

Charles Waite a trouvé un outil pour déterminer quel modèle d’arme a tiré un coup de feu en examinant les balles retrouvées.

En 1929, Un grands expert nommé Calvin Goddard identifia les armes employées par les tueurs d’Al Capone qui a conduit à l’arrestation d’un d’entre eux.

En 1959, des experts développèrent un test par coloration pour pouvoir identifier les résidus des coups de feu, qui permettent de dire si un suspect a utilisé une arme ou non en utilisant un révélateur chimique.

Depuis le début du 20ème siècle, les balisticiens n’ont eu de cesse que de réussir à améliorer les techniques et matériels nécessaires à ce travail. L’invention du microscope comparateur (en réalité macroscope de comparaison) de Philip O. GRAVELLE en 1925, fut une étape primordiale. Les progrès de l’optique et de l’éclairage de précision ont fait, à ce jour, de la technique d’identification au microscope comparateur, la méthode de référence en usage dans tous les pays dotés d’une Police Scientifique.

La balistique est une science physique qui étudie le mouvement des corps lancés dans l’espace, et dans la section balistique de la police scientifique, le mouvement des projectiles, plus particulièrement ceux tirés par des armes à feu. La balistique sert à déterminer la nature de l’arme utilisée, le nombre de coups de feu tirés et aussi la direction et la distance de tir. Elle étudie aussi les effets subis par les projectiles pour retrouver l’arme utilisée mais aussi les impacts et les blessures.

Le déplacement d’un projectile, entre l’instant où il est tiré et son impact sur la cible, comprend trois phases distinctes :

 la balistique intérieure, qui traite du déplacement du projectile dans le canon.

 la balistique extérieure, qui traite du déplacement du projectile entre le moment où il sort du canon et celui où il atteint sa cible.

 la balistique terminale, qui traite des effets du projectile sur sa cible.

  • A) La balistique intérieure

La balistique interne est un sujet relativement compliqué. La majeur partie de la balistique interne s’intéresse aux affectations : elle étudie la taille, le diamètre, la quantité de poudre, la masse de la cartouche, etc, pour pouvoir fabriquer les meilleurs cartouches qui auront le meilleur rendement possible suivant les cibles.

Dans les affaires criminelles, la section balistique s’intéresse beaucoup à cette science, mais pas sous cet angle. La section balistique étudie les stries qui rendent chaque balle unique.

La balistique interne est l’étude du mouvement d’un projectile à partir du moment on appuie jusqu’à ce qu’il quitte le canon du fusil. Elle dure environ 5 millièmes de seconde. Une balle provient d’une munition qui est constituée d’un étui, rempli de poudre et fermé par une balle. La balle doit tourner sur elle-même pour partir en ligne droite et atteindre la cible visée. Le mouvement est provoqué par des rayures qui sont sculptées à l’intérieur du canon. Le diamètre de la balle doit être plus gros que celui du canon pour qu’elle puisse pénétrer en force et se mettre à tourner sur elle-même. La balle va s’imprimer des rayures du canon. Les projectiles sortant de la bouche peuvent apporter différentes projections comme de la suie, de la poudre… Ces traces vont permettre de déterminer une distance de tir.

Mais sur une scène de crime, il arrive que la balle ne soit pas retrouvée, car elle peut être ressorti du cadavre, ou avoir été détruite lors de l’impact. Et dans ce cas, aucune identification n’est possible dessus. Il faut donc se mettre à la recherche de la douille.

Car celle-ci aussi est unique, à chaque détonation, une arme laisse sur le culot de l’étui, des micros stries qui lui sont propres, qui permettent d’individualiser une arme.

Quand le percuteur frappe l’amorce, la poudre s’enflamme, les gaz se détendent, et la balle est éjectée. Elle part dans un sens, et l’étui, lui, part de l’autre : il est expulsé sur le côté. Les traces laissées par le percuteur sur l’amorce, et celles laissées par le mécanisme d’éjection sur le fond de l’étui vont également permettre d’identifier le modèle d’arme qui a expulsé l’étui.

Entre la percussion de la cartouche et la sortie du canon du projectile, il s’écoule environ 5 millièmes de seconde. Cette phase va induire des modifications tout d’abord de la cartouche, de l’étui au cours de laquelle la douille va prendre la forme intime de la chambre et de la tête de culasse.

Ensuite la balle va s’imprimer des rayures du canon, qui sont, rappelons le, destinées à donner à celle-ci une trajectoire hélicoïdale permettant d’induire la stabilité gyroscopique dans l’air, et d’accroître : la portée, la puissance de perforation du projectile et d’améliorer la précision du tir. L’identification de l’arme mise en cause dans un crime ou un délit, à partir de divers éléments matériels tels que étuis, douilles et balles retrouvés sur la scène de l’infraction, constitue la préoccupation majeure des balisticiens. En effet ce sont les modifications ou traces laissés sur ces éléments, quand on les retrouve, qui permettent de remonter à l’arme ou type d’arme utilisée par le ou les criminels.

Tout d’abord, l’impression de la rayure du canon sur la balle dépendra de l’état d’usure ou de modification de ce dernier. L’examen de cette balle récupérée sur le terrain ou dans le corps de la victime va conduire à une première signature de l’arme. Ensuite quand on aura récupéré l’étui et la douille, un examen de ces derniers fournira un second élément de signature : traces de l’extracteur, de l’éjecteur unique à l’arme.

En effet celles-ci dépendent du mode de fabrication et des dimensions de cette arme, en particulier de l’usure du mandrin ou de l’outil qui a servi à fabriquer l’arme. Plus particulièrement, le canon issu d’un même barreau montre des traces variables sur toute sa longueur, notamment dues à l’usure de l’outil qui a affecté le rayon du mandrin sur lequel est forgé ce canon, ce qui contribue à la signature de l’arme et permet d’affirmer qu’il s’agit bien d’une arme spécifique et non d’une arme similaire ayant un numéro de série voisin. De plus dans le canon, les projectiles vont prendre des traces particulières selon qu’ils sont sous calibrés ou sur calibrés.

Toutes ces constatations ne peuvent se faire que sur un canon rayé, car dans le cas d’un canon lisse, la balle tirée n’aura aucun stigmate exploitable. En revanche dans une arme de chasse, où le canon est lisse, les douilles auront des traces caractéristiques, susceptibles d’être exploitées.

  • B) La balistique externe

Ce type de balistique concerne le comportement des projectiles, qui au cours de leur trajectoire vont être freinés par l’air, la pesanteur, la pluie, la neige, l’humidité et d’une manière générale par les milieux qu’ils vont traverser. La portée de ces projectiles peut être de plusieurs kilomètres.

En effet, une balle tirée avec une arme à canon rayé va pouvoir parcourir une telle distance, comme le permettent certains calibres (magnum et projectiles de snipers). D’une manière générale, ces projectiles vont être perturbés dans leur course en fonction du milieu qu’ils survolent : désert, milieu humide, terrain caillouteux…, phénomène bien connu dans le domaine de l’aéronautique. Dans ces conditions, les tables utilisées en matière de calcul de trajectoire de tir peuvent être faussées.

Ceci n’est intéressant à considérer qu’en matière de tir à grande distance, ce qui est rarement le cas concernant la police scientifique. En effet au sein du Laboratoire de la Police Scientifique (LPS), on travaille généralement sur des distances de tir relativement courtes, sauf quand on doit établir des trajectoires de tir dans les cas, par exemple, où sont utilisés des matériels performants comme fusil à visée laser pour tirer, par exemple, sur des véhicules ou des habitations.

En effet, dans cette éventualité, la détermination précise de l’origine du tir, connaissant le type de projectile et de cartouche, constitue un élément important pour les enquêtes. Ce type d’investigation nous a souvent conduits à faire aboutir certain type d’enquête.

Dans le cas d’une arme à canon rayé, la balle va être animée d’un mouvement de rotation, initié à l’intérieur de ce canon, qui va être de plusieurs milliers de tours par seconde. Le mouvement va, nous l’avons déjà mentionné, conférer au projectile sa stabilité gyroscopique. Néanmoins la trajectoire de cette balle va être perturbée par différents phénomènes (mutation, phénomène de spirale) si bien que ce projectile va être dérouté de sa trajectoire rectiligne. Ces phénomènes s’observent généralement sur de grandes distances.

Ces deux sciences sont très peu utilisées par les experts en balistique des laboratoires de police. Ils utilisent la balistique externe, qui étudie le mouvement du projectile une fois sorti du canon, uniquement pour déterminer la position du tireur, et ainsi trouver des douilles.

Ils se servent de lasers et cordes fines pour recréer les trajectoires sur la scène du crime, puis utilisent un logiciel de reconstitutions virtuelles pour « revivre » la scène. Les experts en balistique utilisent aussi la balistique extérieure en cas d’absence de balle. Si la balle a traversé le cadavre, en utilisant les points d’entrés et de sorties, les experts recréent la trajectoire et cherchent un nouveau point d’impact qui aura arrêté la balle.

-* B) La balistique terminale

La balistique terminale est, quant à elle, utilisée uniquement pour étudier les « trous » d’impact sur le cadavre. Mais cette science est encore aujourd’hui assez incomprise, malgré les progrès apportés par la technologie de la photographie aux rayons X, et des tests de simulation.

La balistique finale concerne le moment où la balle atteint sa cible. Pour que son efficacité soit maximale, il faut que le projectile délivre le maximum d’énergie dans le minimum de temps et de trajet. Autrement dit la gravité d’une blessure dépend non seulement du siège de l’impact mais encore de la quantité d’énergie perdue dans les tissus et non de la quantité d’énergie transportée. A partir du moment où une balle va traverser un tissu vivant sans se déformer et sans y abandonner son énergie, la cible ne subira qu’une blessure légère, sauf si la zone touchée est une zone vitale.

Ce constat n’est valable que quand la vitesse du projectile au moment de l’impact n’est pas excessive. La situation s’avère différente avec des fusils d’assaut pour lesquels l’extrême vitesse du projectile engendre d’énormes traumatismes. Dans le cas des fusils de chasse, le projectile, animé d’une faible vitesse, va se déformer au contact de la cible et céder rapidement son énergie cinétique, causant ainsi des blessures très vulnérantes. Concourent à cet effet, la forme, la masse et la puissance de la balle. Par ailleurs la vétusté de la cartouche peut aussi apporter des renseignements intéressants.

En effet, à cet égard, nous pouvons citer un exemple où un individu, sur une scène de crime avait tiré sur deux personnes en utilisant des munitions antérieures à 1935. L’amorce contenant du mercure n’avait pu déclencher l’inflammation de la charge propulsive, laissant ainsi la balle à l’intérieur du canon.

Les enquêteurs font appel à un spécialiste, le balisticien, quand une arme à feu a été utilisée sur la scène de crime. Il se concentre alors sur quatre points : les balles, les douilles, les traces de résidus de poudre et finalement l’arme elle-même.

A) L’expert en balistique

Formation : L’expert en balistique possède un baccalauréat en sciences et deux ans de formation en laboratoire.

Rôle : Le rôle de l’expert en balistique est de comparer les marques des projectiles, des douilles, des armes blanches et autres, avec les indices laissés sur la scène de crime. Il recherche les détails qui prouvent que cette arme particulière est la seule qui a pu être utilisée.

Tâches : Ce spécialiste étudie les caractéristiques d’une arme (numéro de série, calibre, etc.), fait des tris de comparaison et de chute libre (coup parti tout seul), repère sous microscope les rayures sur les projectiles et les douilles, et compare les tests avec la base de données CIBLE (voir ci-dessous).

B) Le département balistique

Le département balistique se situe juste à coté du laboratoire, et sert essentiellement pour les tirs de comparaison. Ces derniers se font dans deux endroits différents :

  • un mur de pneus, compact, d’un mètre d’épaisseur.
  • un puits de tirs.

Le mur de pneus est utilisé pour récupérer les étuis de cartouche de l’arme testé. Il est utilisé dans le cas où une douille a été trouvée sur la scène de crime, et que les enquêteur viennent de perquisitionner chez un suspect et on trouvé une arme de même calibre que celle recherché. L’expert en balistique utilise l’arme du suspect, et tir dans le mur. Il récupère la douille qui vient de tomber, et va la comparer avec celle trouvée sur la scène de crime.

Le puits de tir est utilisé quant à lui pour récupérer une balle intacte, et ainsi vérifier si le projectile trouvé dans le corps ou sur la scène provient de l’arme suspecte. Pour ce faire, l’expert en balistique fait feu dans un puits spécial remplit d’eau qui freine le projectile, et qui permet ainsi de le récupérer sans dommages. Le technicien remonte le panier qui contient la balle située au fond du puits, ou selon les modèles, ouvre une vanne située au plus profond du puits pour récupérer le projectile à l’aide d’un tamis. Ensuite, le projectile qui a subi l’épreuve du puits de tir est comparé au projectile prélevé.

En comparant les traces sur les projectiles, il est ainsi possible de confirmer si celui prélevé a été utilisé avec l’arme recueillie.

C) Le laboratoire balistique

Le laboratoire de la police scientifique en section balistique contient deux outils principaux :

  • Le macroscope de comparaison

L’expert en balistique utilise le macroscope de comparaison pour comparer les projectiles et les douilles trouvés sur la scène de crime, avec ceux tirés en laboratoire. Grâce à un macroscope spécial à deux objectifs, il peut observer deux objets simultanément. Il fait glisser les images jusqu’à ce que les marques semblent continues. Lorsqu’il y a juxtaposition, l’expert conclut que la même arme a tiré les deux projectiles.

Le système Ibis intervient après la comparaison. On numérise les projectiles et les douilles trouvés sur chaque scène de crime. Ces images sont enregistrées dans une base de données, la base CIBLE (Comparaison et Identification Balistique par Localisation des Empreintes). Celle-ci permet de comparer les marques d’un projectile suspect avec celles des autres affaires criminelles. Les experts peuvent ainsi relier des crimes entre eux.

Petites notions d’armement

Le projectile

La masse (exprimée en grammes ou en grains)

  • Un grain (gr) = 0,0648 gramme (g)
  • Un gramme (g) = 15,4324 grains (gr)

 La forme

 Composition : La cartouche contient le projectile, la poudre et l’amorce.

On part toujours de l’intérieur (noyau) vers l’extérieur (chemisage) du projectile. La plupart des projectiles sont en plomb, galvanisé ou non (ex .22 LR), ou en plomb chemisé cuivre ou laiton (ex .22 Magnum). Il est également possible de déterminer si le chemisage du projectile est ferromagnétique ou non au moyen d’un aimant (les projectiles et douilles des pays de l’Est possèdent souvent un chemisage férromagnétique).

Le type de chemisage (complet à base ouverte Full Metal Jacket, complet à base fermée Total Metal Jacket, partiel ou silvertip)

Détermination du calibre nominal : Il s’agit de mesurer le diamètre effectif du projectile (calibre réel) et la longueur de celui-ci. Par exemple, le 9mm Parabellum a un diamètre effectif de 9mm et une longueur de 19mm (9×19)
Le nombre de rainures et cannelures éventuellement présentes sur le projectile.

La balle (ou projectile) est le corps projeté par l’arme. Le projectile doit être assez mou pour permettre sa déformation lors de son passage dans les rayures du canon (et aussi parce qu’il est plus grand que le canon), mais assez solide pour supporter l’accélération élevée pendant le tir.

La douille est une cartouche faite de laiton ou d’acier. Elle contient l’amorce, la poudre et le projectile. La douille permet d’empêcher les gaz chauds d’infiltrer le reste du mécanisme (car elle prend de l’expansion contre la chambre pendant le tir).

  • 1 = balle ou obus
  • 2 = douille ou étui
  • 3 = charge explosive
  • 4 = culot
  • 5 = amorce

-L’action de la détente

Lorsque l’on appuie sur la détente, le percuteur frappe la douille (souvent le culot) et fait éclater une charge très sensible, l’amorce qui contient un mélange explosif, qui lorsqu’elle est frappée, propulse des particules sur la poudre.
La flamme intense créée ainsi remplit l’intérieur de la douille et allume la charge de poudre qui brûle alors très rapidement et graduellement. Elle produit des gaz qui poussent le projectile dans le canon. Une cartouche pleine de poudre ou presque va être plus efficace qu’une cartouche partiellement remplie. Si le projectile est lourd, et maintenu solidement dans le collet de la cartouche, ou si la pression des rayures sur le projectile est grande, le confinement de la poudre est accentué et la combustion va procéder plus rapidement.

Pour les douilles on retiendra :

  • Les dimensions (diamètre de l’ouverture de la douille et longueur de la douille)
  • La forme (ogivale, pointue, à tête plate, etc.)
  • La composition (laiton, cuivre, aluminium, fer laqué etc.)
  • Le type de percussion (centrale ou annulaire)
  • Le système d’amorçage (berdan ou boxer)
  • Les inscriptions sur le culot

Il arrive très souvent que les marquages sur le culot des douilles permettent de déterminer le calibre, le fabriquant, la marque, ainsi que l’année de fabrication de la munition.

 Le cycle balistique se compose de 3 étapes :

  • La phase d’allumage durant laquelle tous les grains de poudre devraient s’allumer simultanément sur toute la surface de combustion disponible, entraînant une émission dans la douille (ou chambre de combustion), une augmentation de la pression (due au gaz) et la mise en mouvement du projectile due à la trop forte pression. Une trop grande augmentation de gaz peut faire exploser la douille et/ou la canon.
  • La phase de combustion durant laquelle le projectile se met en mouvement créant une augmentation du volume libre et des gaz formés et de la pression. L’une des fonctions de la douille consiste à se dilater lors du tir de façon à sceller la chambre à cartouche et ainsi éviter des fuites de gaz. Si la douille est trop dure, elle se fend lors du tir et à l’inverse, si la douille est trop tendre, elle ne rétrécit pas après le tir et à donc du mal à s’extraire de la chambre à cartouche. Le volume libre augmentant constamment, la pression diminue malgré la production de gaz de combustion. Cette combustion continue, ou se termine et le projectile sort du canon.
  • Durant la phase de détente, toute la poudre à en théorie brûlée, la pression des gaz sur la base du projectile le fait accélérer et la pression s’estompe dans l’arme. Il est à noté que la combustion de la poudre entraîne une très forte augmentation de la pression. Les canons sont spécialement créés afin de résister à ces pressions.

Il a deux catégories de canons :

 le canon rayé : (revolvers, pistolets, carabines et mitrailleuses) à l’intérieur du canon il y a des rainures en spirales qui font tournoyer la balle, ce qui assure un trajet rectiligne. On peut donc étudier les traces que les stries impriment sur les balles.

 le canon lisse : (fusils) l’intérieur du canon est lisse, il n’y a donc aucune marque.
Plus le canon sera long, plus la poudre aura de temps pour pousser le projectile. Mais arrivé à une certaine taille de canon, la poudre ne pourra plus pousser le projectile et il y aura une baisse de vivacité : la balle ira moins loin, moins vite et sera moins précise.

La chambre est l’extension du canon qui contient la cartouche au moment du tir.

La douille est éjectée hors de l’arme par un mécanisme d’extraction-éjection

 La trajectoire de la balle

Les projectiles vont sur leur cible sous une trajectoire parabolique qui devient de plus en plus courbée à mesure que la distance augmente et que la vélocité diminue (comme une balle de tennis qu’on lance au loin avec ses mains). En réalité, le projectile commence à tomber dès l’instant où il quitte le canon. Toutefois, la ligne centrale du canon est inclinée légèrement vers le haut par rapport à la ligne des mires (qui sont au-dessus du canon), de façon à ce que le projectile croise la ligne de mire lorsqu’il monte et une autre fois lorsqu’il redescend à ce qu’on appelle la portée "zéro". Le projectile atteint le plus souvent sa cible là ou l’on a visé .Mais dans certaines conditions et sur de certaines distances, certains éléments peuvent faire changer de trajectoire la balle, de quelques centimètres à plus d’un mètre selon les conditions. Celles-ci sont le vent, la pluie…

 Les ricochets

L’étude du phénomène des ricochets est importante pour la reconstitution d’une scène de crime et la compréhension du phénomène lésionnel. Dans ce domaine, les paramètres suivants sont à considérer : l’angle d’incidence, l’angle de ricochet, l’angle critique du ricochet, l’angle de déviation et la pénétration et la longueur du contact.

L’angle d’incidence est défini comme étant l’angle avec lequel le projectile vient frapper sa cible (ou, plus généralement, l’angle compris entre la trajectoire du projectile et le plan formé par la cible).

L’angle de ricochet (ou angle de réflexion) est défini comme étant l’angle compris entre la trajectoire du projectile après ricochet et la cible sur laquelle le projectile a ricoché.

L’angle critique du ricochet est la valeur d’angle d’incidence maximale pour que le projectile ricoche encore ; au-delà de cette valeur, le projectile se fragmente ou traverse la cible. Cette valeur dépend des caractéristiques du projectile et de la cible.

L’angle de déviation est négligeable sur de courtes distances. Le ricochet est influencé par plusieurs paramètres, dont la vitesse du projectile, sa composition, son chemisage, sa forme et la nature de la cible (dure ou molle). Dans le cas d’une cible molle, plus la pénétration est profonde, plus la longueur de contact sera importante. Si la cible n’est pas suffisamment épaisse, le projectile peut le traverser. En se référent à l’équation de l’énergie cinétique, on remarque que l’énergie mise en jeu au moment de l’impact provoque une déformation plastique du projectile et de la cible. Une partie de cette énergie est restituée au projectile, ce qui fait qu’il ricoche.

La classification des armes en France

La réglementation française est régie par le décret loi du 18 avril 1939, modifié de nombreuses fois et codifié récemment dans le code de la défense. Cette législation est appliquée par le décret du 6 mai 1995 . Le décret de 1995 donne la classification des armes et matériels militaires tandis que l’arrêté du 7 septembre 1995 définit les armes historiques et de collection, ainsi que les armes libérées.

Les différentes armes « est une arme tout objet conçu pour tuer ou blesser. Tout autre objet susceptible de présenter un danger pour les personnes est assimilé à une arme dès lors qu’il est utilisé pour tuer, blesser, menacer, ou qu’il est destiné, par celui qui en est porteur, à tuer, blesser ou menacer  »
( code pénal français du 1 mars 1994 )

  • armes de poing :

 Les revolvers : les cartouches sont placées dans le barillet

 Les pistolets : possèdent un chargeur amovible de plusieurs cartouches

  • matériels de guerre :

 armes de poing semi- automatiques

 fusils, carabines

 pistolets automatiques, pistolets mitrailleurs ...

 mortiers

 grenades, bombe , mines

 engins explosifs nucléaires.

  • Les munitions :

La douille ou étui : c’est l’ élément qui maintient tous les éléments de la cartouche.

Elle est presque toujours cylindrique et composée de laiton.

Le poinçon qui se trouve sur son culot permet d’identifier son calibrer et sa provenance.

  • L’amorce : c’est sa percussion qui permet sa combustion puis la mise à feu de la poudre ; les amorces actuelles contiennent du peroxyde ou trinitroesorcinate de plomb, du sulfure d’ antimoine ou du nitrate de baryum ; la recherche de ces résidus sur les mains des individus permet d’identifier l’ auteur du coup de feu.
  • La charge propulsive : c’est sa combustion qui va donner l’ énergie cinétique au projectile.

Les poudres actuelles sont sous forme de grains sphériques, tubulaires, en bâtonnet ce sont les poudres pyroxylées , il existe aussi des poudres noires.

La quantité de poudre est variable en fonction de la vitesse initiale que l’on veut imprimer au projectile.

  • L’agent vulnérant : c’est l’élément expulsé par le canon lors du tir.

Il s’agit de balle métalliques, de plombs de chasse , de balle en caoutchouc , en bois ou en carton .

Les balles en plomb contiennent du plomb, de l’étain et de l’antimoine, les balles blindées sont chemisées à l’aide de cuivre ou de zinc.

Les cas particuliers sont les balles expansives qui champignonnent lors du contact avec la cible et lui transmettent une grande part de l’énergie cinétique, provoquant des dégâts considérables, les balles explosives, les balles perforantes ( balles légères avec vitesse initiale très élevée ).

Les cartouches de chasse qui contiennent des grains de plomb, de la poudre, une bourre qui sert de base à la propulsion des grains de plomb.

Détermination du calibre : pour les armes à canon rayé le calibre correspond au diamètre du projectile, il peut également correspondre au diamètre du canon à l’ intérieur des rayures ou à l’ extérieur.

Ainsi les calibres sont très divers.

Pour les armes à canon lisse, le calibre correspond au nombre de balles sphériques que l’on peut fabriquer avec 406 g de plomb ( ancienne livre française ).

Le calibre 12 correspond à un diamètre de 18 mm, le calibre 16 à 17 mm, le calibre 20 à 16 mm.

 

Généralités sur les plaies par armes a feu :

Les armes à feu provoquent des dégâts plus ou moins importants en fonction du type de l’arme, des cartouches, mais aussi en fonction de la distance du tir. La première plaie occasionnée est la plaie d’ entrée ; le trajet provoque lui aussi des dégâts importants, et enfin le projectile peut ressortir du corps et provoquer ainsi la plaie ou orifice de sortie qu’il importe de différencier des orifices d’ entrées.

  • La plaie d’entrée :

Si elle est habituellement facile à trouver , il ne faut pas méconnaitre certaines localisations atypiques telles que les orifices naturels, les régions axillaires, et sous-mammaires, ainsi que l’angle interne de l’oeil.

La plaie d’entrée peut être composée de plusieurs parties qui sont présentes ou non en fonction de la distance de tir , de l’interposition de vêtements... ( caractères constants, caractères inconstant )

  • Les caractères constants :

 L’ORIFICE D’ENTRÉE OU ORIFICE DE PÉNÉTRATION DU TIR :

Il est de forme variable en fonction de l’incidence du tir circulaire en présence d’un tir strictement perpendiculaire oblongue ou ovalaire en cas de tir oblique.

Les bords sont en général nets et réguliers, l’aspect est en général net à l’ emporte pièce il peut tire irrégulier lorsque le projectile à un impacte avant le contact lorsqu ’ a s’agit de balle explosive ou de balle à très haute vitesse initiale ( THV ).

Le diamètre de cet orifice dépend essentiellement de celui du projectile, mais également de la distance de tir.

Dans les tirs à longue distance, le diamètre est inférieur au calibre du projectile.

En revanche, dans les tirs à bout touchant , il est supérieur au calibre du projectile.

 LA COLLERETTE ÉROSIVE :

René Piédelièvre l’a également appelée « zone parcheminée » ou « zone contusive » (Piédelièvre & fournier, 1963 ).

Il s’agit d’une abrasion épidermique rougeâtre, aplatie, située au pourtour de l’orifice d’entrée. Initialement, elle doit être examinée à la loupe car l’arrachement épidermique est fin.

Quelques heures après le décès, sous l’ action du parcheminement cutané, elle devient plus typique et mieux visible.

Elle est provoquée par le projectile qui percute la peau et la perfore. Cette collerette peut être circulaire et concentrique lorsque le projectile rentre perpendiculairement à la peau.

Elle est plus ou moins oblongue et excentrique dans les autres cas : la zone d’abrasion la plus large correspondra à l’ arrivée du projectile et à son premier contact avec la peau.

 LA COLLECTE D’ESSUYAGE :

Elle correspond à l’essuyage du projectile sur la peau au niveau de la plaie d’entrée. Le projectile se charge de graisses , de particules de rouille ou de plomb, de lubrifiant...

Lorsqu’il traverse le canon.

Il « s`essuyé » lors de son franchissement de la peau.

L’importance de la collerette d’essuyage dépend de l’entretien du canon et non pas de la poudre utilisée. Elle dépend également de l’interposition fréquente d’un vêtement , avec un essuyage qui aura lieu à ce niveau.

La collerette d’essuyage est située immédiatement sur le pourtour de l’orifice d’entrée, juste en dehors de la collerette érosive.

Elle revêt un aspect foncé, grisâtre ou noirâtre et est pathognomonique de la plaie d’entrée. Lors d’une pénétration oblique par rapport à la peau, elle est en forme de croissant bilatéral.

Il faut se garder de la confondre avec la zone d’estompage lors d’un tir à bout touchant.

 UNE ZONE HÉMORRAGIQUE :

Sous dermique circulaire et centrée sur la plaie d’entrée, qui est plus visible à l’autopsie.

Les caractères inconstants :

 LA ZONE DE TATOUAGE :

Elle intéresse la zone cutanée la plus périphérique de la plaie d’entrée.

Elle est constituée d’une zone de tatouage proprement dite qui est relative aux incrustations ponctiformes de débris de grains de poudre, partiellement ou entièrement brûlés, dans la peau ( épiderme essentiellement ) et d’une fine poussière superficielle provenant de la combustion de la poudre.

Il s’agit d’une impaction des grains de poudre avec dermabrasion cutanée et non pas d’une brûlure. Elle est de douleur brun-rougeâtre ou rouge- orangée.

Cette zone peut être absente si la combustion de la poudre a été totale.

Elle n’est nettement observée qu’en cas de tir de distance intermédiaire. L’interposition de vêtement la diminue mais ne la supprime pas complètement.

La coloration brun-rougeâtre de la zone de tatouage est le signe d’une plaie ante mortem.

Dans le cas de tir post-mortem , les incrustations de poudre revêtent un aspect plus grisâtre ou jaunâtre avec un aspect humide et sont surtout moins nombreuses que lors d’un même tir chez une personne vivante.

Ces lésions cutanées ne peuvent être par le lavage simple et elles cicatrisent en cas de survie de la victime.

 LA ZONE D’ESTOMPAGE :

plus périphérique, qui correspond au dépôt pulvérulent grisâtre. Elle prend un aspect de suie que le lavage ou l’essuyage font disparaître. Sa forme est variable en fonction des caractéristiques internes du canon.

 LA ZONE D’ENTRÉE ATYPIQUE :

  • Les plaies rasantes :

Le projectile abrase la peau, sans pénétrer dans le corps.

Il se produit une lésion dermo-épidermique avec un aspect le plus souvent oblong, circulaire dans sa partie initiale et pointue dans sa partie terminale.

Cet aspect n’est pas systématique et il est parfois difficile, compte tenu des irrégularités de la peau, d’affirmer la direction du tir.

  • Les plaies tangentielles :

Le projectile suit le même trajet que dans le cas précédent, ruais il pénètre dans le corps au niveau sous-cutané, provoquant des dilacérations et des déchirures de la peau.

C’est la direction des déchirures qui indique celle du projectile Les plaies perforantes superficielles

  • Les plaies par ré entrée :

Le projectile traverse une partie du corps, ressort et pénètre de nouveau dans le corps.

Il s’agit essentiellement des projectiles qui traversent le bras, ( avant-bras ou la main, avant de pénétrer dans le thorax ou la tête ( plaies de parade notamment ).

Il s’agit également de plaies intéressant les deux membres inférieurs.

D’un point de vue général, ces plaies de ré entrée ont des collerettes érosives irrégulières et larges, avec un orifice d’entrée à bords irréguliers et déchiquetés. Une mention particulière doit être portée aux plaies du creux axillaire.

Elles peuvent prendre la forme d’une fente ou d’un ovale, parfois sans collerette érosive et davantage ressembler à une plaie de sortie qu’à un orifice d’entrée.

  • La plaie de sortie :

Les nombres d’orifices de sortie est rarement identique au nombre d’orifices d’entrée.

Il peut être inférieur, identique, voire supérieur. Les caractéristiques générales de ces plaies sont sensiblement équivalentes avec un aspect plus grand et plus irrégulier que les plaies d’entrée.

Les plaies de sortie ne possèdent pas de zone d’essuyage, de collerette érosive ( en principe ), de zone de tatouage ou d’enfumage.

Les aspects les plus fréquents sont les suivants : stellaire ; déchirure ; curviligne ; circulaire ; irrégulière ; bords éclatés.

Les caractéristiques des plaies de sortie dépendent donc des projectiles eux-mêmes, mais également de la région de sortie.

Ainsi une peau tendue comme celle du cuir chevelu, donne une plaie de sortie étendue et irrégulière.

En revanche, une peau flasque est à l’origine de plaie de sortie plus petite, à type de déchirure ou de coupure.

Les plaies de sortie peuvent être difficile à localiser, notamment sur les lieux de découverte du cadavre où l’examen est gêné par la présence de sang ou de souillures.

Le diamètre de sortie n’est pas strictement corrélé avec celui du projectile.

Il est en général plus grand compte tenu des oscillations et des culbutes du projectile lors de son trajet intra-corporel, mais il peut être plus petit du fait de l’élasticité cutanée.

Le projectile peut pas avoir d’énergie suffisante pour ressortir du corps.

Il peut être palpable en sous-cutané.

Enfin, ce projectile peut avoir fragmenté ou avoir provoqué des esquilles osseuses responsables de plusieurs plaies de sortie ( nombre de sorties supérieur au nombre de plaies d’entrée ).

Cette grandeur et cette irrégularité des plaies de sortie tiennent au fait que les projectiles perdent de leur stabilité en pénétrant et en traversant le corps humain.

Ils peuvent ricocher sur des os et ressortir du corps après avoir effectué un ou plusieurs mouvement autour de leur axe.

Ils peuvent aussi être déformés lors de leur trajet intra corporel et perdre de leur régularité circulaire.

Les plaies de sortie occasionnées sont donc plus grandes et plus irrégulières.

La balistique des projectiles (Jean Jacques Dorrzapf)
la balistique judiciaire (Dr Guillaume Boudarham)
Plaies vasculaires par arme à feu données fondamentales et principes therapeutiques (Vincent Duverger HIA Bégin)
Balistique lésionnelle et traumatismes pénétrants (M Rüttimann, B Rouvier)
Accidents balistiques de chasse dans le Sud de la France
Actualités sur les lésions traumatiques de guerre
Balistique lésionnelle. Les simulants
Etude balistique terminale
Etude des effets arrière thoracique
Facteur VII activé en traumatologie de guerre
Facteur VII activé en traumatologie
Facteur VII activé recombinant. Indications actuelles
Faisabilité et effets du clampage aortique par voie endovasculaire sur un modèle animal de choc hémorragique par traumatisme abdominal
Impacts crâniens non-pénétrants. Effets fonctionnels
Les pansements hémostatiques pour usage externe en traumatologie de guerre
Lésions balistiques des explosions
Préparation d’un animal pour expérimentation balistique
Préparation d’un animal pour expérimentation balistique
Traumatisme thoracique balistique
Traumatismes balistiques à Marseille
RFE. Prise en charge du traumatisme abdominal grave de l’adulte dans les 48 premières heures (sfmu-sfar 2019)
  • Le site citera 69 est riche de documents divers. A consulter sans modération.
  • A lire le témoignage d’un infirmier et d’un médecin du GIGN.
  • Le DUTPB (Diplôme Universitaire de Thérapeutique des Plaies Balistiques) est une formation proposée par l’Université de Rouen, en partenariat avec des spécialistes de la balistique et des médecins militaires. Les inscriptions sur le site.

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Apprendre à faire un garrot tourniquet

tourniquet for the control of traumatic hemorrhage, a review of the literature

Pose d’un garrot tourniquet en pré-hospitalier : technique et suivi - Medscape - 9 janv 2017. Dr Dominique Savary

Dans les années 2000, le garrot tourniquet a été mis de côté dans les formations grand public, il ne fallait plus poser de garrot, notamment dans la formation PCS1 (prévention secours civique) alors que dans le même temps, la médecine militaire a promus ce dispositif, ce qui lui a permis de combattre un certain nombre de morts évitables sur terrain de combat.

Plus récemment, suite aux attentats de Paris, nous avons vu apparaitre des recommandations pour mettre en place des kits « damage control » qui incluaient ce dispositif.

Pour autant, le garrot a aussi sa place dans la gestion quotidienne de la médecine pré-hospitalière, c’est ce que nous rappelle Michelle Scerbo dans un article de décembre 2016 de Prehospital Emergeny Care [1]

De nombreux bancs d’essai ont été réalisés avec les multiples garrots présents sur le marché, en particulier par l’armée américaine.

Au final, deux types de garrot sont aujourd’hui reconnus : le garrot tourniquet et le garrot pneumatique utilisé au bloc opératoire en chirurgie orthopédique principalement.

Le garrot a pour principe d’interrompre la circulation sanguine en aval de son lieu d’implantation afin de stopper un saignement. Il doit donc exercer une pression suffisante sur la peau pour se transmettre aux structures sous-jacente et occlure la circulation artérielle.

Selon la formule de Graham, la pression artérielle d’occlusion (PAO) d’un membre dépend à la fois du diamètre du membre, de la largeur du garrot utilisé, de la pression artérielle systolique et diastolique. Cette PAO dépend également de la nature des tissus sous-jacents, donc de la présence d’un ou de deux os au niveau du membre concerné.

La pression d’occlusion artérielle (Po) dépend de la circonférence de la cuisse (C), de la largeur du garrot (L), de la pression artérielle systolique (PAS) et diastolique (PAD) : Formule de Graham

Po = (PAS - PAD) x C divisé par L x 3, + PAD = [(PAS - PAD) x 2,5] + PAD

extrait de l’article compil utile

Ces recommandations proposent donc de poser le garrot à la racine des membres mais ce dogme a toutefois fois été discuté, en particulier dans un article du colonel Jean François Kragh, un auteur qui a beaucoup travaillé sur les garrots, et qui présente dans sa publication 428 garrots posés au cours de la guerre en Irak. On voit qu’il y a une efficacité certaine du garrot posé sur l’avant-bras ou sur la jambe.

L’important est donc l’efficacité du garrot et, nous l’avons vu, elle est directement en lien avec la largeur du dispositif. Elle doit être d’au moins 38 mm pour le garrot tourniquet. A noter que 2 garrots simultanés sont moins efficaces qu’un seul garrot de bonne largeur. Il faut le poser directement sur la peau et pas sur les vêtements qui pourraient faire des plis et auraient des conséquences sur les parties molles sous-jacentes.

Enfin, il est également recommandé de mettre en place une protection thermique sur le membre sous le garrot pour éviter une hypothermie qui pourrait être secondairement délétère.

Règles d’or après la pose d’un garrot en préhospitalier

  • Noter l’heure et ne pas la recouvrir.
  • Quand le patient est en sécurité, toujours réévaluer la nécessité de maintenir un garrot posé sur le terrain sauf s’il existe une amputation, un état de choc ou si la pose excède 4 heures. Il sera aussi nécessaire de réaliser une surveillance de l’efficacité du garrot tout au long de la prise en charge.

Conséquences de la pause d’un garrot

Contraintes de cisaillement directement sous le dispositif qui peuvent être évitées par la largeur du garrot.

La survenue d’une douleur importante au bout d’une trentaine de minutes. Jean Pierre Estebe (réanimateur Rennes) qui a beaucoup travaillé sur la place de ce dispositif en chirurgie réglée propose l’adjonction soit de morphine, soit de kétamine ou une anesthésie locorégionale à ces patients.

Enfin les conséquences c’est bien sûr l’ischémie périphérique du membre. On sait que si elle est prise en charge dans les deux heures, elle aura peu de conséquences mais au-delà de 6 heures, il y aura une perte définitive du membre garroté.

Certes, la gestion d’un garrot en situation pré-hospitalière et en situation catastrophique, comme lors d’un attentat, n’est pas la même mais il y a toujours 3 points à retenir :

  • il faut s’équiper de dispositifs efficaces et donc suffisamment larges,
  • il faut toujours vérifier l’efficacité du dispositif, -
  • il faut soigneusement orienter le patient et faire préparer son accueil par les équipes chirurgicales avec l’aide de la régulation médicale pour que la suite de la prise en charge soit la plus efficiente possible.

Piquer au vif les hémorragies

La stabilisation d’une victime d’une hémorragie se révèle très difficile pour les non professionnels de santé, tandis que ces derniers peuvent rencontrer de nombreux obstacles dans certaines conditions particulières. La médecine de guerre, particulièrement concernée, offre des réponses à ces situations complexes. Depuis un an, l’Armée américaine utilise ainsi un dispositif élaboré par la société Revolutionary Medical Technologies (RevMed). A première vue, pourtant, son outil, baptisé Xstat n’a rien de révolutionnaire puisqu’il se présente comme une seringue, à l’intérieur de laquelle on distingue comme des petites boules de coton.

Des petites éponges très performantes

Xstat est en réalité bien plus que ça : ce dispositif hémostatique contribue à sauver des vies en quelques secondes. La seringue permet en effet d’insérer dans une plaie ouverte (en se positionnant au plus près de l’artère) 92 petites éponges, présentant une capacité d’absorption inégalée. Ces éponges extensibles de trois centimètres de diamètre peuvent en effet absorber chacune jusqu’à 300 millilitres de liquide, grâce à la présence de cellulose.

Jusqu’à trois seringues peuvent être utilisées pour le même patient et grâce à ces éponges, il serait possible de gagner quatre heures avant l’admission de la victime dans un centre de soins adapté. Ce long délai est notamment rendu possible grâce à la présence de chitosane dans le revêtement des éponges, un composant synthétique antibactérien et hémostatique. Chaque éponge devra être retirée à l’hôpital, ce qui est facilité par la présence d’un marqueur détectable au rayon X.

Le dispositif présente quelques limites : il ne pourra être utilisé pour les blessures du thorax, de l’abdomen, au niveau de la cavité pleurale, du médiastin, dans l’espace rétro péritonéal, autour du ligament inguinal et à proximité de la clavicule. A contrario, la seringue pourra être employée face à des blessures à l’aine ou à l’aisselle, qui ne peuvent être garrotées.

Blessures de guerre en ville

Sur le terrain militaire, l’efficacité et l’utilité d’Xstat ont pu être mises en évidence. Mais aujourd’hui, le dispositif est promis à une plus large utilisation : la Food and Drug Administration vient d’autoriser sa mise sur le marché ouvrant le champ à un usage civil. Aux Etats-Unis où les blessures par balle font 33 000 victimes chaque année, ce dispositif trouvera sans doute sa place dans les procédures d’urgence. « C’est vraiment très intéressant de voir que cette technologie va pouvoir venir en aide aux secours civils » s’est félicité William Maisel, responsable de l’approbation de ce type de dispositif au sein de la FDA.

En France, au lendemain des attaques terroristes du 13 novembre qui ont confirmé l’efficacité des services de santé mais également mis en évidence les limites des interventions d’urgence sur le terrain, ce dispositif pourrait susciter l’attention de certains responsables et spécialistes de l’oxyologie.


Gilets pare-balles

Les résistances balistiques des gilets pare-balles sont catégorisés du niveau I à IV selon la norme NIJ (National Institute of Justice).

La norme NIJ établit les exigences minimales de performance et méthodes d’essai pour la résistance balistique des gilets pare-balles personnel conçu pour protéger le torse contre les coups de feu.

Pour être certifié « N.I.J. » chaque gilet pare-balles doit être à même de supporter le tir de plusieurs projectiles selon un protocole rigoureux et stricte.

Chaque niveau de cette norme correspond à un niveau de protection.

Il est donc essentiel de bien choisir son gilet en fonction de la menace encourue.

La norme NIJ se limite à la résistance balistique et ne traite pas de la résistance aux couteaux ou autres objets très pointues.

La majorité des gilets pare-balles offre une protection limitée contre les flèches, les pics à glace, les coups de couteau, les munitions dont la pointe est effilée ou les munitions perforantes. Étant donné que l’énergie déployée par ce type d’objet est répartie sur une surface très restreinte, ils peuvent traverser certains gilets pare-balles. Des gilets sont cependant spécialement conçus pour contrer les objets tranchants tels les couteaux – ils sont principalement utilisés par les gardiens de prison. Des matériaux tels le Dyneema (une alternative au Kevlar) offrent une plus grande protection contre les lames.

Les gilets pare-balles, sans l’ajout de plaques de protection, n’offrent pratiquement aucune protection contre les munitions de fusil ou même certaines munitions de pistolet tirées par des carabines, car leur vitesse et leur pouvoir de pénétration sont beaucoup plus grandes. La seule exception est le 22 Long Rifle, qui est arrêté par les gilets pare-balles, et ce, même s’il est tiré par un fusil.

Il faut avoir vraiment confiance dans le matériel...


Radically Invasive Projectile

S’il y a un domaine où les humains n’ont jamais manqué d’imagination, c’est bien dans les manières de faire souffrir ou de tuer son prochain…

Un nouveau type de balle, spécialement conçu pour être le plus mortel possible, fait son apparition sur le marché aux Etats-Unis, et ses effets filmés en Super Slow Motion sont tout bonnement terrifiants !

 RIP bullet

La balle Radically Invasive Projectile (RIP...!) est composée de plusieurs parties qui se séparent lorsqu’elles atteignent une cible pour provoquer des dégâts encore plus importants qu’une balle classique.

La vidéo suivante montre bien à quel point un impact de balle RIP sur un corps humain serait dévastateur pour les organes internes…Et dire que de nombreux américains sont en train de stocker d’énormes quantités de munitions en prévision d’une possible loi limitant la vente des armes à feu et des munitions, à tel point que les vendeurs considèrent que l’année 2013 a été l’équivalent de 10 années de ventes normales…

Quel particulier a besoin d’avoir des balles aussi dévastatrices ?

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  Aucune fascination pour les vidéos présentées. Mais on ne comprend bien que ce que l’on accepte de connaître. (AB)

  Une balle au ralenti

  Une vidéo ci-dessous finalement assez intéressante, car elle montre les effets cinétiques et physiques d’une balle tirée sous l’eau

  Impact en slow motion

La balistique assistée par ordinateur, ou l’arme "intelligente"

« Think of it like a smart rifle. You have a smart car ; you got a smartphone ; well, now we have a smart rifle, »

Voilà une arme qui possède une différence majeure avec les autres : quand vous appuyez sur la gâchette, elle ne tire pas tout de suite.

C’est le fusil qui décide du moment idéal pour tirer, en prenant en compte plusieurs paramètres, comme le vent, le mouvement et la distance de la cible.

Équipée d’un laser (pour évaluer les distances) et d’un ordinateur balistique (pour effectuer les calculs) cette "arme intelligente" peut faire mouche à tout coup à plus de 600 mètres.

Le tireur appuie sur un bouton, le laser « marque » la cible et la balle ne part que lorsque les conditions pour l’atteindre sont réunies.

Même un novice devient un tireur d’élite après seulement quelques heures d’entraînement.

L’arme possède un moniteur qui affiche des informations, comme la distance de la cible, la vitesse du vent, l’angle d’inclinaison du canon, une boussole et le niveau des piles.

L’arme est munie de WiFi et d’une prise USB. Il est possible de capturer une vidéo et de l’envoyer en temps réel à une tablette à proximité. Puis ensuite sur Twitter, Facebook, YouTube.

Un mot de passe permet d’empêcher l’accès aux fonctionnalités balistiques avancées à une personne non autorisée – il faut bien justifier l’expression "smart rifle".

Il parait toutefois, que l’on peut intervenir aussi à distance sur ce type d’arme, car un hacker peut par le wifi, interférer sur l’arme et en faire ce qu’il en veut.


Le « Révolver noué », « Knotted Gun » de Carl Frederik Reuterswärd, une sculpture symbole de paix, de non violence et de désarmement

Histoire du revolver (article très intéressant)

Classification des armes

Les armes sont classées en 4 catégories en fonction de leur dangerosité. La dangerosité d’une arme à feu s’apprécie en fonction des modalités de répétition du tir et du nombre de coups tirés. À chaque catégorie correspond un régime administratif d’acquisition et de détention (interdiction, autorisation, déclaration, enregistrement ou détention libre).

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  • Arme de catégorie D (en vente libre ou soumise à enregistrement)

Les armes de la catégorie D sont soit en vente libre (avec quelques restrictions, notamment en matière de vente aux mineurs)

Sont classés dans cette catégorie :

  • tout objet pouvant présenter un danger pour la sécurité publique, comme par exemple les armes non à feu camouflées, les poignards, couteaux-poignards, matraques, projecteurs hypodermiques,
  • certaines bombes aérosols incapacitantes ou lacrymogènes,
  • certaines armes à impulsion électrique de contact,
  • les armes à feu dont tous les éléments ont été neutralisés,
  • les armes historiques et de collection dont le modèle est antérieur au 1er janvier 1900 (à l’exception de celles classées dans une autre catégorie en raison de leur dangerosité),
  • certaines armes historiques ou de collection dont le modèle est postérieur au 1er janvier 1900,
  • les armes et les lanceurs dont le projectile est propulsé de manière non pyrotechnique avec une énergie à la bouche comprise entre 2 et 20 joules,
  • les armes conçues exclusivement pour le tir de munitions à blanc, à gaz ou de signalisation et non convertibles pour d’autres projectiles,
  • les munitions et éléments de munitions à poudre noire utilisables dans les armes historiques et de collection.
  • les matériels de guerre antérieurs au 1er janvier 1946 et dont les armements sont rendus impropres au tir,
  • certains matériels de guerre postérieurs au 1er janvier 1946 dont les armements sont neutralisés.

soit soumises à une simple procédure d’enregistrement.

Doivent faire l’objet d’une demande d’enregistrement :

  • les armes d’épaule à canon lisse tirant un coup par canon,
  • les éléments de ces armes,
  • les munitions et éléments des munitions de ces armes.

L’acquisition des systèmes d’alimentation des armes de la catégorie D soumises à enregistrement se fait sur présentation :

  • soit du permis de chasser délivré en France ou à l’étranger accompagné du titre de validation pour l’année en cours (ou de l’année précédente),
  • soit de la licence de tir en cours de validité.

Pour acquérir une de ces armes, un de ses éléments ou ses munitions, il faut être majeur et, pour les armes soumises à enregistrement, il faut en plus être titulaire :

  • d’un permis de chasser délivré en France ou à l’étranger, accompagné du titre de validation pour l’année en cours,
  • ou d’une licence en cours d’une fédération sportive agréée par le ministère chargé des sports pour la pratique du tir ou du ball-trap.

À savoir : les personnes ayant été traitées dans un service de psychiatrie et qui souhaitent acquérir une arme ou des munitions doivent produire un certificat délivré par un médecin psychiatre et datant de moins d’un mois.

Pour conserver à son domicile une arme de la catégorie D soumise à enregistrement, il faut :

  • soit la ranger dans un coffre-fort ou une armoire forte adapté au type de matériels détenus,
  • soit démonter une pièce essentielle la rendant immédiatement inutilisable et conserver cette pièce à part,
  • soit utiliser tout autre dispositif empêchant l’enlèvement de l’arme.

Les munitions doivent être conservées séparément dans des conditions interdisant l’accès libre.

 textes législatifs

Code de la sécurité intérieure : articles L311-1 à L311-4
Classification des armes

Code de la sécurité intérieure : articles R312-52 à R312-59
Acquisition et détention d’armes soumises à enregistrement

Code de la sécurité intérieure : articles R314-1 à R314-4
Conservation des armes

Arrêté du 7 septembre 1995 fixant le régime des armes et des munitions historiques et de collection

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  • Arme de catégorie C (soumise à déclaration)

Pour acquérir ou détenir une arme de la catégorie C, quel que soit le type de cette arme, il faut respecter des conditions liées notamment à l’âge ou à l’absence de condamnations. Par ailleurs, vous devez respecter des règles de sécurité si vous détenez cette arme à votre domicile.

Les armes classées dans la catégorie C sont les suivantes :

  • les armes à feu d’épaule à répétition semi-automatique dont le projectile a un diamètre inférieur à 20 mm, permettant le tir de 3 munitions au plus sans réapprovisionnement,
  • les armes à feu d’épaule à répétition manuelle dont le projectile a un diamètre inférieur à 20 mm, permettant le tir de 11 munitions au plus sans réapprovisionnement ainsi que les systèmes de réapprovisionnement de ces armes,
  • les armes à feu d’épaule à un coup par canon dont au moins l’un n’est pas lisse,
  • les éléments de ces armes,
  • certaines armes à feu fabriquées pour tirer une balle ou plusieurs projectiles non métalliques,
  • les armes et lanceurs dont le projectile est propulsé de manière non pyrotechnique avec une énergie à la bouche supérieure à 20 joules,
  • certaines armes présentant des caractéristiques équivalentes,
  • les munitions et éléments de munitions des armes de la catégorie C,
  • certaines munitions à percussion centrale et leurs éléments conçues pour les armes de poing, mais qui ne sont pas classées en catégorie B et éléments de munitions.

Attention : toutes ces armes sont soumises au régime de la déclaration.

Pour les armes de la catégorie C, l’acquisition est soumise à la présentation :

  • du permis de chasser délivré en France ou à l’étranger accompagné du titre de validation de l’année en cours ou de l’année précédente
  • ou de la licence de tir en cours de validité.

L’acquisition de certaines munitions de catégorie C est également soumise à la présentation du titre de détention de l’arme.

Pour les mineurs de 16 à 18 ans, l’acquisition doit être faite par la personne détenant l’autorité parentale à condition qu’elle ne soit pas inscrite au fichier national des personnes interdites d’acquisition et de détention.

Pour acquérir une arme de la catégorie C, un de ses éléments ou des munitions de cette catégorie, il faut remplir toutes les conditions suivantes :

  • être majeur,
  • ne pas être inscrit au fichier national des personnes interdites d’acquisition et de détention d’armes,
  • disposer d’un bulletin n°2 du casier judiciaire ne comportant pas de condamnations pour meurtre, assassinat, tortures ou actes de barbarie, violences volontaires, viol ou agressions sexuelles, trafic de stupéfiant...,
  • ne pas se signaler par un comportement laissant objectivement craindre une utilisation de l’arme dangereuse pour soi-même ou pour autrui,
  • présenter un certificat médical datant de moins d’un mois ou présenter un permis de chasser délivré en France ou à l’étranger, accompagné du titre de validation pour l’année en cours ou présenter une licence en cours d’une fédération sportive agréée par le ministère chargé des sports pour la pratique du tir ou du ball-trap.

À noter : les personnes ayant été traitées dans un service de psychiatrie et qui souhaitent acquérir une arme ou des munitions doivent produire un certificat délivré par un médecin psychiatre datant de moins d’un mois.

Pour conserver à son domicile une arme de la catégorie C, il faut :

  • soit la ranger dans un coffre-fort ou une armoire forte adaptés au type de matériels détenus,
  • soit démonter une pièce essentielle la rendant immédiatement inutilisable et conserver cette pièce à part,
  • soit utiliser tout autre dispositif empêchant l’enlèvement de l’arme.

Les munitions doivent être conservées séparément dans des conditions interdisant l’accès libre.

 textes législatifs :

Code de la sécurité intérieure : articles L311-1 à L311-4
Classification des armes

Code de la sécurité intérieure : articles R312-52 à R312-59
Acquisition et détention d’armes soumises à enregistrement

Code de la sécurité intérieure : articles R314-1 à R314-4
Conservation des armes

Arrêté du 7 septembre 1995 fixant le régime des armes et des munitions historiques et de collection

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  • Arme de catégorie B (soumise à autorisation)

Pour acquérir et détenir une arme de la catégorie B, quel que soit son type, il faut respecter des conditions liées notamment à l’âge ou à l’absence de condamnations. Par ailleurs, si vous détenez cette arme à votre domicile, vous devez respecter des règles de sécurité.

Sont classées dans la catégorie B, soumises à la procédure d’autorisation, les armes suivantes :

  • les armes à feu de poing et armes converties en armes de poing non comprises dans les autres catégories, ainsi que leurs munitions à percussion centrale,
  • les armes d’épaule à répétition semi-automatique, dont le projectile a un diamètre inférieur à 20 mm, d’une capacité supérieure à 3 coups ou équipées d’un système d’alimentation amovible et n’excédant pas 31 coups sans qu’intervienne un réapprovisionnement,
  • les armes à feu d’épaule à répétition manuelle, dont le projectile a un diamètre inférieur à 20 mm, d’une capacité supérieure à 11 coups et n’excédant pas 31 coups sans qu’intervienne un réapprovisionnement,
  • les armes à feu d’épaule à canon rayé dont la longueur totale minimale est inférieure ou égale à 80 cm ou dont la longueur du canon est inférieure ou égale à 45 cm,
  • les armes à feu d’épaule à canon lisse à répétition ou semi-automatiques dont la longueur totale minimale est inférieure ou égale à 80 cm ou dont la longueur du canon est inférieure ou égale à 60 cm,
  • les armes à feu d’épaule ayant l’apparence d’une arme automatique de guerre,
  • les armes à feu d’épaule à répétition à canon lisse munies d’un dispositif de rechargement à pompe,
  • certaines armes à feu fabriquées pour tirer une balle ou plusieurs projectiles non métalliques et leur munitions,
  • les armes chambrant les calibres suivants : 7,62 x 39 ; 5,56 x 45 ; 5,45 x 39 russe ; 12,7 x 99 ; 14,5 x 114,
  • les armes à impulsion électrique de contact permettant de provoquer un choc électrique à bout touchant, sauf ceux classés dans une autre catégorie,
  • les générateurs d’aérosols incapacitant ou lacrymogènes, sauf ceux classés dans une autre catégorie.

L’acquisition de munitions pour les armes de la catégorie B est soumise à la présentation, au moment de l’achat, de l’autorisation de l’arme détenue et il n’est pas possible de détenir un système d’alimentation sans avoir été autorisé à acquérir une arme correspondante.

Il n’est pas possible de détenir plus 10 systèmes d’alimentation par arme ou plus de 1.000 munitions.

Il n’est pas possible d’acquérir plus de 1.000 munitions par arme au cours de 12 mois consécutifs, sauf dans le cas du tir sportif.

Par dérogation, les personnes pratiquant une discipline de tir nécessitant l’utilisation de tels systèmes d’alimentation peuvent acquérir et détenir des systèmes permettant le tir de plus de 20 munitions si elles produisent le certificat de leur fédération sportive. Elles peuvent acquérir 1.000 cartouches par arme.

Les personnes autorisées à acquérir une arme à feu de poing pour des raisons de sécurité ne peuvent acheter plus de 50 cartouches par arme.

Le recomplètement de ce stock est également soumis à autorisation. L’autorisation est complétée par le vendeur qui l’adresse au préfet.

Pour les mineurs de 16 à 18 ans, l’acquisition doit être faite par la personne détenant l’autorité parentale à condition qu’elle ne soit inscrite au fichier national des personnes interdites d’acquisition et de détention.

À noter : une personne ayant été traitée dans un service de psychiatrie doit fournir un certificat médical de moins d’un mois, délivré par un médecin psychiatre praticien, un enseignant hospitalier, un expert agréé par les tribunaux ou un médecin de l’infirmerie spécialisée de la préfecture de police.

Pour acquérir une arme de la catégorie B, un de ses éléments ou des munitions de cette catégorie, il faut remplir toutes les conditions suivantes :

  • être majeur ou, si on est mineur, être un tireur sélectionné participant à des concours internationaux,
  • ne pas être inscrit au fichier national des personnes interdites d’acquisition et de détention d’armes,
  • disposer d’un bulletin n°2 du casier judiciaire ne comportant pas de condamnations pour meurtre, assassinat, tortures ou actes de barbarie, violences volontaires, viol ou agressions sexuelles, trafic de stupéfiant...
  • ne pas se signaler par un comportement laissant objectivement craindre une utilisation de l’arme dangereuse pour soi-même ou pour autrui,
  • ne pas faire l’objet d’un régime de protection juridique, avoir été ou être admis en soins psychiatriques sans consentement,
  • présenter une licence en cours d’une fédération sportive agréée par le ministère chargé des sports pour la pratique du tir ou du ball-trap (pour certaines armes de la catégorie B).

À noter : les personnes ayant été traitées dans un service de psychiatrie doivent fournir un certificat médical datant de moins d’un mois, délivré par un médecin psychiatre praticien ou enseignant hospitalier, un expert agréé par les tribunaux ou un médecin de l’infirmerie spécialisée de la préfecture de police pour Paris.

Pour conserver à son domicile une arme de la catégorie B, il faut la ranger dans un coffre-fort ou une armoire forte adaptés au type de matériels détenus.

Les munitions doivent être conservées séparément dans des conditions interdisant l’accès libre.

 textes législatifs

Code de la sécurité intérieure : articles L311-1 à L311-4
Classification des armes

Code de la sécurité intérieure : articles R312-2 à R312-3
Autorité compétente pour délivrer les autorisations

Code de la sécurité intérieure : articles R312-4 à R312-8
Dépôt et instruction des demandes

Code de la sécurité intérieure : articles R312-9 à R312-12
Décision

Code de la sécurité intérieure : articles R312-13 à R312-19
Validité de l’autorisation

Décret n°2013-700 du 30 juillet 2013 portant application de la loi n°2012-304 relative à l’établissement d’un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif

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  • Arme de catégorie A (détention interdite sauf autorisation particulière)

Les armes de la catégorie A se divisent en 2 sous-catégories A1 et A2.

Catégorie A1

 Arme à feu d’épaule

Armes permettant le tir de plus de 31 munitions sans réapprovisionnement, avec un système d’alimentation de plus de 30 cartouches,

 Arme à feu de poing

Arme permettant le tir de plus de 21 munitions sans réapprovisionnement, avec un système d’alimentation de plus de 20 cartouches

 Arme à feu à canon

  • Arme à feu à canons rayés dont le projectile a un diamètre maximum supérieur ou égal à 20 mm,
  • Armes à feu à canon lisse d’un calibre supérieur au calibre 8, à l’exclusion des armes de la catégorie C ou D,

 Autres armes

  • Arme à feu camouflée sous la forme d’un autre objet
  • Arme présentant des caractéristiques techniques équivalentes

 Système d’alimentation

  • Système d’alimentation d’armes de poing de plus de 20 munitions
  • Système d’alimentation d’armes d’épaule de plus de 30 munitions

À noter : les éléments de ces armes et éléments de ces munitions sont également classés dans la catégorie A1

Armes de la sous-catégorie A2

La sous-catégorie A2 regroupe

  • les matériels de guerre,
  • les matériels destinés à porter ou à utiliser au combat les armes à feu,
  • les matériels de protection contre les gaz de combat.

L’acquisition et la détention des munitions de la catégorie A sont interdites, sauf en cas de possession d’autorisation de détention d’arme équivalente pour les armes de la catégorie A2 déclassées (armes de collection).

L’acquisition et la détention des matériels relevant de la catégorie A1 sont interdites pour les particuliers.

L’acquisition et la détention de certaines armes de la catégorie A2, dont le modèle est antérieur au 1er janvier 1946 et dont la neutralisation est garantie, sont soumises à la procédure de l’autorisation.

 Acquisition, détention, transport

  • Demande d’enregistrement pour certaines armes de la catégorie D
  • Déclaration d’une arme de catégorie C
  • Demande d’autorisation de détention d’arme de catégorie B
  • Port et transport d’une arme
  • Acquisition et détention d’armes par un mineur
  • textes législatifs

Code de la sécurité intérieure : articles L311-1 à L311-4 Classification des armes

Code de la sécurité intérieure : articles R311-2 à R311-4 Classement des matériels de guerre, armes et munitions

source : service-public.fr

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Les sources pour cet article


Fusillades : quelle organisation des secours ?

Publié le 24/08/2015

La tentative d’attentat terroriste du Thalys, survenue le vendredi 21 aout 2015, est l’occasion de revenir sur la journée d’études consacrée à l’organisation des secours lors de fusillades, qui s’est déroulée le 20 mai 2015 au Val de Grâce à l’initiative de la Société Française de Médecine de Catastrophe (www.sfmc.org).

 Sous le regard de l’épidémiologiste

L’étude épidémiologique des fusillades et des tueries de masses a été présentée par le Médecin Général Noto. On en différencie plusieurs types en fonction des circonstances de survenue, de l’origine et des motivations des agresseurs, du lieu de survenue, des victimes ciblées ou des armes utilisées :

  • Le "mass shooting" : des tireurs entrant dans une enceinte comme une école, une université, un centre commercial dans l’objectif de faire un maximum de victimes.
  • Les tireurs isolés en embuscade ou se déplaçant. Ils sont à 96 % des hommes. Dans 50 % des cas ils sont arrêtés par les forces de l’ordre, 40 % se suicident et 10 % sont tués sur place lors de l’intervention de neutralisation.
  • Les actes de banditisme qui se terminent en fusillades.
  • Les différents familiaux de type suicides collectifs prémédités ou les raptus psychiatriques.
  • Les querelles de voisinage notamment liées au bruit avec une forte prédominance du contexte alcoolique.
  • Les actes de terrorisme dont on a noté l’évolution entre les attentats à la bombe des années 1980 vers des fusillades avec affrontement avec armes à feu de plus en plus sophistiqués avec les forces de l’ordre, chez des individus décidés à mourir au combat.

Ce sont les Etats-Unis qui ont été le siège du plus grand nombre de fusillades, plus particulièrement dans les établissements scolaires et universitaires. On peut rappeler le massacre emblématique du Campus de Virginia Tech le 16 avril 2007 au cours duquel un étudiant en licence d’anglais a tué 32 personnes et s’est suicidé à l’arrivée de la police.

L’Europe n’est pas épargnée, comme en témoigne la tuerie de l’île d’Utoya en Norvège le 22 juillet 2011 où après un attentat à la bombe à Oslo visant le siège du gouvernement qui fit huit morts et 15 blessés, l’extrémiste Anders Breivink a tué 69 personnes et en a blessé 33 autres par balles.

Les cibles restent les lieux symboliques, les transports en commun et les endroits et moments de grande affluence du public.

 Quelles armes pour quelles lésions ?

Les armes à feu et munitions des terroristes ont été détaillées par le Commissaire divisionnaire Hubert Valard qui a rappelé que l’arme n’est que le vecteur et que le point important est le type de munition. Ainsi un projectile 22LR dégage in fine à l’impact une énergie égale à un projectile 9mm Parabellum blindé. C’est la charge de poudre qui fait le danger et il ne faut pas être faussement rassuré lorsqu’un agresseur utilise un fusil du commerce. L’utilisation de lance roquette en milieu clos paraît devenir un risque majeur (il a été signalé que les frères Kouachi même s’ils ne l’ont pas utilisé en possédaient un dans le coffre de leur voiture).

Le Dr Jean-Louis Daban de l’Hôpital d’Instruction des Armées Percy a détaillé la nature des lésions en fonction de la balistique. Il a insisté sur l’impossibilité de prévoir les dégâts internes notamment lors de l’utilisation de balles instables qui entraînent un effet de cavitation important.

La vitesse de la balle à l’impact est le facteur majeur, son poids jouant un rôle secondaire, les petites calibres à grande vitesse étant les plus létaux.

Les fusillades du 7 et 9 janvier à Charlie Hebdo et à l’Hyper-Cacher de Vincennes ont été présentées par le Dr Ramdani et le professeur Carli du SAMU de Paris et les Dr Clamai et Bignand de la Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris (BSPP). Mais c’est le témoignage du Dr Patrick Pelloux qui, avec le professeur Tourtier, Médecin chef de la BSPP, fut un des premiers sur les lieux, qui a été le plus poignant. Patrick Pelloux, urgentiste mais aussi chroniqueur à Charlie Hebdo a expliqué que devant l’horreur qu’il a découverte ses réflexes de médecin urgentiste lui ont permis de faire mécaniquement les gestes de survie comme poser des garrots avec des ceintures car à «  Charlie, on était pas trop cravates ». Mais dès que les blessés furent évacués il a été submergé par l’émotion dont il avait encore du mal à se remettre.

Le Dr Ramdani a expliqué que la méthode START (simple triage and rapid treatment) a été utilisée lors de la prise en charge des victimes et de l’évacuation après mise en condition rapide des 4 urgences absolues sans passage par un PMA vers des blocs opératoires préalablement alertés par le SAMU dans une optique de "damage control" pré hospitalier. On a ainsi respecté l’impératif de vitesse car le temps c’est de la vie (Time is life) chez des blessés à très fort potentiel hémorragique qui ont tous été dirigés vers des unités chirurgicales capables de réaliser les gestes d’hémostase ce qui a permis sans doute d’éviter des décès chez ces blessés très graves.

Le Professeur Carli quand à lui, s’est félicité de la bonne articulation des services de secours entre eux et avec les forces de l’ordre dans un contexte très contraint avec des risques de sur-attentat pour les soignants, des difficultés d’accès, de la pression médiatique et politique sans parler du risque d’attentats multi-sites. Il a insisté sur le fait qu’il fallait s’adapter à la situation et ne pas perdre inutilement du temps dans un PMA sans remettre cependant la doctrine française en cause.

Le poste méddical avancé. Secours collectifs-tactique Cahiers du SSSM

Pour ce qui est de l’Hyper-Cacher de Vincennes, la chaîne de secours habituelle a pu être mise en place et la médicalisation de l’avant a été assurée concomitamment par les médecins de la BSPP affectés à la Brigade d’Intervention de la préfecture de Police de Paris et ceux du RAID qui a donné l’assaut. Cet événement très médiatisé suivit en direct par toutes les chaînes d’information a donné lieu à la mise en place d’une chaîne de commandement intégré sous l’autorité du Préfet de Police de Paris. L’importance de la communication entre les différents services de santé a été mise en avant.

 ...et sur ceux de Liège, de Nanterre et de Toulouse

La réponse médicale lors des fusillades de Liège, de Nanterre et de Toulouse a été successivement détaillée par les Dr Stéphane Degèves, François Templier, Anne-Marie Arvis et Jean-Louis Ducassé. A chaque fois il a été souligné la nécessité de s’assurer de la sécurisation des lieux avant d’engager des secours médicaux pour éviter ce que les anglo-saxons appellent le « go and die  » pour les équipes de secours non protégées. Il convient aussi de s’approprier le contexte pour dimensionner correctement les moyens, de s’adapter en modifiant le schéma quotidien de régulation médicale d’acceptation des patients par les hôpitaux d’accueils mais en gardant à l’esprit que le bon patient doit être amené au bon endroit dans de bonnes conditions et surtout dans les meilleurs délais pour limiter les décès.

 Le principe du "damage control"

Le concept de "Damage control" a été présenté par les Professeurs Benoit Vivien et Jean-Pierre Tourtier. Le "damage control" chirurgical est une pratique de prise en charge de victimes en choc hémorragique traumatique dont le principe est une intervention chirurgicale de sauvetage en urgence limitées aux lésions abdominales dans un premier temps par une laparotomie écourtée et aux lésions thoraciques ou des membres présentant un risque vital. Le traitement chirurgical complet et définitif des lésions est réalisé secondairement après stabilisation des désordres hémodynamiques et de la coagulation.

Cette stratégie chirurgicale s’inscrit désormais dans un concept plus large de "damage control rescucitation" en unité de soins intensifs et de "damage control ground zero" pour la prise en charge en pré hospitalier.

Le terme d’abord associé à la première explosion nucléaire le 16 juillet 1945dans le Nouveau Mexique est devenu iconique après l’attentat du World Trade center et de fait doit être compris comme in situ, sur les lieux de l’évènement. Il s’agit de prendre immédiatement en compte la triade létale :

  • hypothermie - acidose – coagulopathie.
    Cela passe avant tout par un contrôle multifactoriel de l’hémorragie.
Choc hémorragique. Prise en charge en 2014
Damage control resuscitation (Dr Floccard)
Damage control resuscitation (Urgences pratiques 2011)
Intérêts et limites du damage control

Les modalités pré hospitalières ou phase "ground zero" consistent en une lutte contre l’hypothermie avec mise en place de couverture isotherme, un contrôle des hémorragies externes avec pose rapide d’un garrot, une stratégie d’hypotension permissive pour les hémorragies internes en évitant les perfusions massives délétères parce qu’elles aggravent le saignement et la coagulopathie et un recours rapide (éventuel) aux vasopresseurs si il y a un traumatisme crânien associé. La stratégie transfusionnelle a aussi évolué avec un apport précoce de facteurs de coagulation et de plaquettes voire de sang total. En pré hospitalier il y a lieu d’administrer rapidement des agents hémostatiques car les études montrent qu’il n’y a plus de bénéfice au-delà de 3 heures. L’utilisation de facteur VII activé reste malheureusement exceptionnelle en raison de son prix élevé mais est conseillée. La stratégie transfusionnelle la meilleure serait un ratio de concentré de globules rouges / plaquettes/ plasma frais congelé de 1/1/1.

 Garrot tactique et pansement hémostatique

L’hémostase de l’avant a été présentée par le Dr Travers de la BSPP ; elle découle de l’expérience acquise en Afghanistan et en Irak. L’utilisation large et précoce du garrot, abandonné depuis plusieurs dizaines d’année en pratique civile de peur de lésions secondaires, a permis chez les blessés de guerre de réduire significativement la mortalité quasi sans complications si le garrot est maintenu moins de 2 heures. Un nouveau type de garrot avec tourniquet est préconisé.

Par ailleurs plusieurs types de pansements imprégnés de produits hémostatiques ont été développés permettant un packing des plaies pour lesquelles la lésion hémorragique est non accessible au garrot.

 L’hôpital face aux victimes de fusillades

La fonction de coordination du parcours de soins des blessés lors de fusillades a été présentée par le Dr Jean-Sébastien Marx du SAMU75 et l’organisation de l’accueil par le Dr Mathieu Raux de l’hôpital La Pitié-Salpêtrière. Les points clés sont l’alerte précoce des salles de réveil et des blocs opératoires pour shunter le processus habituel d’admission et de confier ces victimes en état de choc hémorragique à l’équipe pluridisciplinaire composée des chirurgiens viscéraux et traumatologues et des radiologues interventionnels. Il faut aussi savoir parfois éviter de perdre du temps avec de l’imagerie qui risque de retarder le traitement et nuire au patient. L’organisation en cas d’afflux massif est facilitée par une équipe médico-technique affectée à chaque victime et portant pour chacun de ses membres une chasuble de la même couleur ce qui permet de rapidement identifier qui s’occupe de quel patient sans confusion.

Enfin le Dr Didier Cremniter, psychiatre référent national CUMP, a présenté un autre aspect de l’intervention des médecins hospitaliers lors de ces fusillades psychologiquement très traumatisantes pour les victimes, les impliqués, les familles... et les soignants. Les cellules d’urgences médico-psychologiques ont montré dans ce domaine leur pertinence. Pour la fusillade de Charlie hebdo la stratégie mise en place a été d’utiliser les services de l’Hôtel de Dieu pour la prise en charge en dehors du périmètre immédiat de la fusillade.

 Quand les urgentistes français se rapprochent des anglo-saxons

Cette journée très riche s’est conclue par une intervention du Commissaire divisionnaire Gilles Laborie qui a expliqué le dispositif d’intervention spécialisée du Ministère de l’Intérieur et ses spécificités parisiennes.

La gestion de ces crises doit se faire à la fois verticalement avec une information circulant du terrain vers les autorités centrales mais aussi horizontalement pour coordonner l’action entre les différents services intervenants.
A Paris et en petite couronne l’ensemble des moyens est sous les ordres du Préfet de Police directeur des opérations de secours, la BSPP est chargée d’organiser le tri, l’évacuation et d’une manière générale le secours aux victimes en collaboration avec les SAMU qui s’occupent de la régulation et du parcours de soins vers les hôpitaux. Les périmètres de sécurité, la matérialisation des itinéraires pour faciliter l’évacuation des victimes et l’acheminement des renforts relèvent du commandant des opérations de police et de circulation. Et c’est le commandant des opérations de police judiciaire et ses collaborateurs, après avoir avisé le Procureur de la République, qui procède à l’identification et l’enregistrement des victimes et des témoins et procède aux premières investigations judiciaires. Les interventions sont réalisées soit par la BRI, le RAID et ses antennes en province ou le GIGN et les pelotons d’interventions interrégionaux de la Gendarmerie chacun en fonction de sa compétence territoriale. Pour les forces de l’Ordre, l’intervention est considérée comme une urgence absolue lors d’une tuerie en cours et relative pour les autres cas lorsque le dispositif peut se mettre en place.

Le Professeur Bertrand Ludes, récemment nommé à la tête de l’Institut de Médecine Légale de Paris a mis en perspective l’approche médico-légale qui vise à déterminer le plus exactement possible les causes exactes du décès à travers une analyse précise des lésions et les conditions et la chronologie dans lesquelles les tirs sont opérés. Bertrand Ludes a insisté sur le rôle nouveau dans l’analyse balistique de l’imagerie post-mortem en particulier la scannographie.

Une fois de plus la Société Française de Médecine de Catastrophe
a su, sous l’impulsion du Médecin Général Henri Julien, son dynamique président, réunir un panel de spécialistes autour d’une actualité brûlante mais riche en enseignements.

Au total, il faut surtout retenir la nécessité pour les forces de l’ordre et les services de secours de travailler ensemble chacun devant connaître les impératifs de l’autre pour éviter que ces situations ne dégénèrent en drames absolus.

On voit aussi que de plus en plus les médecins urgentistes français se rapprochent des anglo-saxons avec des modalités de réanimation préhospitalière initiales limitées aux gestes de survie pour être "just in time" c’est à dire pas plus de 10 minutes de prise en charge sur les lieux et en moins de 20 minutes au bloc opératoire avec un transport rapide vers une structure chirurgicale adaptée.

  • Dr Francis Leroy (jim.fr)
  • Références
    1) Tourtier JP, Pelloux P, Dang Minh P, Klein I, Marx JS, Carli P. Charlie Hebdo attacks : lessons from the military milieu. Am J Emerg Med 2015 http://dx.doi.org/10.1016/j.a.jem.2015.03.026
    2) Tourtier JP, Palmier B, Tazarourte K, Raux M, Meaudre E, Ausset S et coll. : Le concept de damage control : extension préhospitalière du paradigme. Ann Fr Anesth Reanim 2013 ; 32 :520-6

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Un rapport de 2007 réalisé par l’Institut Universitaire des Hautes Etudes Internationales de Genève, estimait qu’il y aurait entre 650 et 850 millions d’armes de poing sur Terre. En tête, arrivent les Etats-Unis avec pratiquement une arme par habitant (soit près de 290 millions d’armes). Viennent ensuite le Yemen (61 millions), la Finlande (56 millions), la Suisse (46 millions) et l’Irak (39 millions). La France est comparable à de nombreux pays européens avec en moyenne 32 armes pour 100 habitants soit environ 20 millions d’armes.

A voir le site non officiel sur la police scientifique


Quand les fabricants d’armes américains flambent en bourse…

06/10/2015 , bfmbusiness.bfmtv.com- Antoine Larigaudrie

Situation a priori paradoxale, c’est précisément au moment où la classe politique américaine réfléchit à un encadrement plus sévère des ventes et de l’utilisation d’armes à feu, que les titres des grands armuriers explosent à la bourse. Et ce n’est sans doute pas près de s’arrêter.

Séance faste lundi soir pour les grands fabricants américains d’armes à feu. Le plus célèbre d’entre eux, Smith & Wesson, a gagné 7.3%, suivi de près par un autre grand nom du secteur, Sturm & Ruger, qui a pris 2.7%. Une montée en flèche qui ne date pas d’hier, puisque depuis le début de l’année ces deux titres grimpent respectivement de 80 et 70%.

C’est particulièrement spectaculaire sur Smith & Wesson, si on regarde sur le long terme. Depuis le 1er janvier, il signe la meilleure performance de tout le S&P500, juste derrière Netflix. Et sur 5 ans, le titre du fabricant présente un retour sur investissement de 320%, le double de celui d’Apple !

Un symbole de l’Amérique

Comment expliquer la hausse, forte et continue, de ce secteur particulier en bourse ? Déjà parce qu’aux Etats-Unis, il est considéré comme un investissement qui résiste à peu près à tout, et qui est un peu un symbole de l’Amérique, tout comme PepsiCo, Coca-Cola, Philip Morris ou Harley Davidson.

Ensuite parce que malgré un taux d’équipement plus que convenable sur le papier (entre 300 et 400 millions d’armes pour autant d’habitants), et malgré une accélération notable des tueries de masse aux Etats Unis ces 20 dernières années, même dernièrement dans l’Orégon, la frénésie des achats d’armes ne se tarit pas.

Les effets pervers d’un durcissement réglementaire

Et ce malgré un environnement réglementaire qui pourrait changer sous peu. La preuve, ce sont les récentes déclarations d’Hilary Clinton, en faveur d’un durcissement de la législation, qui ont cet effet très sensible et pourtant paradoxal sur le cours des fabricants d’armes.

Déjà parce qu’à court terme, toute tentative de limiter la vente ou l’usage de ces armes va avoir un effet totalement inverse : tout le monde va se ruer chez son marchand d’armes le plus proche pour s’en procurer le plus possible, avant que les lois ne changent.

Le sacro-saint 2ème Amendement

Deuxièmement, l’histoire américaine l’a montré, malgré les 30 000 décès par arme à feu recensés aux Etats Unis annuellement, et la recrudescence des massacres de masse ces derniers mois, toute les tentatives de mieux contrôler les armes se sont heurtées à une barrière jusque-là infranchissable : le 2ème Amendement à la Constitution des Etats-Unis.

Ce dernier rend de fait toute limitation impossible, car il garantit au plus haut niveau la possession d’armes à feu dans le pays. Certes soumise à certaines restrictions réglementaires, mais rien ne saurait entraver le droit de chaque américain à posséder une arme.

Les armes en bourse : une martingale ?

Les actions des fabricants d’armes sont donc sans doute les plus parfaits des produits spéculatifs à la bourse américaine. Car ils permettent de jouer à court terme l’effet de panique sur les ventes quand la classe politique veut légiférer avant les élections, et la poursuite de la hausse quand on constate qu’aucune nouvelle restriction n’est possible !

C’est donc une sorte de cagnotte permanente et renouvelable, et particulièrement depuis l’arrivée de l’administration Obama. Elle a souhaité de manière continuelle durcir la législation sans vraiment y arriver, entretenant le phénomène.

Des ventes au plus haut historique

Et malgré les milliers de morts chaque année et une classe politique très remontée, fort peu d’analystes en sont à craindre un éventuel effet négatif sur les ventes d’armes de poing, au contraire.

Pour Smith & Wesson, on sort d’un record absolu en matière de ventes annuelles sur 2014, à 626 millions de dollars, et Sturm & Ruger reste proche de ses niveaux de ventes historiques de l’année 2013. 2015 s’annonce donc comme une année encore florissante à ce niveau...

Fabricant d’armes à feu page wikipedia


Les professionnels de santé au chevet d’une France tétanisée

Publié le 14/11/2015

Dans la nuit de chaos, les blouses blanches deviennent les remparts d’un monde soudainement frappé dans la tranquillité d’un vendredi soir. A 22h30, ce 13 novembre, alors que le Stade de France et l’est de Paris étaient touchés par plusieurs attentats, qui à l’heure où nous écrivons ces lignes ont fait 128 morts et 250 blessés dont une centaine sont dans un état très grave, le plan blanc était déclenché par l’Assistance publique des hôpitaux de Paris (AP-HP).

Le plan blanc permet de mobiliser l’ensemble des ressources hospitalières afin de répondre à une situation de crise. Ainsi, les soins non urgents sont déprogrammés, des lits supplémentaires sont ouverts et les équipes habituelles sont renforcées grâce au rappel des professionnels en repos.
Solidarité immédiate

Au-delà de cette organisation de crise, hier, en Ile-de-France, cinq établissements, dits "trauma center" étaient plus certainement mobilisés : Lariboisière (Xe), Beaujon (Clichy), Bichat (XVIIIe) et plus encore Georges Pompidou (XVe) et la Pitié-Salpêtrière (XIIIe) ont accueilli les blessés les plus graves, tandis que les victimes moins atteintes étaient dirigées vers d’autres structures. Sur place, les équipes de secours et les pompiers ont pu être soutenus par des professionnels de santé comptant parmi les rescapés (lire le récit du docteur Arnaud Jannic ci dessous).

Un interne témoigne

Arnaud Jannic est interne à Saint-Louis en dermatologie depuis le début du mois. Le bar Le Carillon est situé à quelques pas de l’Hôpital Saint-Louis.

"On sortait du boulot, et on voulait prendre un verre entre internes et chefs : « Rendez-vous au Carillon ». J’ai rejoint les premiers arrivés, m’étonnant que nous n’ayons pas pris de table en terrasse alors qu’il faisait bon. La soirée se passait bien, on faisait connaissance en ce début de semestre. Je venais de payer "ma tournée" ! Il me restait un peu de bière. Nous avons entendu des « pa-pa-pa » comme des pétards, puis un peu d’agitation. De là où nous étions nous ne voyions pas la terrasse, dans un recoin. Puis la panique, des gens qui courent. On s’allonge tous par terre et nous commençons à entendre des hurlements, des pleurs, des gens qui nous crient de rester allonger. Je n’ai pas compris tout de suite, et je me suis dit « nous sommes tous allongés, une quarantaine, si il rentre et tire, on est tous morts ». Je ne retrouvais pas mon co-interne : « Marc, t’es où ? ». Après les tirs, nous sommes allés à l’avant du bar : des corps partout. Mon chef et mon co-interne ont massé un corps, déjà pâle, pendant des dizaines de minutes. Je me suis occupé de Jack, un étudiant aux Beaux Arts qui s’était pris une balle dans le thorax.

Les pompiers ont été les premiers à arriver et nous ont appris que plusieurs endroits dans Paris avaient étés touchés.

"Arrêtez les mecs, il est mort "

Progressivement, les choses ont semblé s’organiser, la police est arrivée. J’ai continué à m’occuper de Jack. Un de mes co-internes a couru jusqu’à Saint-Louis, tout proche, chercher de la morphine. J’avais très envie de pisser. Une des internes, partie quelques minutes avant la fusillade est revenue dans le bar « j’ai vu le mec tirer ». Peu après, mes collègues ont arrêté de masser : « arrêtez les mecs, il est mort », le corps a été évacué.

J’ai commencé à envoyer quelques textos, j’ai entendu un policier « quarante morts au Bataclan ! ». On a installé Jack, il avait des bonnes constantes, on lui a mis de l’oxygène avant qu’il soit évacué. Tous les autres blessés étaient gérés à ce moment-là… J’ai pu aller aux toilettes ! Quelqu’un m’a donné une cigarette. J’étais complètement hébété. Devant le bar, j’ai failli marcher sur les corps, j’ai levé les yeux, des centaines de douilles par terre et compté : « un, deux, trois »… une dizaine de corps. La situation semblait vraiment gérée.

Un flic nous interroge :

« Vous avez vu quelque chose ?

 On est internes.

 Vous allez être réquisitionnés pour médicaliser un transport »

Ma co-interne est partie plus tard témoigner au 36 quai des Orfèvres. Avec un des internes nous avons accompagné deux blessés légers dans un camion de pompier jusqu’à Begin. Un médecin militaire nous a accueillis « vous êtes internes ? Mettez-vous dans le coin… Aidez-nous ! ». Plus tard un médecin-chef : « on va peut-être avoir besoin de bras ». Les blessés arrivaient sur des brancards, 6 ou 7, triés les uns après les autres. Puis les légionnaires sont arrivés pour aider, faire "les bras". Le médecin-chef nous alors dit qu’on pouvait rentrer "à la maison".

On nous laisse rentrer à pied, souillés de sang, flageolants. Un taxi a refusé de nous prendre, nous sommes rentrés en métro.

J’ai pris mon co-interne Marc, dans mes bras : « tu m’appelles, hein ? »

Arnaud Jannic

De nombreux témoignages affluent pour souligner que la solidarité a souvent été la première réponse à cette barbarie aveugle. Ainsi, un médecin vivant dans un immeuble situé à une centaine de mètres du Bataclan est immédiatement descendu pour apporter son aide. Parallèlement aux soins urgents délivrés à des patients présentant des blessures de guerre, des cellules d’aide psychologique ont également été rapidement mises en place, notamment à l’Hôtel Dieu, ainsi qu’à la mairie du XIe arrondissement pour accueillir les spectateurs du Bataclan.
Levée de la grève

Face à l’indicible, très vite, avant même minuit, les syndicats de médecins libéraux annonçaient la levée de la grève et de l’ensemble des actions prévues ce week-end pour protester contre le projet de loi de santé. La Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) a également tenu à exprimer sa solidarité avec les hôpitaux publics.

La mobilisation de l’ensemble du système de soins sera essentielle dans les prochains jours, notamment parce qu’il est important que les urgences non vitales puissent être traitées en dehors des structures hospitalières, afin de permettre à ces dernières de se concentrer sur la prise en charge des blessés. Nous reviendrons évidemment sur ces événements dans nos prochaines éditions.

Aurélie Haroche
jim.fr


Attentats : la réponse médicale des urgentistes, anesthésistes et chirurgiens de l’AP-HP relatée dans le Lancet

Publié le lundi 7 décembre 2015

La réponse médicale aux attaques terroristes du 13 novembre à Paris a été relatée dans The Lancet mardi 24 novembre, à travers le vécu de l’urgentiste, l’anesthésiste et le chirurgien traumatologique, au sein de l’Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP).

L’article, publié sous forme de « Viewpoint », est signé notamment par Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP, et les Prs Pierre Carli (médecin-chef du Samu de Paris, chef du service d’anesthésie-réanimation de l’hôpital Necker-Enfants malades), Rémy Nizard (chef du service de Chirurgie orthopédique et traumatologique de l’hôpital Lariboisière), Bruno Riou (chef du service des urgences de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière), au nom des professionnels de santé de l’AP-HP.

Une vague de six attentats simultanés, revendiquée par l’organisation Etat islamique, a frappé Paris et Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) le 13 novembre, rappelle-t-on. Le dernier bilan officiel fait état de 130 morts et plus de 350 blessés.

Les auteurs de l’article soulignent à quel point la rapidité de mobilisation des équipes, leur spontanéité et leur professionnalisme ont été des éléments-clés dans la réponse médicale apportée. « A aucun moment pendant l’urgence, il n’y a eu de pénurie de personnel », malgré l’afflux croissant de victimes. « Nous pensons que malgré le nombre sans précédent de blessés, les services disponibles étaient loin d’être saturés ».

Dans les minutes qui ont suivi les attentats suicides au Stade de France, l’équipe de régulation de crise du Samu de Paris a commencé à envoyer sur place du personnel médical de ses huit unités et de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris. Dans le cadre du plan blanc, activé à 22h34 -environ une heure après que l’AP-HP a été alertée des premières explosions au Stade de France-, 45 équipes du Samu et des pompiers ont été réparties sur les différents sites, et 15 équipes ont été gardées en réserve, afin d’éviter une saturation précoce des services.

Au total, 256 patients ont été transférés en sécurité et traités dans les hôpitaux. Les autres, capables de se déplacer, s’y sont rendus par leurs propres moyens. Trois infarctus ont été pris en charge. « Au milieu de la nuit, plus de 35 équipes chirurgicales étaient intervenues sur les blessures les plus graves ».

Les blessures, essentiellement par balles, ont été prises en charge en pré-hospitalier afin de délivrer le plus rapidement possible une chirurgie hémostatique. Malgré cela, quatre des cinq personnes touchées à la tête ou au thorax sont décédées.

Pour les blessures non létales, l’objectif était de maintenir une pression artérielle la plus basse possible sans perte de conscience (en moyenne 60 mmHg) -au moyen notamment de garrots, vasoconstricteurs et antifibrinolytiques- et de prévenir l’hypothermie, plutôt qu’avoir recours au remplissage vasculaire. « La demande de garrots était si élevée que les équipes mobiles sont revenues sans leurs ceintures », témoignent les auteurs.

Les blessés ont ensuite été transférés par les équipes de réanimation mobiles vers les centres de prise en charge des traumatismes ou les hôpitaux les plus proches -notamment Saint-Louis et Saint-Antoine. Afin d’éviter l’engorgement de l’accueil des urgences, le triage des blessés a aussi été réalisé aux entrées principales des hôpitaux.

La capacité des blocs quintuplée à la Pitié-Salpétrière

A la Pitié-Salpêtrière, l’un des cinq centres civils de prise en charge des traumatisés graves de niveau 1 de l’AP-HP impliqués en cas d’attaque terroriste, une salle de déchocage est installée au sein de la salle de réveil post-anesthésie de 19 lits, précisent les auteurs.

La capacité habituelle pour les interventions chirurgicales urgentes est de deux blocs opératoires et peut être augmentée à trois blocs en cas de prélèvements multi-organes. Après l’activation du plan blanc, mais aussi la mobilisation spontanée et rapide des médecins et infirmiers, 10 blocs opératoires ont pu être ouverts, soulignent les auteurs. Les urgences absolues autant que les urgences relatives ont pu être traitées.

« Le nombre de patients admis était bien au-delà de ce que nous pouvions imaginer pouvoir traiter dans le même temps ». Malgré cela, « les ressources disponibles n’ont jamais été inférieures aux besoins ». Cela s’explique d’abord parce que les patients sont arrivés très rapidement, par petits groupes de quatre ou cinq, grâce au travail préparatoire réalisé depuis plusieurs mois en prévision d’un acte terroriste. Les anesthésistes et chirurgiens du centre sont entraînés à traiter ce type de traumatismes par balles.

En outre, avant l’arrivée des premiers patients, la salle de réanimation post-chirurgicale a été vidée de ses autres patients et des lits ont été mis à disposition dans plusieurs unités médicales et chirurgicales, ce qui a permis aux blessés d’être directement admis dans les services après la chirurgie, libérant la salle de déchocage pour un nouveau patient.

« Un élément-clé a été l’excellente coopération de tous les soignants sous la supervision de deux leaders en traumatologie dans l’unité de déchocage et d’un responsable de l’allocation des blocs opératoires, qui n’étaient pas directement impliqués dans la prise en charge des patients et ont continuellement communiqué entre eux et régulièrement collecté les informations sur la cohorte entière des patients blessés ». La direction de l’hôpital a également pu immédiatement fournir le soutien logistique.

« Neuf heures seulement après l’évènement, nous avons pu réduire le nombre de blocs opératoires à six et renvoyer chez eux certains des personnels les plus exténués. Dans les 24 heures, toutes les interventions urgentes (absolues et relatives) avaient été réalisées et aucune victime n’était encore dans le service des urgences ou l’unité de déchocage ».

Le premier patient opéré dans la demi-heure à Lariboisière

Du côté du chirurgien, à l’hôpital Lariboisière « le premier patient gravement blessé a été opéré dans la demi-heure suivant son admission ». Grâce aux professionnels venus spontanément prêter main forte, deux blocs opératoires ont été ouverts pour la chirurgie orthopédique, un pour la neurochirurgie, un pour la chirurgie ORL et deux pour la chirurgie abdominale.

« Durant la première nuit, nous avons opéré en continu. Le samedi 14 novembre, l’équipe de chirurgie orthopédique a été aidée spontanément par deux autres équipes. [...] Dimanche 15 novembre, les services habituels ont repris leur cours ».

La totalité des patients pris en charge dans cet hôpital, excepté un, avaient moins de 40 ans, observent les auteurs. Tous avaient reçu des traumatismes par balles. Les fractures des membres supérieurs ont été traitées par des fixations externes en raison de leur nature ouverte et de la perte d’une quantité importante de tissu osseux. Parmi les lésions nerveuses, fréquentes, une seule a été réparée, les autres nécessiteront une reconstruction secondaire.

« Le professionnalisme a été présent à tous les niveaux. Alors que le bloc opératoire est souvent décrit comme un endroit difficile –où le facteur humain est crucial-, durant ce « stress test » les difficultés ont disparu, travailler ensemble est apparu fluide et même harmonieux. La confiance et la communication entre différentes spécialités et différents postes étaient visibles. L’objectif commun était si clair qu’aucune partie prenante n’a essayé d’imposer une vue individuelle ».

the medical response to multisite terrorist attack in Paris

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En marge : Suite au congrès Urgences 2016, qui s’est tenu du 01 au 03 juin, au Palais des congrès, place de la porte Maillot, Aubry St Cast, IADE de l’équipe SMUR Avicenne du SAMU 93, détaille les raisons ayant mené à la réalisation de leur étude intitulée « Présence des étudiants infirmiers-anesthésistes en cas d’intervention SMUR dans un contexte d’attentat terroriste  ».

Cette étude, présentée le 1er juin 2016, par Sounkarou Macalou, étudiante IADE au sein de l’équipe SMUR du 93, fait suite aux attentats du mois de novembre et s’intéresse à la place des étudiants infirmiers-anesthésistes (IADE) dans les équipes du SMUR en cas d’évènements de ce type.

Quelle place pour les étudiants infirmiers-anesthésistes dans un contexte d’attentat terroriste

Le bilan officiel : 130 morts et de 413 blessés...66 millions de victimes

 13-11-2015 en live avec un PS de BSPP quelques minutes après le début des attentats

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 Cette vidéo réalisée par Alain A. rend hommage de façon très émouvante, a La Brigade des Sapeurs-Pompiers, le SAMU, la Croix-Rouge Française et sans oublier Les Forces de l’ordre, lors des attentats du 13 Novembre 2015, à Paris.
La bande son est le chant officiel de la BSPP (Chœur et musique de la BSPP) ainsi que des enregistrements audios lors attentats.

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 Attentat du vendredi 13 novembre. Intervention du président de la république française

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 Attentat au Bataclan : reconstitution des faits


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 Attentat à Pairs, les soldats de l’urgence en première ligne


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 Prise en charge du blessé balistique

Le RETEX : retour d’expérience

C’est un système qui contribue à l’amélioration de l’outil professionnel en participant à son évaluation au contact des réalités et en proposant des
solutions aux déficiences constatées.

Le RETEX a pour fonction de rechercher des informations émanant des opérations ou des exercices, de les exploiter pour les traduire en enseignements qui conduiront à des adaptations.

 Les retex (retour d’expérience) du 13 novembre 2015, sont importants. Les voici.

C. BAILLY - 160120_Retex Zone Ouest
C_Leroy_Listes victimes
Ch. LEROY - P. MAISANI - Retex_mins _20 janvier_Plan blanc version finale
Ch. PUGET - Retex Attentats - Suivi des hospitalisés - CP
Diane MARTINEZ - RETEX Ministère 20 01 16
Didier Cremniter RG
Fr. DUCROCQ CUMP 59 Attentats 13 novembre XI RETEX GLOBAL 20 janvier
JC RIGAL-SASTOURNE - Identito attentat 13-11.V2
JJ CHAVAGNAT - RETEX 20 01 2016 Dr Jean Jacques CHAVAGNAT
JP FONTAINE - RETEX Prise en charge hospitalière près du lieu de l’attentat
JP TOURTIER - Min Santé Tourtier
M. GENTILE - RETEX 20 JANVIER Prise en charge hospitalière - enjeux de la coordination régionale - janvier 2016 (5)
M. MEUNIER - présentation CIAV RS
M. RAUX - 2016 Ministère RETEX 13 novembre 2015
N. DANTCHEV - Retex 20 janvier 2015 - Prise en charge des impliqués. Plan blanc psychiatrie
O. BRAHIC - Chronologie et Acteurs_VF
O. BRAHIC - RETEX la coordination de la phase aiguë
P.CARLI RETEX SAMU 75
Pierick Bergeran - Renforts CUMP extra zonaux
Roch JOLY Retex Renfort Zone Nord nov 2015 Attentats Paris
Th. BAUBET - 2016.01.20 Prise en charge des intervenants RETEX DGS
VUILLAUME_ Urgence Médico Psy
RETEX de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris
Retex des attentats. Quels enseignements. Du plan NOVI au plan multi site attentats. (Braun Carli-Tourtier-Chanzy)
Retour d’expérience des attentats du 13 novembre 2015, innovations p. 70
Retour d’expérience des attentats du 13 novembre 2015. Gestion de l’attaque terroriste du Bataclan par les médecins d’intervention de la Police Nationale p.3
Retour d’expérience des attentats du 13 novembre 2015. La régulation médicale zonale p. 16
Retour d’expérience des attentats du 13 novembre 2015. Organisation des renforts par les Samu de province p. 62
Retour d’expérience des attentats du 13 novembre 2015. Prise en charge médicale préhospitalière p. 13
Retour d’expérience des attentats du 13 novembre 2015. Prise en charge psychologique hospitalière des impliqués p. 55
Retour d’expérience des attentats du 13 novembre 2015. Prise en charge secouriste et interactions avec les équipes médicales p. 9
Retour d’expérience des attentats du 13 novembre 2015. Rôle de deux hôpitaux d’instruction des Armées p. 39
Retour d’expérience des attentats du 13 novembre 2015. Rôle d’un hôpital disposant d’un centre de traumatologie p. 22
Retour d’expérience des attentats du 13 novembre 2015. Rôle d’une cellule de crise hospitalière p. 47
Retour d’expérience des attentats du 13 novembre 2015. Rôle spécifique des hôpitaux de proximité p. 31

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Deux autres Retex intéressants.

 Commission de la défense nationale et des forces armées

  • Mercredi 16 décembre 2015
  • Séance de 10 heures
  • Compte rendu n° 29
  • Présidence de Mme Patricia Adam, présidente

Audition du général Philippe Boutinaud, commandant la brigade de sapeurs-pompiers de Paris

Commission de la défense nationale et des forces armées. Audition du général Philippe Boutinaud, commandant la brigade de sapeurs-pompiers de Paris

Attentats de Paris : l’assaut du Bataclan, raconté heure par heure

Enfin, à lire sur les retex

Retour d’expérience, guide méthodologique (Situations d’urgence sanitaire et exercices de simulation) 2019
Ne pas rater le retour d’expérience. (Patrick Lagadec, Mathieu Langlois)

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RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION D’ENQUÊTE relative aux moyens mis en œuvre par l’État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier 2015 M. Georges FENECH Président - M. SÉBASTIEN PIETRASANTA Rapporteur

RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION D’ENQUÊTE relative aux moyens mis en œuvre par l’État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier 2015 M. Georges FENECH Président-M. SÉBASTIEN PIETRASANTA Rapporteur

Le rapport présente 434 pages sur les attentats en France en 2015. Et mille pages d’annexes (les auditions).

Parmi les points mis en évidence, le document met clairement en lumière les "ratés " qui ont permis aux terroristes de Paris d’échapper à la surveillance. Ils étaient pourtant connus, à un titre ou un autre, des services judiciaires, pénitentiaires ou de renseignement. Tous avaient été fichés, contrôlés, écoutés ou incarcérés, à un moment de leur parcours de la délinquance à la radicalisation violente.

Voici les principaux constats de la commission :

Pour la création d’une "agence de lutte contre le terrorisme"

Pour éviter de nouvelles attaques, la commission prône notamment la création d’une "agence nationale de lutte contre le terrorisme" placée directement sous l’autorité du Premier ministre, sur le modèle américain du Centre national antiterroriste (NTC) créée après le 11 septembre 2001.

La nécessité de fusionner les trois forces d’élite

Le soir du 13 novembre, "l’intervention des forces d’intervention a été rapide, efficace et a démontré qu’elles étaient capables de collaborer", estime le rapporteur, le député socialiste Sébastien Pietrasanta qui s’interroge toutefois sur "le bien-fondé du maintien de plusieurs forces d’intervention spécialisées" et préconise, à terme, "la fusion des trois forces d’élite" (GIGN, Raid et BRI).

Pour la création de "colonnes d’extraction" des victimes

Le principal problème, selon la commission, a été l’évacuation des victimes, qui a pu être retardée par le fait que les secours d’urgence n’avaient pas accès au périmètre des forces d’intervention. Dans ses 39 propositions, la commission préconise ainsi l’instauration de "colonnes d’extraction" des victimes en zone d’exclusion. Ces colonnes seraient constituées de secouristes et d’agents des forces de l’ordre. Améliorer la formation des professionnels de santé à la médecine de guerre et celle de la population aux gestes de premiers secours figurent également parmi les préconisations de la commission d’enquête. Dans la lignée de recommandations précédentes, les parlementaires invitent en outre à généraliser le système d’information numérique standardisé pour l’identification des victimes qui a été un des principaux points négatifs de la gestion des attentats. Parallèlement à la publication de ces recommandations, le secrétaire d’Etat chargée de l’Aide aux victimes, Juliette Méadel a indiqué que les personnes reconnues victimes verraient leurs soins pris en charge intégralement, c’est-à-dire au-delà du tarif de la Sécurité sociale. Ces déclarations font suite à la prise de parole d’une victime témoignant de ses difficultés à obtenir une carte d’invalidité. Face à ce témoignage, Juliette Méadel a affirmé que les services administratifs mettaient tout en œuvre pour faciliter les démarches des patients.

L’échec du renseignement

Pour la création d’une agence nationale du renseignement

Des failles dans le renseignement pénitentiaire

L’attaque du Bataclan n’aurait pas pu être évitée

Des doutes sur l’efficacité des dispositifs de sécurisation du territoire


Les terroristes sont-ils fous ?

M. Cheour, , F. Fekih-Romdhane, L. Chenouffi

M. Cheour et coll proposent une revue de la littérature sur les aspects psychopathologiques des terroristes commettant un attentat suicide.

Le terrorisme-suicide est la forme la plus meurtrière de terrorisme. C’est la seule forme de combat où l’attaquant envisage des actions extrêmes dans lesquelles il ne prévoit pas de survivre à la mission. Le mode opératoire adopté est difficilement explicable, car l’attaquant décide avec détermination de se suicider en même temps qu’il décide de tuer

Le profil des terroristes suicidaires

Il s’agit généralement d’hommes jeunes, occupant un bon emploi, mariés dans 73 % des cas, sans passé criminel, sans antécédent psychiatrique, ni trouble de personnalité particulier. En effet, les recruteurs de futures bombes humaines écarteraient d’emblée les personnes d’allure mentalement instables.

Cependant, cela a été contredit par d’autres études montrant qu’un grand nombre de kamikazes que la police avait arrêté après échecs de leurs attentats-suicides étaient mentalement déséquilibrés ou cognitivement déficients. Pour sa part, Merari (Terror polit violence, 2009) a retrouvé des symptômes dépressifs chez 53 % des 15 kamikazes interceptés avant un attentat (13 % d’entre eux ayant déjà fait une tentative de suicide). Cependant, plusieurs études, dont celle de Hassan (New Yorker, 2001) affirment que les terroristes suicidaires ne sont pas en réalité cliniquement suicidaires.

Mais, il n’y a aucune preuve probante étant donné l’absence d’utilisation d’outils d’évaluation structurés et systématiques.

La genèse du terroriste suicidaire semble être multifactorielle. L’étude du profil psychopathologique des terroristes suicidaires devrait avoir des implications cliniques et préventives.

Dr Alexandre Haroche (jim.fr) Copyright © 2015 Published by Elsevier Masson SAS

RÉFÉRENCES
Cheour M et coll. : Le profil des terroristes suicidaires.
7ème Congrès français de psychiatrie (Lille) : 25 - 28 novembre 2015.


NDLR : Je ne m’associe pas à ce traitement du dr Bonnot, sachant qu’il est toujours facile à posteriori de critiquer la prise en charge d’une situation totalement inédite. Les professionnels dépêchés sur les lieux, ont fait au maximum de leur capacité. Il n’est pas question ici d’émettre le moindre doute à ce propos.

Pour autant, pour un traitement le plus impartial possible, il est licite d’écouter les questions posées.

§§§

Après les attentats du 13 novembre, le rôle des secours remis en question

Robin Panfili publié le 29.02.2016 source : slate.fr

Les autorités ont salué l’efficacité de la prise en charge des victimes des attaques. Mais d’autres voix se font entendre et pointent des « défaillances » et des « dysfonctionnements ».

Un peu plus de trois mois après les attentats du 13 novembre 2015, les travaux de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur la lutte antiterroriste se poursuivent. Après une première table ronde, le 15 février, lors de laquelle des victimes et des proches de victimes ont fait part de leurs critiques sur la prise en charge et la communication maladroite (voire défaillante) des autorités, c’est le rôle des établissements médicaux qui était discuté en table ronde, lundi 19 février 2016.

Jean-Marc Debonne, médecin général des armées et directeur central du service de santé des armées (SSA), y a salué « l’engagement, le dévouement et la compétence des personnels du SSA, qui ont fait preuve d’une exceptionnelle réactivité et d’une efficacité difficilement égalable dans un tel contexte ». En soulignant la prise en charge des blessés physiques et psychiques, Jean-Marc Debonne signale que ses services ont « tout mis en œuvre pour apporter aux victimes une prise en charge visant à préserver leur survie et, le cas échéant, de moindres séquelles physiques et psychiques ».

Martin Hirsch, directeur général de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), s’est lui attaché à saluer la « force » des établissements médicaux parisiens et leur rapide mobilisation. « À aucun moment il n’y a eu un manque de personnel » dans les hôpitaux ni dans les heures qui ont suivi les attaques, ni dans les jours qui ont suivi, a-t-il insisté.
Un scénario, plusieurs versions

À plusieurs reprises, les autorités ont souligné la réactivité des secours dans la prise en charge des victimes des attaques terroristes. Devant la commission de la Défense de l’Assemblée nationale, le 16 décembre 2015, le général Philippe Boutinaud, chef de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, attribuait le succès de l’opération à « l’organisation », « l’anticipation » et aux « décisions » des secours :

« Il n’y a pas eu de dysfonctionnement important au regard de l’ampleur des missions à remplir. [...] Nous avons été efficaces le 13 novembre dernier, et il aurait été difficile de faire mieux. Il ne s’agit pas d’une autocélébration et nous devons nous pencher non pas sur la guerre que nous venons de vivre, mais sur la prochaine. »

Dans un article publié dans la revue médicale The Lancet, dix jours après les attentats, Martin Hirsch, Pierre Carli (médecin-chef du Samu de Paris) et plusieurs médecins dressaient un constat similaire : « Il n’y a eu aucun manque de coordination, aucun retard, aucune limite n’a été atteinte. »

Pourtant, cette présentation des opérations ne fait pas l’unanimité. Georges Salines, président de l’association de victimes 13 novembre : fraternité et vérité, a raconté à Mediapart le retour d’expérience organisé par le ministère de la Santé, auquel il a pu participer le 20 janvier :

« Nous n’y avons pas été conviés, nous avons dû nous imposer. Nous avons écouté une suite de discours apologétiques, autosatisfaits. [...] On voit bien que l’ensemble des dispositifs, policiers ou médicaux, ont été dépassés. Pourtant, ce qui s’est passé était prévisible. »

Un « conflit de pouvoir »

Le rôle des secours a-t-il été aussi efficace que ce que prétendent les autorités ? Dans son enquête, Mediapart liste (et nuance) les « dysfonctionnements ». Pourquoi le Samu est-il passé à côté de La Bonne Bière, où cinq personnes ont été tuées ? Pourquoi a-t-il mis autant de temps à intervenir à La Belle Équipe, où dix-neuf personnes ont trouvé la mort ? Pourquoi les pompiers n’y ont-ils pas envoyé de médecins ? Contactés par Mediapart, les principaux intéressés ont décliné tout commentaire :

« Ces dysfonctionnements devraient pourtant être analysés, afin que des améliorations soient apportées, écrit le site. Ils sont pour l’instant largement niés. »

L’enquête aborde les problèmes de communication et de coordination entre les deux systèmes de secours, les pompiers et le Samu –des militaires et des hospitaliers– entre lesquels règne un « très vieux conflit de pouvoir » et « parfaitement connu ». Dans les faits et dans de telles circonstances, les pompiers et le Samu doivent s’entendre sur les moyens de secours à envoyer pour être le plus rapide et le plus efficace.

Mais, le soir des attentats, « ce système complexe n’a pas fonctionné », note le site. La cellule de régulation du Samu, qui a dû s’en remettre à des tableaux blancs plutôt qu’à l’informatique, est particulièrement visée. Mediapart parle d’une « gestion de crise artisanale ».

Des secours sous-équipés

Riverain de La Bonne Bière et de La Casa Nostra, près de la place de la République, le docteur Michel Bonnot, anesthésiste-réanimateur, est arrivé sur les lieux très rapidement. Dans deux interviews données juste après les faits à RTL puis au Quotidien des médecins, il raconte son sentiment d’impuissance, même après l’arrivée des pompiers :

« Il n’y avait rien ! Seulement de l’oxygène, des couvertures de survie et des garrots pour les membres. Même pas de morphine pour les blessés qui hurlaient de douleur. »

Pour Michel Bonnot, certains blessés auraient même pu être sauvés avec un minimum de soins et davantage de matériel :

« Je dirais que tous les blessés graves de la Fontaine-au-Roi sont morts. Certains auraient pu être sauvés. Seuls les blessés légers (balles dans les jambes ou dans les bras) sont survivants. Pas de quoi pavoiser. »

Attentats à Paris : le coup de gueule d’un médecin arrivé avant les secours

source : rtl.fr publié le 17/11/2015

Le docteur Michel Bonnot, habite juste au-dessus du restaurant Casa Nostra dans le 11e arrondissement de la capitale. Dès la première détonation vendredi 13 novembre en début de soirée, il n’a pas hésité et est descendu dans la rue. Pourquoi ? "C’est un peu l’idée que je me fais de ce que je dois faire, a répondu l’anesthésiste-réanimateur mardi 17 novembre au micro de Yves Calvi. J’ai beaucoup travaillé en zone de guerre par le passé, dans l’humanitaire, à Beyrouth, au Kurdistan, en Afghanistan à Sarajevo. Il me semblait quand même logique de porter secours en bas de chez moi".

"Je n’ai pas cru l’ombre d’un instant que c’était des pétards, poursuit-il. Le temps de mettre un manteau et je suis descendu assez rapidement". Sur une terrasse, il voit "quatre corps dans les débris de verre". Parmi ces corps, "celui d’une jeune femme. On a commencé à la masser, à faire le bouche à bouche, détaille-t-il. On a attendu très longtemps les secours - je n’ai pas dit qu’ils étaient en retard, vingt minutes. Dans ces circonstances, c’est une éternité. Elle est partie entre mes doigts (...) C’est dur".

"Ce qui m’a choqué, c’est ce sentiment d’impuissance et d’injustice, de ne pas avoir pu faire quelque chose, déplore aujourd’hui Michel Bonnot. Les sapeurs-pompiers sont arrivés. Sur la première jeune fille, j’ai demandé le renfort d’un médecin. Le sapeur-pompier m’a dit : ’il n’y a pas de médecin’. Il m’a dit : ’les camions de Samu vont arriver’. J’ai dit : ’bon alors passez moi le matériel pour intuber - intuber, ventiler c’est le b.a.-ba de la réanimation des blessés graves - et passez moi de quoi la perfuser’. Réponse : ’et bien on n’a pas tout ça’. Alors là j’étais un peu sidéré".

"Il faut savoir qu’aujourd’hui les sapeurs-pompiers - c’est un constat, pas un jugement -, ils ont de l’oxygène à bord, des garrots - c’est très utile. Mais j’ai demandé de la morphine. Il n’y en avait pas". Certains blessés auraient-ils pu être sauvés avec un minimum de soins et de matériel ? "Moi, je parle des blessés graves, répond-il. Il y en avait trois, j’en ai perdu deux, et le troisième est une histoire absolument étonnante (...) tout le monde a pensé qu’il était mort à tel point que quelqu’un avait jeté sur lui une bâche (...) et le sapeur-pompier se retourne vers moi et me dit "docteur, il respire. Il était vivant".

Dès lors, de quoi a-t-on besoin à l’avenir ? "Aujourd’hui on est en guerre, on va avoir des blessés de guerre, et on est pas profilé pour les transporter dans des bonnes conditions dans les hôpitaux. Maintenant, il faut réinventer un système pour faire face. C’est un véritable défi qui nous est jeté à la face. Rue de la Fontaine au Roi, nos secours n’étaient pas totalement à la hauteur, on aurait pu faire mieux, il faut avoir une certaine humilité pour l’accepter. Voilà un petit peu mon coup de gueule, il faut que l’on se remette en cause".

Commentaires des propos du docteur Bonnot (AB) :

  • J’ai beaucoup travaillé en zone de guerre par le passé, dans l’humanitaire, à Beyrouth, au Kurdistan, en Afghanistan à Sarajevo. Il me semblait quand même logique de porter secours en bas de chez moi

Parfait, on a affaire à quelqu’un d’expérimenté, au top des connaissances de prises en charge type Battlefield Trauma Life Support (BATLS)
SC1-SC2-SC3 (sauvetage au combat du 1er, 2e et de 3e niveau)
Tactical Combat Casualty Care (TCCC) ou International Trauma Life Support (ITLS)
, enfin c’est ce qu’il semble être, au vu du panégyrique fait par son propre exégète
.

  • Je n’ai pas cru l’ombre d’un instant que c’était des pétards, poursuit-il. Le temps de mettre un manteau et je suis descendu assez rapidement".

Le dr Bonnot comprend qu’il s’agit de tirs, mais passe un manteau. Un vêtement pas particulièrement adapté donc. A moins qu’il ne s’agisse d’un abus de langage, ce qui serait fâcheux dans le cadre de cette tribune accusatrice qui se veut être précise au point de tout remettre en cause...

  • Parmi ces corps, "celui d’une jeune femme. On a commencé à la masser, à faire le bouche à bouche, détaille-t-il.

Aïe ! Les recommandations internationales de l’ILCOR et de l’ERC ne recommandent plus, depuis au moins 2005, de pratiquer le bouche à bouche. Un petit manque de référence bibliographique docteur ? Pourtant, malgré le côté bourlingueur du docteur, dix ans, c’est un peu beaucoup pour actualiser ses connaissances non ?

  • On a attendu très longtemps les secours - je n’ai pas dit qu’ils étaient en retard, vingt minutes. Dans ces circonstances, c’est une éternité. Elle est partie entre mes doigts (...) C’est dur"

Que dire alors de ceux qui vivaient là où a exercé le docteur Bonnot "J’ai beaucoup travaillé en zone de guerre par le passé, dans l’humanitaire, à Beyrouth, au Kurdistan, en Afghanistan à Sarajevo." Il a dû en voir des souffrances aussi là bas probablement. Sans devenir aussi dur que du bois, l’expérience ça endurcie à priori...

  • Le sapeur-pompier m’a dit : ’il n’y a pas de médecin’. Il m’a dit : ’les camions de Samu vont arriver’. J’ai dit : ’bon alors passez moi le matériel pour intuber - intuber, ventiler c’est le b.a.-ba de la réanimation des blessés graves - et passez moi de quoi la perfuser’. Réponse : ’et bien on n’a pas tout ça’. Alors là j’étais un peu sidéré

On va vous expliquer docteur : Les sapeurs pompiers sont des secouristes. Les ambulances de réanimation (AR), équivalents militaires des smur, ne sont que trois dans Paris intra muros. Les centres médicaux de site (Ménilmontant (20e), Masséna, (13e), Champerret (17e). Les centres médicaux sont dotées de trois ambulances de réanimation, concourant à l’aide médicale urgente sur Paris. Donc il est normal que des secouristes, n’aient pas de matériel d’intubation, puisque c’est le rôle des AR d’être en possession de ce matériel. C’est le b.a -ba que de savoir ça. C’est dur d’être confronté à la réalité du civil parisien, quand on sort du secteur humanitaire.

  • Il faut savoir qu’aujourd’hui les sapeurs-pompiers - c’est un constat, pas un jugement -, ils ont de l’oxygène à bord, des garrots - c’est très utile. Mais j’ai demandé de la morphine. Il n’y en avait pas".

On vous explique encore les dures contingences de la réalité, docteur. Le transport de morphiniques est codifié, sous la responsabilité du médecin du smur et/ou de l’AR, validé par le chef de service ou le médecin chef de la BSPP. On ne se "balade pas" comme ça avec de la morphine qui est un stupéfiant soumis à législation importante. De plus, si c’est l’infirmier anesthésiste qui en est le dépositaire, il ne la délivre pas à l’envi, car il n’en dispose que de très peu de doses. Il en va tout autant de son homologue du SAMU. Vous conviendrez donc qu’il ne peut être délivré de la morphine que sur prescription du médecin avec lequel travaille l’IADE ou l’IDE des SMUR et/ou AR. Et qu’en aucun cas, un médecin, fut-il anesthésiste diplômé en bourlingue humanitaire, mais sans aucune identification possible dans la rue, ne puisse disposer librement de ce médicament particulièrement "sensible".

On est censé être à Paris, capitale de la France, pays européen libre, sans conflit interne ni guerre avec un autre pays. Donc il n’était pas prévu de faire des rues de Paris, un cadre de guérilla civile.

  • Certains blessés auraient-ils pu être sauvés avec un minimum de soins et de matériel ? "Moi, je parle des blessés graves, répond-il. Il y en avait trois, j’en ai perdu deux, et le troisième est une histoire absolument étonnante (...) tout le monde a pensé qu’il était mort à tel point que quelqu’un avait jeté sur lui une bâche (...) et le sapeur-pompier se retourne vers moi et me dit "docteur, il respire. Il était vivant".

Qui a fait le diagnostic de décès ? On n’ose penser à un praticien expérimenté, ayant fait de l’humanitaire dans des zones de conflits importants, sur des champs d’action compliqués.

Il est donc facile de critiquer, mais il faut savoir de quoi on parle. Il manque manifestement quelques éléments à ce médecin anesthésiste. Confondre secouristes et soignants, demander des molécules de palier 3 à un secouriste, reviendrait à reconnaitre une compétence que la société savante et les divers syndicats de notre anesthésiste, ne reconnaissent même pas aux IADE, professionnels soignants spécialistes de l’urgence de l’anesthésie et de la réanimation. Alors des secouristes, non professionnels de santé ...?

En effet ce serait sidérant !

— -

Le général Philippe Boutinaud, commandant de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, a témoigné devant l’Assemblée nationale de son vécu de la nuit des attentats.

Il avait déjà témoigné (et répondu aux critiques) dans plusieurs médias, dont France Bleu et France 2, mais c’est sans doute à l’Assemblée nationale que le général Philippe Boutinaud, commandant de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, a fourni le témoignage le plus complet de l’action de ses hommes lors des attentats du 13 novembre. Organisée le 16 décembre, son audition par la commission de la Défense a fait l’objet d’un compte-rendu mis en ligne début janvier, signalé par le blog RP Défense. Philippe Boutinaud y raconte en détail, de 21h19 le 13 novembre à 5h30 le 14, une opération qui a mobilisé 680 personnes (430 sur le terrain et 250 en soutien), ce qui en fait « peut-être la plus importante [opération de secours] jamais effectuée par les pompiers de Paris si l’on exclut les bombardements de la Seconde Guerre mondiale ».

Les informations disponibles. « Entre 21 heures 30 et 22 heures, nous avons reçu 700 appels, dont certains faisaient état de fusillades, d’autres d’explosions, d’autres de scènes de panique ou de prises d’otages. On nous indiquait de très nombreuses adresses différentes, car, outre les angles de rue, de nombreuses personnes, blessées et échappées du Bataclan par exemple, se réfugiaient sous des portes cochères dans les rues voisines ou montaient dans la première voiture qui passait. »

L’anticipation d’une attaque multi-sites. « Nous étudiions notamment depuis cet été le cas d’une course mortifère dans Paris. [...] Au troisième attentat, j’ai donné l’ordre de réduire l’envoi des moyens demandés pour plan rouge alpha, afin de ne pas nous trouver démunis. Je craignais en effet que le scénario de Bombay se répète, et que les terroristes aillent dans une gare après avoir visé des gens attablés à des terrasses de café. [...] J’avais abordé le scénario d’un raid mortifère dans Paris avec le préfet de police et avais rencontré le chef du Samu de Paris, pour en discuter et organiser des exercices d’entraînement. »

La gestion du Stade de France. « Nous avons demandé et obtenu que le stade ne soit pas évacué. En effet, pendant que les spectateurs regardaient le match, dès lors qu’aucune explosion n’avait eu lieu à l’intérieur, les gens risquaient moins dans le stade que dehors, où des kamikazes auraient pu se mêler à la foule pour alourdir le bilan. »

Le statut des pompiers en zone d’attentat. « Tout d’abord, il fallait déterminer si les terroristes se trouvaient toujours dans la zone, car on ne peut pas être pompier et tenir une arme. Un élu local m’a récemment demandé s’il fallait armer les pompiers. Je lui ai répondu qu’un médecin tenait une perfusion et non un fusil lorsqu’il s’occupait d’un soldat blessé. Il n’est donc pas question d’armer les pompiers, car si l’on devait assurer notre sécurité, on ne soignerait plus les gens »

La rumeur. « Elle a toujours existé mais auparavant elle provenait du bas alors que, maintenant, ce sont les chaînes d’information émettant en continu qui la créent. Un bruit faisait état d’une personne tirant dans la gare du Nord avec un grand nombre de victimes. Nous sommes parvenus à le dissiper en demandant aux appelants s’ils avaient vu eux-mêmes des blessés ou le tireur. »

L’après. « Dès leur retour d’interventions, j’ai demandé à tous les garçons et les filles qui avaient participé au secours la nuit du 13 au 14 novembre d’écrire librement ce qu’ils avaient fait. Cet exercice présente deux vertus : savoir ce qui a été accompli sans réécriture postérieure de l’histoire et favoriser le désamorçage psychologique. En effet, les pompiers au Bataclan ont découvert soixante-dix-huit morts dans la salle de spectacle et ont entendu sonner les téléphones portables des personnes décédées que leurs proches tentaient de joindre. [...] Tous les personnels intervenus le 13 novembre, y compris moi, sont passés devant un psychologue. »

Le 17 décembre, Philippe Boutinaud avait aussi témoigné de cette « guerre au cœur de la cité » lors d’un RETEX (retour d’expérience) organisé à Paris :

« J’étais au Stade de France lors de la première explosion. Ce type de bruit n’a rien d’exceptionnel dans un environnement de stade avec les pétards des supporters. Mais j’ai eu un doute et, lorsque je suis sorti de l’enceinte, j’ai vu le corps du terroriste. Au même instant, j’ai reçu le message m’informant de la première fusillade rue Bichat. La BSPP prend en charge en moyenne tous les mois quatre-vingt victimes de plaies par armes blanches ou armes à feu. Mais j’ai vite fait le rapprochement et compris que ça allait être sérieux. »


Gestion des attentats : aurait-on pu faire mieux ?

Dr Isabelle Catala

20 novembre 2015 source : medscape.com

Le 19 novembre, Marisol Touraine la Ministre de la Santé a mobilisé 3 millions d’euros pour l’AP-HP, somme destinée à financer « des mesures exceptionnelles de gratification » des personnes qui ont participé à la prise en charge des victimes des attentats du vendredi 13 novembre 2015.

C’est la mesure de trop pour un grand nombre de médecins que Medscape.fr a rencontré. Car depuis une semaine, dans tous les lieux où il est possible d’échanger, des médecins s’interrogent. Aurait-on pu faire mieux ? Comment moi j’aurais pu faire mieux ? Pourquoi, alors que j’étais là, on donne la parole à des chefs de service que l’on ne voit jamais au travail le reste du temps ? Pourquoi seul le Samu a la parole ? Pourquoi d’autres sont considérés comme légitimes pour parler en mon nom ?

Verbatim recueilli anonymement par Medscape.fr auprès de ceux qui osent, sur la pointe des pieds, aller - un peu - à l’encontre du concert de louanges ambiant.

Verbatim de médecins militaires et civils

La prise en charge des blessés à travers la mise en place du Plan blanc a été un vrai succès, salué, comme il se doit, en France, comme à l’étranger. Néanmoins au milieu de ce concert de louanges, de voix discordantes se font peu à peu entendre et la prime de 3 millions d’euros pour l’AP-HP annoncée par Marisol Touraine pour financer « des mesures exceptionnelles de gratification » des personnes qui ont participé à la prise en charge des victimes des attentats du vendredi 13 n’arrange rien.

Il ne s’agit pas tant de créer une polémique mal venue compte tenu des circonstances tragiques que de se demander comment on aurait pu faire mieux. Dans les services hospitaliers, dans les internats, à la cafétéria et dans tous les lieux où il est possible d’échanger, il est beaucoup question d’organisation et du sentiment d’inutilité des professionnels de santé qui n’ont pu intervenir à chaud, en dépit de l’élan de volontariat : aurait-on pu faire mieux ?

Tous, auraient voulu aider, soigner, et beaucoup, face à la violence des images, du chiffre des victimes, ont eu l’impression de n’avoir pas été « utilisés » au mieux de leurs compétences, ou de n’avoir pas eu les moyens de le faire par manque de matériels notamment. Au milieu de fort sentiment d’impuissance (et peut-être aussi de culpabilité) – celui-là même qui a conduit les citoyens lambda à braver 3 heures d’attente pour donner son sang dès samedi matin –, se pose aussi la question de la légitimité des eux et des autres, et son corollaire, le sentiment d’injustice de ceux qui ont œuvré dans l’ombre et le sont restés. Les langues se délient et, inévitablement, certains s’interrogent.

Medscape est allé vers ceux (militaires et civils) qui se démarquent légèrement de l’union de façade et a recueilli leur verbatim de façon anonyme avec pour seul objectif que personne ne sente floué et « faire mieux la prochaine fois » – s’il devait malheureusement y en avoir une.

Les médecins militaires : « Et les 100 patients que l’on a reçus ? »

Le service de santé des armées a organisé le 19 novembre un point presse pour détailler leur rôle dans la gestion des blessés de Paris [2]. L’hôpital Begin (Saint-Mandé) a pris en charge 58 victimes et l’hôpital Percy 41. Le plan de crise a été déclenché dans ces deux hôpitaux avant même la mise en place du Plan Blanc régional et c’est l’hôpital Percy qui a accueilli la première victime du stade de France. Les blessés ont été accueillis à Begin en trois vagues espacées d’une demi-heure entre minuit et une heure du matin. A Begin, 21 patients ont été opérés dans l’un des 5 blocs qui sont restés ouverts pendant 24 heures.

Parmi les blessés hospitalisés, deux sont décédés à Bégin et un à Percy. Des psychiatres militaires sont aussi intervenus au sein de la cellule psychologique de soutien aux familles et aux personnes impliquées sur le site de l’Ecole Militaire.

Toujours très prudents dans leur communication, des médecins militaires rapportent que « par rapport à des médecins médiatiques, nous qui sommes habitués aux Opex (Opérations Extérieures) avons quand même plus l’habitude des blessures balistiques et du triage des blessé multiples. C’est ce qui nous a permis de planifier avec calme les passages au bloc et de permettre aux chirurgiens de travailler le plus efficacement possible ». « Les urgences n’étaient pas saturées, des lits avaient été réouverts. Si nous médecins militaires, nous n’avons pas l’habitude de nous mettre en avant, j’ai trouvé ça injuste qu’il n’y ait pas eu un mot de remerciement pour nos soignants civils (infirmières, aides soignants, brancardiers, personnel de bloc...) ». « Nous, on a fait le job, dans l’ombre… ».

Les médecins sur les lieux ou à proximité : « Un sentiment d’impuissance »

Tous les médecins parisiens – et peut être même français – connaissent un « copain médecin qui était deux rues à coté des attentats ». Et c’est vrai que dans la population qui fréquentait les 10 et 11 arrondissements ce vendredi soir, il y avait des médecins, des internes, des infirmières, des sages-femmes….

« J’étais sur place, mais je ne savais pas quoi faire, je n’avais rien pour soigner ». « Je me suis souvenue que mon grand-père avait toujours sur lui une trousse de secours avec des garrots et des médicaments, je sais pourquoi maintenant ». « Les VSA (Véhicule de Secours de l’Avant) des pompiers ne sont pas équipés pour réanimer des gens : il n’y a rien dedans…. Déjà j’avais été frustré de ne rien pouvoir faire sur le site de la fusillade, mais même lorsque les pompiers sont arrivés, je ne pouvais toujours rien faire ». « Il devrait y avoir dans les VSA une trousse plombée avec du matériel utilisable par les médecins, un peu comme dans les avions ».

« Moi je sais que je n’ai servi à rien. Et la seule chose qui matérialise ma présence sur les lieux c’est cette trithérapie que je prends parce que j’ai été en contact avec le sang de blessé et que j’ai moi-même eu une petite plaie ».

« J’étais avec 6 de mes internes dans un resto à coté de la rue de Charonne, on nous a demandé de descendre à la cave. On y est resté jusqu’à 4 heures du matin pourtant j’avais prévenu tout le monde – mon hôpital, la police, les pompiers – qu’ils n’avaient qu’à venir nous chercher et que nous étions 7 réanimateurs prêts à travailler. Personne n’est venu ».

Les médecins et urgentistes hospitaliers : « A croire qu’il n’y avait que des médecins médiatiques ce soir là »

Il y a les médecins qui travaillaient aux urgences ou dans les blocs ce soir là : « Je suis très en colère du fait que seuls les médecins médiatiques habituels aient pris la parole ». « Quand on voit à la télévision que seuls les médecins du Samu parlent et que quelques urgentistes jamais présents sur le terrain s’expriment, on comprend que la communication était jouée d’avance ». « Et lundi, quand je suis rentré après avoir opéré toute la nuit deux jours avant, personne ne m’avait pris de patients pour alléger mon programme ». « Je suis venue vendredi parce qu’il fallait, mais quand j’ai demandé à me faire remplacer pour ma garde dimanche, personne n’était volontaire ». « Et qui a reçu les personnes âgées et les malades qui n’avaient aucun lien avec les attentats et que l’AP avait détournés : les autres hôpitaux, ceux dont on ne parle pas ». « Toute la nuit on s’est préparés à recevoir des blessés, avec renfort de personnel. On a attendu, attendu et on nous a envoyé personne ».

Les médecins qui étaient chez eux : « Le seul blanc que j’ai vu c’était celui de mes draps »

Et il y a les médecins qui étaient chez eux : « J’ai appelé les urgences de mon hôpital dès 23h, ils m’ont dit, ne viens pas on ne sait pas quoi faire ». « Je ne savais pas où aller, et finalement, je suis allée nulle part. Le seul blanc que j’ai vu c’était les draps de mon lit ». « Et tout le monde qui m’appelait pour me dire bon courage en tant que médecin, mais je ne suis même pas sorti de chez moi, je n’ose pas le dire ». « Je fais partie de l’Eprus, la réserve sanitaire, pour autant, on ne m’a pas appelé ». « Ma femme ne voulait pas que je sorte ». « Je suis dermato, qu’est ce que j’aurais fait ». « J’ai attendu des instructions de mon chef de service : j’ai reçu un mail deux jours après ». « Où aller, que faire, j’ai appelé le Samu qui ne répondait pas » « Si ça avait été encore mieux organisé, il y aurait eu plus de médecins ». « Il faut des consignes pour les prochaines fois ».


Attentats : les hôpitaux sont-ils prêts à faire face au chaos ?

Samedi 26/03/2016

Le 25 mars 2016, à l’hôpital militaire Lavéran de Marseille, les services de secours et de soins ont tiré les leçons des attentats de novembre à Paris

La soirée s’annonçait calme au centre d’appel des sapeurs-pompiers de Paris. Quand soudain, les téléphones se mirent à hurler. "Nous avons reçu 700 appels dans la première demi-heure. Des gens paniqués, qui livraient tous des adresses différentes", raconte Franck Peduzzi.

Ce médecin-chef était de garde en cette effroyable soirée du 13 novembre 2015, où la France a vécu les attentats terroristes les plus meurtriers de son histoire. 300 blessés, dont 76 en urgence absolue, ont dû être pris en charge. Une nuit de chaos, dont les responsables des hôpitaux et services de secours franciliens ont livré le retour d’expérience, hier, à l’hôpital militaire Lavéran de Marseille.

Dans la salle, on n’a pas perdu une miette de ces récits, souvent techniques et statistiques, mais toujours plein d’humanité. Des soignants marseillais ont découvert la considérable onde de choc qu’ont produit ces attentats dans les hôpitaux. Une réalité qu’ils devront un jour peut-être affronter.
A Marseille, les hôpitaux franciliens ont livré leur retour d’expérience

Ce chaos, leurs confrères parisiens sont parvenus à le gérer, avec des erreurs, mais sans céder à la panique. Ce sang-froid leur a permis de sauver des centaines de vies. Parfois au péril de la leur, comme au Bataclan où les secours sont intervenus sous les tirs : "L’intervention de la police était en cours, des victimes sortaient en permanence." Alors que le réseau GSM était "complètement saturé", il a fallu gérer la communication avec tous les services impliqués . Le Samu 75 pour commencer, qui a réalisé un extraordinaire travail de régulation et de tri des blessés, sur des zones parfois non encore sécurisées. "Au Stade de France, pour une simple bousculade, nous avons dû réaliser 200 examens médicaux. Vous imaginez si le stade avait été évacué avant la fin du match. Ou si une bombe avait explosé dans l’enceinte ?", souligne le Pr Benoit Vivien, directeur du Samu 75.

Appuyées par les Samu de sept départements, les équipes médicales ont travaillé en "damage control", ces gestes de secours d’urgence utilisés dans les zones de guerre. À l’hôpital de Percy aussi, la soirée avait commencé calmement. Et puis, soudain, un appel du Samu a demandé aux établissements de santé de se tenir prêts à accueillir un flot de blessés. "Dans ces situations, on n’a pas tous ses neurones... Alors on applique les procédures", explique le Pr Guillaume de Saint-Maurice, chef du service d’anesthésie-réanimation de Percy. Rappel des personnels, préparation des blocs opératoires, "d’emblée, on s’est organisé pour durer". Dix-sept blessés seront pris en charge à Percy où les chirurgiens ont réalisé neuf interventions en urgence absolue. Puis il a fallu gérer la relève des équipes, les 587 appels des familles à la recherche de leurs proches.

Partout, l’identification a posé problème. "La plupart des blessés arrivaient torse nu, sans papiers", raconte le Dr Mathieu Raux, anesthésiste-réanimateur à la Pitié-Salpétrière. Des erreurs tragiques n’ont pas été évitées (corps faussement identifiés), mais il n’y a pas eu confusion de malades.

Ailleurs, à Saint-Antoine ou à Saint-Louis, des blessés ont escaladé les murs des hôpitaux, tout proches des lieux des fusillades. Et si des terroristes s’étaient glissés parmi eux, pour se faire sauter à l’intérieur de l’hôpital ? Conclusion : il faudra fouiller les patients.

À l’arrivée, les services franciliens n’ont pas été saturés. Que se serait-il passé s’il y avait eu davantage de victimes, notamment au Stade de France ? Que se passerait-il si de telles attaques survenaient à Marseille, qui dispose d’une bien moindre capacité hospitalière ? Pour le Dr Mathieu Raux, "L’important, c’est de se préparer à être surpris", disent les soignants parisiens. Sachant que, du côté des terroristes, la désorganisation des secours fait partie des objectifs. Et, qu’eux aussi, se livrent à des retours d’expérience...

"Tous les établissements seraient mobilisés"

32 établissements de santé en région parisienne, 19 dans les Bouches-du-Rhône. 60 ambulances de réanimation immédiatement mobilisables à Paris, 200 blocs opératoires pour la seule AP-HP, la moitié seulement dans le meilleur des cas à Marseille. "À l’évidence, nous ne disposons pas des mêmes moyens que l’Ile-de-France. Aussi, pour faire face à des attaques terroristes de grande ampleur, il faudra s’organiser autrement", constate le Pr Kerbaul, responsable du Samu 13. À l’approche de l’Euro 2016, et sachant que Marseille est également exposée au risque terroriste maritime que ne connaît pas Paris, les exercices se secours se multiplient (16 en 2015, et 6 depuis janvier au Samu 13, qui a notamment travaillé avec le Raid). Les plans blancs ont été réactualisés dans tous les hôpitaux, à la lumière des attentats du 13 novembre.

Un grand principe à Marseille : faire appel, le plus tôt possible, à l’ensemble des moyens du département, puis de la région (établissements publics et privés, Smur, voire ambulances privées) pour permettre aux hôpitaux positionnés en première ligne (Nord, la Timone, Laveran, qui disposent d’un trauma-center) de prendre en charge l’extrême urgence. "L’objectif est que le bon blessé soit au bon endroit au bon moment. C’est là dessus que nous serons jugés", résume le Pr Raux. Ce qui confère à la régulation médicale un rôle décisif. Et sur le terrain, les soignants sont formés à intégrer la règle des "3 R" :

  • Recueillir (les informations sur les blessés),
  • Renseigner (la cellule de crise qui va les orienter vers tel ou tel hôpital et...
  • Rester en vie.

Sophie Manelli : laprovence.com

Guide pratique pour les personnels des établissements de santé, sociaux et médico-sociaux
Guide pratique pour les équipes de direction des établissements de santé, sociaux et médico-sociaux
Vigilance attentats APHP



Le récit choc du médecin-chef du Raid sur le « cauchemar » du Bata­clan

« Matthieu Langlois, qui a été en première ligne le 13 novembre 2015, raconte étape par étape ce qu’il a vu et fait dans la salle de concert prise d’assaut par les terro­ristes. Son témoi­gnage fait l’objet d’un livre*. Extraits.

Il a été de toutes les tragé­dies ces vingt dernières années. Atten­tat à la bombe dans la station Saint-Michel en 1995, tueries de Moham­med Merah à Toulouse en 2012, prise d’otage sanglante de l’Hy­per-Casher à Porte de Vincennes en janvier 2015… Le Dr Matthieu Langlois, 46 ans, a chaque fois œuvré à sauver des vies. Mais son récit le plus terri­fiant concerne celui rela­tif à la soirée du 13 novembre 2015, quand les comman­dos de Daesh ont attaqué la capi­tale à coups de kalachnikov et de cein­tures d’ex­plo­sifs. Ce méde­cin-chef du Raid a été dépê­ché en plein cœur du brasier, au Bata­clan, où trois terro­ristes ont provoqué un bain de sang. Lorsque l’as­saut des forces de l’ordre a été lancé, il était avec ses hommes en première ligne. Il a ainsi décrit, étape par étape, ce qu’il a vu et fait ce soir-là. Offrant ainsi une vision inédite des événe­ments, un témoi­gnage à vif sur l’hor­reur.

Quand la situa­tion est aussi impré­vi­sible, l’heure n’est pas à la ‘grande méde­cine’

« Nous avons beau anti­ci­per des scena­rii de ce type, l’entrée dans le Bata­clan n’en reste pas moins une véri­table épreuve. Un cauche­mar », résume-t-il d’em­blée. La scène qui s’offre à ses yeux est d’une cruauté insup­por­table. Les cadavres jonchent le sol, les autres personnes présentes sont bles­sées, para­ly­sées par l’horreur. Mais le Dr Langlois affirme que « sans ce choc émotion­nel », il n’au­rait « peut-être pas été capable de (se) surpas­ser, en tout cas de trou­ver les ressources physiques, psycho­lo­giques et mentales néces­saires pour mettre en pratique » ce qu’il a appris au fil des années. Et ce, même si ce qu’il découvre « est au-delà de tout ». Après avoir enjambé les victimes, il a hurlé à celles encore capables de se dépla­cer de venir vers lui, pour effec­tuer un premier tri. « Je n’oublie­rai jamais la scène qui a suivi, se remé­more-t-il. Je vois de rares bras se lever. Quatre, peut-être cinq. Je croise des regards, un en parti­cu­lier, celui d’un homme devant moi, qui m’implore de le sauver. Personne n’a bougé, à mon appel. Personne ne s’est redressé pour marcher vers nous ».

Il a donc été contraint d’al­ler cher­cher les hommes et femmes prison­niers du piège « un par un ». Très vite, le méde­cin-chef du Raid constate : « Les choses sont nettes. Il y a ceux qui sont déjà ‘blancs’, morts sans aucun doute possible, et les autres ». Le tout est alors de garder son sang-froid et de mettre en place une orga­ni­sa­tion pour abri­ter ou main­te­nir en vie ceux qui respirent encore. Dans un temps très court. « Quand la situa­tion est aussi impré­vi­sible, l’heure n’est pas à la ‘grande méde­cine’. Le blessé parle-t-il sans suffoquer ? Sa respi­ra­tion est-elle ample ? L’œil et l’oreille suffisent pour évaluer la situa­tion. Quelqu’un qui vous parle norma­le­ment n’est pas en détresse respi­ra­toire. Si la victime saigne, si elle se vide de son sang, je peux poser un garrot ou utili­ser un produit pour stop­per l’hémor­ra­gie. Pas plus de dix secondes par geste, c’est l’écono­mie à laquelle je dois m’astreindre ».

En débou­chant de l’esca­lier, notre petit groupe tombe sur la tête du terro­riste qui a explosé

Ici et là, il constate diffé­rents types de bles­sures. De la plus horrible à la moins visible. Il explique à nouveau : « Avec un blessé par balle, la première chose à regar­der reste sa couleur. On voit tout de suite si la personne est en train de mourir d’une hémor­ra­gie. En cas de doute, on prend son pouls. La clinique en zone de combat se résume à ces examens ultra-sommaires qui sont plus effi­caces que tous les acces­soires que l’on pour­rait utili­ser ». Il tombe aussi sur des victimes qui n’ont reçu aucune balle ni aucun éclat, mais qui restent para­ly­sées au niveau d’un esca­lier. Il faut alors haus­ser le ton : « Écou­tez-moi ! Écou­tez-moi ! On n’a rien à foutre ici. Faites-nous confiance, on va dehors ». Une manière de les extir­per au plus vite de cet enfer. Cons­cient que certains « ne souffrent pas physique­ment » mais « psycho­lo­gique­ment », il précise que l’em­pa­thie s’avère aussi utile (« Allez, made­moi­selle, courage  ! »).

Mais demeure un autre problème : « Pour sortir, ces victimes doivent repas­ser sur la scène. En débou­chant de l’esca­lier, notre petit groupe tombe sur la tête du terro­riste dont le gilet bourré d’explo­sifs a sauté lorsque ce commis­saire de la brigade anti-crimi­na­lité l’a neutra­lisé par un tir héroïque, avant notre arri­vée sur les lieux. Juste la tête, déta­chée des autres parties du corps, qui gisent non loin. Et c’est loin d’être la seule vision d’horreur qu’on inflige à ces bles­sés que l’on vient d’extir­per de leur cachette. Il nous faut aussi enjam­ber des corps, si bien qu’à un moment, comme par réflexe, je place ma main gantée sur les yeux du garçon que je trans­porte. Je veux lui épar­gner ce cauche­mar, mais en voulant l’empê­cher de voir, je lui étale du sang sur la figure. Quand je comprends mon erreur, son visage est déjà maculé ».

« Je ne peux pas rebou­cher les trous de kalach­ni­kov… « 

Les efforts du Dr Matthieu Langlois et de ses coéqui­piers du Raid ont permis de sauver des dizaines de vies le 13 novembre. Malheu­reu­se­ment, des dizaines de bles­sés par balles ont fini par succom­ber à leurs bles­sures quelques heures ou jours plus tard. Comme cette jeune femme qu’il n’a pas fait évacuer en prio­rité, la sachant déjà condam­née. Une déci­sion toujours doulou­reuse à prendre. Pour­tant, à l’hô­pi­tal de la Pitié-Salpê­trière : « Le neuro­chi­rur­gien et le neuro­réa­ni­ma­teur qui l’ont prise en charge m’ont confirmé qu’elle n’aurait eu aucune chance de survivre à ses lésions, raconte-t-il. Je sais à quel point c’est diffi­cile à admettre : pour­tant, la nouvelle tragique de son décès m’a conforté dans le choix que j’ai fait ». Dans l’ef­fu­sion de senti­ments qui l’animent, il se convainc fina­le­ment que son rôle est clair, défini, réso­lu­ment humain : « Je ne peux pas rebou­cher les trous de kalach­ni­kov. Ni répa­rer des membres arra­chés par une explo­sion. Je fais en revanche tout ce qui est en mon pouvoir pour que les victimes rejoignent le plus vite possible le bloc opéra­toire, avec le concours des pompiers et du samu ».

*Méde­cin du RAID. Vivre en état d’urgence , de Matthieu Langlois, Albin Michel, 200 p.

Source : fipn-sdlp.fr et VSD – article écrit le 14 octobre 2016 par Luca Andreolli

Photo © Eric Bouvet


Le 3 mars 2017

Un rapport de l’Observatoire national de la sécurité (ONS) publié fait, entre autres choses, le point sur l’organisation des exercices "attentats" dans les écoles.

Dans son dernier rapport publié par la Documentation française, l’ONS fait état d’un bilan des exercices "attentat-intrusion" demandés par les préfectures au sein des établissements scolaires. Dans le cadre du PPMS (Plan particulier de mise en sûreté), les établissements scolaires ont obligation d’organiser des exercices de simulation d’un risque majeur, dont un a minima sur la thématique attentat-intrusion. Dans son rapport, l’ONS traduit la "véritable prise de conscience et une volonté de bien faire" de la part des chefs d’établissement. Cependant, de nombreuses interrogations s’expriment de la part de ces derniers, notamment dans la mise en oeuvre de ces exercices. Des problèmes de terrain ont été également relevés, comme par exemple l’alerte des élèves et des enseignants, la conduite à tenir, et la prise en compte des aspects psychologiques. Cependant, il ressort de cette étude que la majorité des chefs d’établissement approuvent le bien-fondé de ces exercices et souhaitent continuer à en réaliser.

source secoursmag.com

Rapport annuel 2016, pour une sécurité intégrée et une accessibilité raisonnée

Comment articuler secours et sécurité lors d’attaques terroristes ?

source : secoursmag.com- Yann Bellon 30 Mars 2017

Cette question a guidé la conférence organisée le 21 mars dernier par l’Institut français de sécurité civile (IFRASEC), en partenariat avec Sciences Po et la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF).

La conférence a été animée par des experts de la police, des pompiers et du ministère de la Santé

Crédit photo : Yann Bellon / Secours Mag

"Comment intervenir en zone d’exclusion lors d’une attaque terroriste alors que les assaillants n’ont pas été neutralisés ?" La question est posée en guise d’introduction par le député Sébastien Pietrasanta, rapporteur de la commission d’enquête relative aux moyens mis en œuvre par l’Etat pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier 2015 qui avait conduit à l’élaboration d’un rapport contenant plusieurs propositions. Une d’entre elles visait à mettre en place des colonnes d’extraction des victimes en zone d’exclusion composées de secouristes intervenant sous la protection des forces d’intervention. Cette proposition, finalement adoptée en juin 2016 via une note de doctrine remise à jour il y a quelques jours, est loin de faire l’unanimité.

En zone d’exclusion, les pompiers n’apportent aucune valeur ajoutée

Quelle place pour les pompiers en colonne d’extraction ?

Médecin chef de la Brigade de recherche et d’intervention (BRI), le Pr Denis Safran ne décolère pas, totalement opposé qu’il est à l’incorporation de sapeurs-pompiers dans les colonnes d’assaut. "En zone d’exclusion, les pompiers n’apportent aucune valeur ajoutée. Les gestes d’extraction sont simples à réaliser, et les CRS sont formés à la réalisation de ces gestes. De plus, la présence de pompiers dans la colonne risque de générer des confusions dans un contexte opérationnel où tous les intervenants portent la même tenue de protection, et où il devient donc difficile de distinguer les forces d’intervention des forces de secours." Une uniformité qui peut parfois brouiller le rôle et les missions de chacun. "Lors d’exercices, nous avons constaté que des membres des forces de police ne procédaient pas en priorité aux extractions de victimes, pensant à tort que cette mission était dévolue aux acteurs du secours." Dès lors, la question s’impose d’elle même : comment articuler efficacement les forces de secours et de sécurité lors d’attaques terroristes ?

Suite aux attentats du 13 novembre 2015, nous avons changé de référentiel et d’analyse

L’interopérabilité s’impose

A l’évidence, cette articulation ne va pas de soi, comme le souligne le Pr Safran. "Il est difficile de coordonner des acteurs issus de différents corps de métier qui n’ont pas la même culture." Pour autant des progrès notables ont été faits en terme de commandement avec un Commandant des opérations de police (COP) ou de gendarmerie (COG) identifié. D’importantes avancées ont été constatées en matière d’interopérabilité, avec notamment la mise en place d’un langage commun entre les différents services rendue possible grâce à l’organisation d’exercices réguliers, comme ceux effectués entre la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) et la BRI. Suite aux attentats du 13 novembre 2015, les services de secours et de sécurité ont fait évoluer leur mode de fonctionnement. "Nous avons changé de référentiel et d’analyse. Police, secours, médical : auparavant chacun intervenait de son côté. Le dispositif n’était pas assez réactif et adaptable pour répondre à des situations exceptionnelles, souligne le Pr Pierre Carli, médecin chef du SAMU de Paris. Aujourd’hui, la notion d’adaptabilité est essentielle car il n’y aura jamais un plan qui s’adaptera parfaitement au contexte d’une intervention hors norme. Des expériences ont été accumulées, il nous reste à les transmettre."

A l’avenir, les pompiers devront acquérir des éléments de culture policière dans la résilience

Souplesse, agilité, adaptabilité et audace

« Qui commande ? C’est le terrain !  » Manière de dire pour le Dr Alain Puidupin, adjoint du centre opérationnel des réceptions et de régulation des urgences sanitaires et sociales, que ce sont bien les acteurs du secours qui devront s’adapter aux différents scénarios possibles et imaginables avec l’objectif commun de limiter le nombre de victimes. "Les attentats ont changé nos façons de travailler. Nous sommes en train de créer une culture commune, annonce Ludovic Jacquinet, commissaire divisionnaire adjoint au conseiller doctrine défense à la police nationale. Il s’agit d’une véritable révolution conceptuelle à laquelle devront être formés les 150 000 nouveaux policiers à l’avenir afin d’intégrer la dimension inter-services devenue primordiale pour permettre aux services de secours d’intervenir au mieux." Les pompiers s’adaptent également en conséquence. "Nous avons opéré des adaptations techniques et tactiques, insiste le Dr Patrick Hertgen, vice-président de la FNSPF. A l’avenir, nous devons acquérir des éléments de culture policière dans la résilience. L’autre piste d’amélioration concerne la stratégie sur la gestion des opérations de commandement. L’enjeu ? Avoir un commandement souple, agile, adaptable, désinhibé et audacieux."


Attentats : amélioration du dispositif d’urgence pour les soins aux victimes et l’information des familles

Publié le mardi 1 août 2017

source : lessentiel-anesthesie-reanimation.fr

Un an après les attentats terroristes de Nice, les médecins de premier recours ont réfléchi à de nouveaux modèles d’intervention, de formation et de coopération pour sauver encore plus de vies.

Le 13 novembre 2015, Paris a été le théâtre de multiples attaques terroristes de masse, entraînant la mort de 137 personnes et blessant 413 personnes. Le 14 juillet 2016, la France a été ciblée à nouveau dans l’attaque de Nice au cours de laquelle un terroriste a délibérément conduit un camion réfrigéré dans la foule qui célébrait le jour de la prise de la Bastille, entraînant la mort de 87 personnes et blessant 458.

Partant des procédures définies avant les attentats et évaluant les moyens qui ont été effectivement nécessaires pour traiter l’afflux de blessés, les médecins de premier recours ont proposé de nouvelles mesures qui ont été publiées dans la revue The Lancet le 26 juillet 2017.

Ils préconisent notamment l’adaptabilité des plans, le transfert de techniques de soins militaires dans le contexte civil, des exercices de simulation, et le développement de la recherche. S’appuyant sur leurs travaux, un nouveau dispositif doit couvrir l’ensemble du territoire français.

Des cours de réanimation en ligne

La formation des chirurgiens, des anesthésistes, des médecins d’urgence a été renforcée par les équipes militaires optimiser les interventions lors du tri des victimes ou des soins en zone dangereuse, en réanimation et en chirurgie. Ces démarches ont notamment abouti à un cours disponible en ligne sur demande pour les équipes via la plateforme du Service de santé des armées français. Des facultés ont déjà intégré cet enseignement et sa généralisation est attendue pour la prochaine année universitaire (2017-2018).

La formation sera aussi élargie aux médecins généralistes et sera dispensée en formation initiale à tous les futurs praticiens. Il sera aussi nécessaire de compléter la formation des équipes hospitalières sur certains points, tels que la prise en charge d’un grand nombre de victimes pédiatriques ou encore la réponse à l’utilisation d’armes chimiques qui peuvent produire de très nombreuses victimes.

Une coopération renforcée entre les différents corps

Sur le terrain, une coopération étroite entre les forces de l’ordre, les équipes du SAMU et des Pompiers est maintenant considérée comme indispensable. Elle permet à la fois la neutralisation rapide de la menace, mais aussi une prise en charge adaptée des victimes atteintes d’hémorragies massives. Elle se concrétise par l’intervention, à proximité immédiate des zones de combat, de secouristes entraînés, protégés, appartenant à la police ou aux pompiers. Cette technique d’extraction des victimes et de secourisme « sous le feu » a fait l’objet de formations spécifiques.

Il apparaît aussi que les grands centres hospitaliers, se sont adaptés à la prise en charge d’un afflux de blessés graves. Il faut maintenant que les hôpitaux de l’ensemble du territoire national puissent s’organiser pour faire face à de telles éventualités, y compris dans les zones où la densité médicale est beaucoup plus faible. Ainsi, dans les hôpitaux généraux, les équipes de bloc opératoire doivent maîtriser le principe du « Damage Control » chirurgical (qui consiste à réaliser une chirurgie d’urgence de courte durée pour stopper l’hémorragie puis à intervenir de nouveau un jour plus tard). Dès 2013, l’importance de disposer d’un protocole de soins et de matériels adaptés aux blessés par armes de guerre avait été anticipée à Paris et a été confirmée par les attentats de 2015. À cette technique militaire sont associées une organisation régionale des soins et une mise en place de transferts inter hospitaliers.

Développement de nouvelles techniques de soins et d’information

La recherche médicale joue aussi un rôle essentiel dans la réponse au terrorisme, avec le développement de nouveaux matériels, de nouvelles techniques de soins et organisations participant à l’amélioration du pronostic.

Des améliorations ont également vu le jour concernant l’information aux familles des victimes. De nouvelles procédures permettent maintenant d’identifier mieux et plus vite les victimes pour informer leurs proches. La réconciliation des outils informatiques pré-hospitaliers et hospitaliers et la mise en place de nouvelles procédures ont été développées pour atteindre cet objectif.

Parallèlement, les moyens de l’urgence médico psychologique ont été adaptés pour permettre une prise en charge précoce d’un plus grand nombre de victimes afin de prévenir plus rapidement la survenue du syndrome de stress post-traumatique.

Enfin, cette analyse souligne l’importance d’une coopération médicale internationale pour que tous les pays visés par le terrorisme puissent partager leurs expériences et ainsi intensifier leur préparation. Depuis novembre 2015, les échanges avec les médecins des services d’urgence d’Allemagne, de Belgique, du Danemark, des Etats-Unis, d’Israël et du Royaume-Uni se sont multipliés et ont été riches d’enseignement.

Les auteurs insistent dans leur conclusion sur la nécessité d’inscrire cette réponse médicale au terrorisme dans la durée. Son amélioration constante permettra à la fois de sauver des vies et de démontrer la détermination des équipes à faire face à cette agression.

*Le groupe d’étude est composé de praticiens de l’AP-HP (Samu 75 et Hôpitaux Pitié-Salpêtrière, Necker et HEGP), du Centre hospitalier universitaire de Nice, de la Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris et du Service de Santé des Armées (Ecole du Val-de-Grâce) et d’enseignants des Universités Paris Descartes, Pierre et Marie Curie et Nice Sophia Antipolis.


Comment appréhender une tuerie de masse pour les équipes smur primo-intervenantes (Service médical du RAID-antenne médicale spécialisée de Satory (GIGN)
Recommandations de bonne pratique clinique concernant la prise en charge médicale des victimes d’une tuerie de masse. (SFMU-SUDF-SFAR-SFCU-SFMC 2018)

Etude de l’association entre durée de prise en charge pré-hospitalière et mortalité à l’hôpital après un traumatisme grave

Publié le 25/10/2019. Communiqués de presse APHP

Un consortium français de recherche sur la prise en charge de patients traumatisés graves, qui a été créé à l’initiative du Dr Tobias Gauss, du service d’anesthésie réanimation de l’hôpital Beaujon AP-HP, et du Pr Pierre Bouzat, du Centre Hospitalier Universitaire Grenoble Alpes, et qui associe notamment le Dr François-Xavier Ageron, du centre hospitalier d’Annecy, a étudié l’impact de la durée de la prise en charge pré-hospitalière sur le pronostic de patients ayant subi un traumatisme grave. Ces travaux, menés en collaboration avec Université de Paris et Sorbonne Université, ont pour particularité d’avoir été menés sur le modèle du système de secours pré-hospitalier qui s’appuie sur la présence d’un médecin sur les lieux de l’accident, comme en France avec les structures mobiles d’urgence et de réanimation (SMUR). Ils ont été publiés le 25 septembre 2019 dans la revue JAMA Surgery.

L’étude, multicentrique, a été menée de janvier 2009 à décembre 2016. Les données étaient issues de deux registres régionaux prospectifs en traumatologie : le registre Traumabase et le registre du Trauma système réseau nord alpin des urgences (TRENAU).

Créé en 2012 à l’AP-HP, le registre Traumabase comprend actuellement les données de 20 centres à l’échelle nationale avec plus de 23 000 patients. Six centres de référence labellisés « trauma center » et soutenus par l’ARS-Ile de France – hôpitaux Bicêtre, Beaujon, Henri-Mondor, HEGP et Pitié-Salpêtrière à l’AP-HP ; hôpital d’instruction des armées de Percy - ont contribué à cette étude.

Le registre TRENAU, qui existe depuis 2009 en région Rhône-Alpes et qui est devenu en 2018 le registre TSAAR pour « Trauma system Auvergne Alpes Rhône », inclut actuellement plus de 12 000 patients. 13 centres, soutenus par l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes* ont participé à cette étude.

Les patients adultes, ayant subi un traumatisme et admis dans l’un de ces centres régionaux de traumatologie référents entre janvier 2009 et décembre 2016, ont été inclus dans cette étude. Comme c’est le cas dans le système de secours pré-hospitalier français, un médecin était à chaque fois présent lors de la prise en charge pré-hospitalière.

L’analyse des données a eu lieu de mars à septembre 2018. L’association entre la mortalité et la prise en charge pré-hospitalière a été évaluée en fonction de plusieurs variables (comme l’âge, le moyen de transport, la gravité ou les mesures de réanimation préhospitalière). La durée totale de la prise en charge pré-hospitalière (définie comme le temps qui s’écoule entre l’arrivée de l’équipe des secours sur les lieux de l’accident et leur arrivée à l’hôpital) était la variable la plus importante. L’analyse a plus particulièrement porté sur la mortalité à l’hôpital toute cause confondue.

Au total, 10 216 patients ont été inclus. 78% d’entre eux étaient des hommes jeunes, âgés en moyenne de 41 ans. En moyenne l’indice indicatif des lésions (Injury Severity Score) atteignait 17 points (or un score supérieur à 15 indique un ou des traumatismes significatifs). 27% des patients présentaient un traumatisme crânien grave et 10% un état de choc.

Le temps de prise en charge entre l’accident et l’arrivée à l’hôpital était en moyenne de 65 minutes et le taux de mortalité à l’hôpital était de 9,5%. Après ajustement sur les critères confondants (troubles de conscience, sévérité des lésions traumatiques, troubles circulatoires, âge), la probabilité de décès toutes causes confondues augmentait de 4% pour chaque augmentation de dix minutes du délai entre l’accident et l’arrivée à l’hôpital.

Cette étude démontre ainsi une association entre le délai d’arrivée à l’hôpital et la mortalité hospitalière après traumatisme grave, dans un système de soins pré-hospitalier médicalisé comme le système français, comme cela était connu précédemment avec des systèmes non médicalisés. Ces résultats étayent le constat que le délai d’arrivée à l’hôpital doit faire partie des indicateurs suivis dans la prise en charge globale des patients traumatisés graves. Pour les auteurs, ces travaux plaident pour la mise en place de mesures individualisées et pour une estimation du temps nécessaire pour les réaliser. La situation est à apprécier, au cas par cas et sur place, par des médecins experts du pré-hospitalier. Ces résultats ne doivent pas faire sous-estimer le fait qu’une partie du temps préhospitalier est parfois contraint (désincarcération, distance géographique, densité du trafic urbain).

* Depuis une dizaine d’années, l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes anime et soutient la structuration des filières de soins en médecine d’urgence, par l’intermédiaire de plusieurs réseaux d’urgence. La réunion sur le TSAAR, qui s’est tenue en septembre 2018, a notamment permis de présenter le trauma-système régional (cahier des charges, cartographie du réseau…).

Sources :

Association of Prehospital Time to In-Hospital Trauma Mortality in a Physician-Staffed Emergency Medicine System

Tobias Gauss, MD1 ; François-Xavier Ageron, MD, PhD2 ; Marie-Laure Devaud, MD3 ; et al

JAMA Surg. Published online September 25, 2019. doi:10.1001/jamasurg.2019.3475

A propos de l’AP-HP : Premier centre hospitalier et universitaire (CHU) d’Europe, l’AP-HP et ses 39 hôpitaux sont organisés en six groupements hospitalo-universitaires (AP-HP. Centre - Université de Paris ; AP-HP. Sorbonne Université ; AP-HP. Nord - Université de Paris ; AP-HP. Université Paris Saclay ; AP-HP. Hôpitaux Universitaires Henri Mondor et AP-HP. Hôpitaux Universitaires Paris Seine-Saint-Denis) et s’articulent autour de cinq universités franciliennes. Etroitement liée aux grands organismes de recherche, l’AP-HP compte trois instituts hospitalo-universitaires d’envergure mondiale (ICM, ICAN, IMAGINE) et le plus grand entrepôt de données de santé (EDS) français. Acteur majeur de la recherche appliquée et de l’innovation en santé, l’AP-HP détient un portefeuille de 650 brevets actifs, ses cliniciens chercheurs signent chaque année près de 9000 publications scientifiques et plus de 4000 projets de recherche sont aujourd’hui en cours de développement, tous promoteurs confondus. L’AP-HP a également créé en 2015 la Fondation de l’AP-HP pour la Recherche afin de soutenir la recherche biomédicale et en santé menée dans l’ensemble de ses hôpitaux. http://www.aphp.fr


Des médecins ukrainiens se forment à la médecine de guerre… dans un pays en paix

Publié le 17/05/2022

Neuf soignants ukrainiens ont été formés à la médecine de guerre en France avant de repartir dans leur pays sous les bombes.

Un missile russe vient de frapper l’immeuble. Un homme inconscient a été projeté au sol et enseveli sous les décombres. Un médecin et une infirmière ukrainiens accourent vers le blessé. Pas d’urgence : la victime est un mannequin, il ne s’agit que d’un exercice. Nous sommes à Metz, à l’Institut européen de formation en santé, où neufs soignants ukrainiens (cinq anesthésistes-réanimateurs, trois infirmiers réanimateurs et un chirurgien traumatologique) sont venus se former à la médecine de guerre avant de repartir dans leur pays. Ils ont pour cela reçu une dérogation spéciale des autorités de Kiev, les médecins ayant en principe l’interdiction de quitter l’Ukraine.

Le triage, une mission moralement difficile

La formation accélérée est assurée par l’Union des organisations de secours et soins médicaux (UOSSM), une ONG française qui a déjà formé plus de 34 000 soignants syriens à la médecine de catastrophe en 11 ans de conflit en Syrie. Le Pr Raphael Pitti, ancien médecin militaire, apprend à ses neufs élèves ukrainiens les quatre phases du traitement d’un blessé en zone de guerre : évaluation, stabilisation (rétablir l’oxygénation et la pression artérielle), diagnostic lésionnel et enfin prise en charge adaptée à ce diagnostic. Le Pr Pitti essaye également de les préparer à une mission qui peut être psychologiquement très difficile à laquelle sont confrontés les médecins en zone de guerre, celle du triage entre les victimes qui peuvent être sauvés, celles qui peuvent attendre et celles qui sont condamnés.

« La principale difficulté est le phénomène des blessures de masse : quand un missile ou un obus touche un immeuble d’habitation, nous devons parfois gérer 40 ou 50 blessés qui arrivent en même temps à l’hôpital » explique le Dr Igor Deymeka, l’un des médecins formés cette semaine à Metz. Ce dernier a déjà une grande expérience de la médecine de guerre, puisqu’il a servi dans le Donbass entre 2015 et 2016. Selon lui, les troupes russes n’hésitent pas à viser délibérément les hôpitaux et les médecins, aux mépris des conventions de Genève. Lorsque lui et ses confrères rentreront en Ukraine, ils n’iront pas sur la ligne de front mais ouvriront un centre de formation à la médecine de guerre à Lviv, dans l’ouest du pays. L’objectif est de former 2 000 soignants ukrainiens par an à la médecine de catastrophe. « Nous ne manquons pas de médecins sur le terrain, mais ce dont nous avons le plus besoin, ce sont des formations ».

La crainte des armes chimiques

Les soignants ukrainiens venus en Lorraine apprennent également à utiliser du matériel de pointe, tel que des échographes portatifs, qui permettent de déterminer rapidement la présence d’hémorragie dans le thorax, l’abdomen ou le bassin du blessé. « Cela fait presque disparaitre la notion d’urgence relative » explique le Pr Pitti. Les étudiants se sont également préparés en cas d’attaque à l’arme chimique ou d’utilisation de bombe au phosphore. « Ces armes n’ont pas encore été utilisés en Ukraine, mais on l’anticipe » s’inquiète le Pr Pitti, qui a vu les effets de ces armes non-conventionnels en Syrie.

Dès dimanche prochain, après seulement une semaine de formation, les neufs soignants ukrainiens repartiront vers leur pays en guerre. La plupart ont déjà mis leur famille à l’abri en Pologne ou en Allemagne. Leur priorité désormais est de sauver des vies et d’aider à la défense de leur pays.

Quentin Haroche
jim.fr

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La France fera face à ceux qui ne pensent qu’à nous plonger dans le trouble et le désordre. L’obscurantisme n’appartient pas aux enfants du siècle des lumières. Debout nous sommes, debout nous resterons. Et face à eux, c’est un peuple entier qui se dresse déjà. Comme les irréductibles gaulois que nous sommes.

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Arnaud BASSEZ

IADE

Administrateur

Enseignant CESU-formateur AFGSU